Ça faisait longtemps que j’avais pas raconté des conneries corporate.
MyLife.com: J’ai récemment changé de lieu de travail. Je suis toujours chez Brouillis Consulting, filiale de Berniques S.A., en prestation chez Merluchon Corp, sous-traitant de Deus Unlimited. L’ambiance me plaît mieux, mais la fréquence d’évènements boîtaux risque de diminuer fortement. En attendant, voici les trucs top-lol, bizarres et marquants de mon ancien lieu de travail.
Avertissement: Cet article est un récit concentré. Il obéit donc au principe régissant les séries téloche traitant de la vie normale: en 40 minutes, il arrive aux personnages tout ce qu’il vous arrive à vous en une année. L’intérêt de cette astuce étant de bien vous faire prendre conscience que votre vie est médiocre et insipide.
tchou-tchou, vroum-vroum
Ce matin le train a décidé de tomber en panne. Pourquoi pas. Comme déjà dit dans un précédent article, les transports de la région vomissements. La SNCF organise des grèves régulières locales, pour diverses raisons alchimiques. J’ai toujours ressenti cela comme une agression personnelle. Si c’était une grosse grève nationale, tout le monde serait dans la merde, et ça créerait un sentiment de solidarité entre les « usagers ». Là, c’est que pour moi. Petites piques cruelles qui me sont spécifiquement adressées et dont le reste du monde se fout. (La plupart des merluchoniens prennent la voiture, car ils aiment bien montrer qu’ils sont des grandes personnes.)
Un jour un type s’est pris la tête avec un contrôleur. Je voulais participer mais j’ai jamais pu en placer une. Un contrôleur copain a radiné sa petite gueule de taupe lèche-bite. Il n’avait rien suivi de la conversation, mais s’est tout de même permis de piailler: « oh mais si vous êtes pas content, vous prenez la voiture! » Super. Merci pour la participation.
Je pense que le contrôleur-copain n’avait pas le droit de dire ça. La SNCF dit: « À nous de vous faire préférer le train », ce qui est l’exact contraire. Quand un employé a un discours opposé à son entreprise, il ne doit pas être en contact avec des clients. Ce n’est pas obligé de le virer, mais la moindre des choses serait de le cacher dans un bureau, ou dans une cave, avec des pénis de singes crus pour seule nourriture.
Il s’est passé des tas d’autres choses toutes pourries avec ces super-contrôleurs, ces super-guichetiers, et ces super-traîne-savates-siffleurs. Je ne veux pas les raconter ici, sinon je vais pleurer. Je pense juste que ce sont des jean-foutres et qu’ils n’ont aucun sens de l’équité. Vous êtes mes problèmes et la source de mes problèmes.
Avant j’avais rien contre les grèves SNCF (il faut dire « mouvement social »). C’est parce que j’étais pas vomissements. Vous connaissez l’expression micro-trottoirienne: « les usagers sont pris en otage »?
Eh bien moi, ça ne me dérangerait plus de la prononcer. Je ne veux plus les défendre. C’est fini. Peut-être que c’est notre méchant gouvernement qui est le problème et la source de tous ces problèmes. (Hop, petite phrase de gauche pour faire monter le nombre de visiteurs du blog). Mais de toutes façons j’ai pas envie d’y réfléchir.
Après le train, je dois prendre le bus. J’en vois un qui s’apprête à partir. Je cours pour le choper. La conducteuse me fait bien sentir que ça lui arrache la gueule de me rouvrir les portes et tout ça. Puis, je m’aperçois que c’est le bus à contresens.
Que je vous explique: y’a pas un arrêt de bus d’un côté de la rue,et l’autre de l’autre côté. Nan c’est une gare routière et les bus se garent tous dans le même gros pâté. C’est important l’humour, quand on fait de l’aménagement urbain.
Je dis à la conducteuse que je me suis planté de sens. Elle dit qu’elle veut pas me faire ressortir parce que déjà elle est en retard et exceptionnellement elle m’a fait monter, alors ça va déjà bien comme ça et que j’aurais qu’à descendre au prochain arrêt, ah non mais hein, c’est-y donc pas possible toute cette gabegie, etc. Deux bus de la même ligne nous croisent pendant ce mini-trajet à l’envers. VDM.
En vrai je m’en fous d’arriver super-en-retard, parce que je trouve mon boulot complètement absurde. Mais ça m’énerve quand même. Surtout que toutes ces petites histoires très drôles surviennent aussi au retour et ça j’aime beaucoup moins. Mon temps libre est très précieux, car je n’ai pas le même destin que l’amorphe reste de l’humanité. Je fais des œuvres d’art moi et j’écris des articles.
Achievement unlocked! parvenir à réussir à arriver au boulot
Je fais le dernier bout de chemin avec SuperGeek, croisé là par hasard. Nous avons une conversation classique, mais agréable. En cette période d’hiver, il aime à regarder la neige qui tombe: « Cet espèce d’économiseur d’écran permanent ». Par ailleurs, il se pique parfois de dessiner des smileys géants sur les capots de voiture.
Je pénètre enfin dans les locaux de Merluchon. Ça m’aura donc pris 1h30 pour parcourir une vingtaine de kilomètres. Belle performance. Mais la SNCF a déjà réussi à me faire faire pire.
Je croise un mélange de collègues et de mi-collègues. Je sais jamais comment je dois doser le bonjouring dans ces situations. Le pire c’est quand tu croises des trois-quart collègues en pleine journée, alors que tu les as pas vus avant, ou quand tu croises un collègue une deuxième fois. C’est un de ces bordel ces codes sociaux. Oh, et sinon, les filles ne font plus la bise à cause de la grippe A. Je m’en suis accommodé sans problème. Tant que cette petite maladie friponne ne m’interdit pas de mater des fesses et des nichons, tout va bien.
Je jette mon duffel-coat quelque part. Aujourd’hui, j’ai mis ma chemise bleu foncée d’ouvrier-codeur. C’est mon vêtement ironique. Sur ce, j’allume mon n’ordinateur chéri adoré que j’aime.
Germaine-Germaine, la cheffe de pièce, entre dans la pièce. Elle me dit bonjour et me pose discrètement la question: « t’as picolé? » Effectivement, pour une raison qui ne me revient plus en mémoire, hier, j’étais super saoul. Cette dame m’impressionne, elle parvient systématiquement à détecter mes soirées cuite. Non attendez, peut être qu’elle se repère juste par rapport à mon haleine de hamster mort.
Aujourd’hui, c’est mardi, donc c’est croissant. J’en prends un, remercie celui qui les a amenés et vais chercher un café. Après une petite offrande à la déesse-machine, un liquide noir coule de son vagin. J’ai appuyé sur le bouton « pas_de_gobelaid_de_plastik », et j’ai bien pensé à glisser dans son entrejambe ma tasse à moi faite en dur. Si je fais ça, c’est uniquement pour me donner bonne conscience. Allez surtout pas croire que je veuille économiser l’humanité. J’ai tellement envie qu’on se débarrasse de cette grosse bourde et qu’on passe à l’espèce suivante.
Aujourd’hui, c’est lundi. Je sais que dans 10 minutes, je serai pris d’une épique envie de chier. J’ignore ce que fout mon corps, mais à chaque fois, je cague que dalle de tout le week-end et dès le lundi: wouorf ! J’aime à croire que ce phénomène peut être attribué à l’origine psychologique suivante:
Chier est, de toutes façons, un gaspillage de temps. Mais il vaut mieux gâcher du temps de travail que du temps de week-end. Mon boyau à merde s’occupe de lui-même de cette optimisation.
Un téléphone sonne dans le couloir. Les premières notes ressemblent à une chanson de Renaud: « En cloque ». À moins que ce soit « Je suis une bande de jeunes à moi tout seul ». Je hais les sonneries de portables musicales. Le mien fait tubulululup et ça suffit amplement. C’est un téléphone, pas une cantatrice.
Ah, ça y est. Mon sphincter envoie les premiers signaux d’overflow. Et c’est pas le café que je viens de lui injecter qui va l’aider à bufferizer. Chai pas vous, mais moi le café, ça me dilate le foc. Rassurez-vous, je n’utilise pas cette particularité physique à des fins pernicieuses. Sur ce, je me dirige vers les toilettes.
Les locaux de Merluchon Corp comportent 4 étages, chacun divisé en trois couloirs. Il y a une seule chiotte à caca par couloir. Ça en fait beaucoup, sauf qu’elles sont complètement éparpillées!!! Je vais dans les plus proches. Elle est occupée. Je vais dans celle d’à côté (au passage je dis coucou à la gentille dame de l’accueil). Occupée. Je vais dans celle d’à côté à côté. Occupée. Je monte d’un étage. Ça fait trois fois que la nana de l’accueil me voit passer, je suis sûr qu’elle se fout de ma gueule ou qu’elle me trouve bizarre. J’en suis plus à ça près. Occupée. Occupée. Occupée. Au troisième étage, je trouve enfin une chiotte libre. VDM.
Je chie tout ce que je peux,
mais je sais bien que dans une heure, il faudra que j’y retourne. Pour une raison inconnue, je n’arrive jamais à tout éjecter en une fois. Peut être qu’il faut du temps à ma merde pour parcourir tout le boyau à.
Je lis la feufeuille décrivant les conseils développement-durable-tendance à appliquer pour économiser l’humanité. Il y en a une sur chaque porte de chaque toilette. Elles sont imprimées en couleur.
Je retourne à mon n’ordinateur que j’aime et démarre le logiciel de mail (dont je tairai la marque, pour pas foutre la honte à Merlu). Mon nom de compte est « Raychèr », avec une faute.
Mon patronyme existe sous trois orthographes différentes. La française : « Réchèr ». L’alsacienne : « Räscherr ». Et la française du 17ème siècle : « Raychayr ». Les gens se plantent tout le temps, et parfois, ils vont même jusqu’à tout mélanger (cf mon compte Outlook) (woups).
Je n’ai pas cherché à corriger ni à signaler l’erreur. À un certain moment de ma vie, j’en ai eu marre de devoir tout le temps préciser comment ça s’écrit. Maintenant, on peut faire ce qu’on veut avec mon nom. Et quand on me demande de l’épeler, je réponds n’importe quoi. Mon but ultime est de négationner son orthographe exacte. Et tant pis si ça fout le bronx pour ceux qui me recherchent dans Google. Ouais y’en a. J’suis connu.
Je me mets à bosser. Faut que j’écrive une dissertation sur la façon dont je compte patcher le logiciel « CUISSEAU ».
Ce logiciel doit pouvoir lire un fichier de configuration supplémentaire, passé en 11ème paramètre, afin que le traitement qu’il effectue puisse prendre en compte des valeurs supplémentaires de densité moléculaire. Je ne suis pas sûr de l’utilité finale de CUISSEAU. Je crois qu’il permet de télé-upgrader par internet des firmware de puce pilotant des plaques à induction de cuisinières de restaurants. Je m’en fous un peu, en fait.
Radio-moquette: des bruits de couloir me renseignent que l’over-chef de chef de chef de Merluchon va venir ici même, là, aujourd’hui. Pour y faire quoi? Sais pas. De toutes façons je serai certainement cloîtré dans un placard avec interdiction de l’entrapercevoir et comme ça m’intéresse pas, ça tombe bien. En tout cas, ça explique pourquoi Jupette a mis une super-jupette.
La personne de Deus Unlimited ayant commandé le nouveau CUISSEAU s’appelle Monsieur Grillet. A chaque fois que je vois ce nom, je pense au sketch de Chevalier-Laspalès:
Vous voulez quoi? Des to-asts? Des tyost! Des towowoss! DES TOYOSTS! TOSS-WOSS-YOWOSSS! DES TOWOWOYOSSTS! TOOWAABOOOUUNNGGAAAYYOOWWAASSSTTS!!! …………………. Ouais, des tartines grillées quoi.
Comme prévu par mon intérieur, je dois retourner aux toilettes. On va dire que la fois d’avant, j’ai eu beaucoup de chance et je suis allé aux plus proches. Re-coup de bol, elles sont toujours guillerètement libres.
Surprise! La crotte flottante que j’avais eu beaucoup de mal à faire partir la dernière fois est revenue! Elle a certainement remonté le tuyau avec ses petits bras en caca.
Ça me rappelle mon stage de fin d’études. Le chef était ressorti prestement des toilettes avec une mine de dégoût, en demandant à la cantonade qui était le précédent. Tous les autres stagiaires m’avaient montré du doigt. Certes, les chiottes étaient un peu sales, mais j’avais le souvenir très exact d’avoir tout bien nettoyé. Je n’ai jamais compris ce qu’il s’était vraiment passé ce jour-là. Le souvenir me reste gravé comme une cicatrice. Je me sens mal.
Je me masturbe dans les toilettes. (Je ferais peut être un article détaillé sur les différentes variantes de gestes sensationnatoires. avec classification et scores.)
Je ressors, en vérifiant bien qu’il n’y ait pas de « petit trapéziste de sperme » accroché à ma braguette.
Je finalise ma dissertation et vais voir Germaine-Germaine pour le lui signaler. Elle me répond « bravoooooo!!! » sur un ton de foutage de gueule. Je suis quelque peu interloqué. C’est ma cheffe, donc je suis plus ou moins obligé de lui dire où j’en suis. Je ne viens pas lui annoncer mes exploits pour lui montrer que je suis un surdoué, que j’expecte du triomphe, des honneurs et des petits anges tout nus jouant de la trompette dans ma tête. Mais bon, si elle a besoin de me lancer des quolibets pour se sentir bien, qu’elle s’en donne à cœur joie. Je peux comprendre: je suis payé plus qu’elle alors que j’ai moins d’ancienneté et moins de grade.
Excusez-moi, je suis un peu mauvaise langue. Elle ne me le fait plus le coup du « bravoooo!! » Assez rapidement, elle a compris que j’étais réellement surdoué et qu’elle avait indispensablement besoin de mes lumières pour réussir les projets dont elle est cheffe. Maintenant, elle évite de me titiller la bisque (l’organe psychologique de réception de la moquerie).
C’est l’heure de manger.
/* pause de midi, cas 1 */ pid = fork(); if (pid == 0) {
Le technopôle dans lequel Merluchon s’est implanté a connu un développement trop rapide et tout l’espace vital a été conquis par des entreprises œuvrant dans le secteur NOIR. Le lieu de restauration le plus décent de la zone est une cafétéria, qui profite de sa situation de monopole pour être dégueuchère (et elle a bien raison, après tout).
C’est pourquoi, pour désigner un aménagement territorial de ce type, on préférera parler de « péquenopôle ».
Sur le chemin, je discute avec Underground. Il me raconte que les travailleurs de l’agence Atome-de-Baryum sont des gros asociaux, alors que nous on l’est pas du tout. Ça me fait beaucoup rire.
On entre dans la cafet’. Plateau, verre, couteau, fourchette. J’attrape un mini-morceau de fromage, puis je pose mon bardaf sur le rail.
Des habitués d’une autre entreprise se sustentent à une table. Je les aime bien ceux-là, car ils ont des têtes de geek. Y’a un maigrichon à lunettes mal rasé, un grand à lunettes mal rasé avec une queue de cheval, une nana vraiment SUPER moche avec un corps en fil de fer. Le meilleur, c’est leur chef, un gros à lunettes avec des cheveux longs, arborant systématiquement un T-shirt rien chouette, du genre: « Un clavier azerty en vaut deux », « What you see is what you get », etc.
J’aimerais bien travailler avec eux. Mais moi je suis avec des gens normaux, c’est super chiant.
Juste derrière moi, Greumzy se met d’un coup à me gueuler dessus. Apparemment, j’ai failli lui foncer dedans et faire tout renverser son plateau. J’ai pas du tout réalisé à quel moment un tel accident aurait pu se passer. Je lui demande, mais c’est Pompière qui répond à sa place, en disant que « ha ha ha, en plus si tu t’en es pas rendu compte, alors oui c’est pire. » Ok. Merci.
Je ne saurai jamais la vérité sur ce quasi-drame.
En attendant, je suis socialement méga dans la panade. Greumzy est un voisin de pièce. En 6 mois, j’ai parlé 1,5 fois avec lui (si on exclut les bonjour-bonsoir). Un respect silencieux, teinté d’une forte timidité, s’était installé entre nous. Eh bien voilà, la glace est maintenant brisée. Me reste plus qu’à jeter toute ma bouffe par terre, m’enfuir en pleurant, et me prostrer au pied d’un arbre sombre, avec de l’alcool.
La prochaine fois, il prendra un truc comme ça:
J’essaie de faire comme si tout allait bien, et m’avance vers les gâtes-sauce distributeur de graillasse. Le menu est affiché, mais je préfère regarder directement ce qu’il y a dans les bacs.
Je choisis toujours des trucs très simples à manger. Pas de cuisse de poulet à dépiauter, pas de paëlla avec des crevettes à décortiquer, pas de bouts de viande avec du gras à séparer, pas de rôti à moitié cuit super galère à découper, pas de brochettes à démonter. Rien. Interdit toutes ces choses horribles.
J’ai jamais vraiment su manger correctement. Ça a toujours désespéré mes parents. Il paraît aussi que je tiens ma fourchette de manière bizarre. Mais je les emmerde. Le désavantage de pas pouvoir manger des trucs compliqués en société est bien faible par rapport à l’avantage que je les emmerde. J’ai choisi de manger comme ça. C’est l’une des rares choses que j’ai pu choisir, il y a longtemps, et le fait que ce soit un choix absurde n’a aucune importance. Et puis, j’aime vraiment pas le gras. Le pire, c’est les mélange bouts-de-viande + gras noyés dans de la sauce. Impossible de détecter quoi que ce soit. J’essaye de faire le tri, mais à chaque bouchée, j’ai la hantise de tomber sur une de ces saletés de petites sangsues élastiques régurgitogènes.
Concentré sur cette recherche de simplicité et de beauté absolue, j’en viens à demander du porc au gâte-sauce, alors que c’est du veau. Bon, ça c’est pas grave du tout. De toutes façons j’ai jamais su faire la différence entre toutes ces viandes. Qu’est-ce qu’on s’en fout, sérieux.
Je me dirige vers une table. Le placement est super important. Dans la situation actuelle, je dois bien évidemment m’éloigner le plus possible de Greumzy et Pompière. Par chance, il y a une place de libre à la table de Monsieur Vêtement, WikiDisney et leurs amis. Je les aime bien eux, y’a toujours moyen de raconter des grosses conneries qui vont les faire se facepalmer.
Ça ne manque pas. Quelques minutes après le « bon appétit » et le début des hostilités, Monsieur Vêtement va chercher une cruchasse d’eau à la fontaine. Il la prend super-froide et rajoute des glaçons. Je lui dit que c’est tellement une chochotte qu’il est même pas foutu de boire son eau sec! Ben oui, il la coupe avec des glaçons! Ha ha ha! Facepalm.
Ça sent le cramé dans toute la cafèt’. On sait pas ce qu’ils ont foutu, mais ils ont dû bien se marrer. Skrüü De Flüü essaie d’oublier le goût de ses nouilles avec une heavy rasquade de tabasco. Candido entretient son régime en ganachant ses haricots d’une pelletée de mayonnaise. J’espionne les gens dans la file d’attente pour repérer la nana avec des nichons d’enfer que je croise de temps en temps. Malheureusement, elle est pas là aujourd’hui.
(image nichon)
Après une dernière remarque à la con (« une cravate, même moche, ça te va toujours bien quand t’es à poil en dessous »), on lève le camp. Je retourne dans ma pièce et retrouve mon copain le n’ordinateur .
/* pause de midi, cas 2 */ } else {
Aujourd’hui, la cafèt’ est fermée pour congés annuels. Dans ma tête, je trouve ça plus drôle de dire que c’est à cause de travaux de réparation, suite à un incendie dans un frigo. (Avec des glaçons).
Les gens se sont éparpillés dans les alentours du péquenopôle pour chasser à manger. Je n’ai jamais trop réussi à savoir où ils allaient, tous. Mais ça m’arrange. Je me retrouve tranquille tout seul, et sors pour aller traîner au hasard des bas-côtés. Le péquenopôle n’est pas doté de trottoir, il y a juste de l’herbe en vrac sur le bord des routes. Mes pas (et quelques panneaux indicateurs) me mènent tout naturellement vers un MacDo.
Comme dit dans un précédent article, je suis pas whizzement fan du MacDo, mais il faut bien leur reconnaître une chose: leur taux de pénétration des coins paumés est des plus impressionnant: Gro[en]land, désert de Gobelie, univers parallèle où les femmes ont trois seins et donc, le péquenopôle de la banlieue de Zogzogunterkirche (Je viens de décider que c’est là que se déroule toute l’histoire).
Rien à dire sur le MacDo en lui-même et les gens que y’a dedans. Tout est très prévisible.
Je remarque quelques personnes arborant fièrement autour de leur cou leur petit badge d’allégeance à Deus Unlimited. Je sais que c’est du fake. Les vrais gens de Deus ne se déplacent jamais jusqu’à leurs vassaux perdus au fond de la cambrousse. Nan, ils restent cantonnés dans leur forteresse, à Lekkemi’amorsh, et nous convoquent quand bon leur semble. Les gens présents ici ne sont que des hobereaux comme moi, dotés d’un simple badge provisoire d’autorisation d’entrée.
Ma religion personnelle m’oblige à prendre une bière lorsque je mange au MacDo. Mais ils ont cassé leur tireuse ces cons-là. Heureusement, l’un des préceptes de ma religion m’autorise à casser n’importe quel précepte de ma religion. (La connerie à pas faire, c’est de casser le précepte autorisant à casser les préceptes. Ha ha ha).
Bref. Je prends des poutatoze et un sandwich à n’importe-quoi et je me barre. Je mange sur le chemin du retour. Je suis un peu déprimé et triste, sans trop savoir pourquoi. Mais j’aime bien me sentir déprimé et triste. Voilà. Je retourne dans ma pièce et retrouve mon copain le n’ordinateur.
} /* fin pause de midi */
C’est l’après-pause de midi. Je m’octroie, sans aucune honte, mon petit moment de détente casse-brique Alphabounce. Héhé, j’ai récemment chopé l’accélérateur syntrogénique, du coup je joue un peu plus longtemps. Ensuite je me fais un ou deux niveaux de DROD. Avant je jouais à DinoRPG, mais ça me niquait tout mon quota de connexion internet. Et de toutes façons, DROD, c’est 1000 fois mieux.
Dans la pièce à côté, la tendance est au Counter-Strike. J’entend un type râler parce qu’il perd, tel un gros adolescent débile. Ah merde! Donc on a le droit de faire le gamin nerveux même en société! Putain, ils m’ont vraiment dit n’importe quoi mes parents.
Un téléphone sonne. Personne ne décroche. La sonnerie est redirigée vers l’accueil, mais les jolies hôtesses sont pas là, car c’est l’été et leurs horaires sont un peu plus permissifs (et c’est tant mieux pour elles). La sonnerie devient alors récupérable par n’importe qui, depuis n’importe quel téléphone. Pour bien faire comprendre ce fait absolument génial, une alarme de joueur d’orgue sourd résonne dans tout le couloir. Je déteste ça. Et on y a droit 2-3 fois par jour.
Des fois je laisse couler. Des fois je rouspète. Mais là, je décide de prendre la situation en main et de régler moi-même le problème. Je décroche mon téléphone et tape 88.
Ça aura été l’un des moments les plus inutiles de ma vie. On m’y reprendra à vouloir régler moi-même des problèmes.
Germaine-Germaine revient de son mangeage. Elle bidouille un peu avec son n’ordinateur. Soudain, je reçois un mail de sa part. Une invitation à son anniversaire!! Je blêmis et tremble des poils pubiens. Un moment social non corporate avec des collègues de travail! Qui plus est, avec sa cheffe!
Je n’ai pas besoin d’inventer d’excuse, car le même week-end, un ami à moi non-virtuel organise une petite fiesta-craquasse pour son départ imminent en Australie du sud. Ouf.
Sérieusement, cet anniversaire, ça aurait été n’importe quoi. Je sais très bien que j’aurais été incapable de me tenir. J’aurais débarqué armé de trois packs de kro, j’aurais lancé un concours de shpockage avec ses objets personnels,
ensuite, j’aurais avoué à ses copines que j’aime les gros seins et avec un peu de malchance, j’aurais fini par me battre avec son meilleur ami, suite à une mésentente sur un chronométrage de cul-sec.
Sur ce, ma dissertation n’est pas tout à fait finie, car je dois maintenant faire le chiffrage. C’est le moment le plus critique. Plusieurs forces entrent en jeu:
- Mon envie de dire que ça va me prendre 2-3 jours de plus que ce que j’estime, afin de me donner une marge de glandage.
- Mes mauvaises capacités d’évaluation, qui font qu’une tâche me prend toujours quelques jours de plus.
- Germaine-Germaine, qui regarde mes chiffrages, refuse d’admettre que ça me prendra autant de temps, et diminue le nombre de jours.
- Deus Unlimited, qui sont les valideurs finaux des chiffrages, et discutent parfois, mais rarement. De toutes façons ils sont pétés de tunes, alors ça ne les dérange pas de nous jeter quelques miettes de plus en pâture. (Fait dont on ne profite pas vraiment, because diminution des chiffrages par la personne citée plus haut).
C’est donc le moment le plus critique, mais la décision se prend à l’arrache, en trente secondes. Je vous montre:
Germaine-Germaine: « ce truc là, ça va pas te prendre 5 jours. Je t’en mets 4. »
Moi: « Bon ben va pour 4. »
Et voilà. C’était super. Après je bosserai dessus, je sais que j’aurais pas mon temps de glandage et avec mes estimations pourries, on risque même de faire du vilain TNF (Temps Non Facturé). Et ça, c’est outrageusement caca-pas-bien.
J’ai bien conscience que, par rapport à d’autres métiers, d’autres entreprises et d’autres salaires, ma situation est plus que correcte. Je pisse du code (c’est ce qui me plaît et ce que je sais faire), on me fout relativement la paix, on ne passe pas derrière mon écran pour m’espionner, l’ordinateur chéri que j’ai est pas trop pourri, les horaires sont plutôt libres et on m’a jamais trop engueulé les quelques fois où j’ai fait du méchant TNF.
Nan le vrai problème, c’est moi et ma désapprobation globale du concept du travail. J’aime bien pisser du code et du texte, mais que pour moi (articles débiles, jeux vidéos, autres conneries…). À part ça, j’aime pas bosser. C’est aussi simple que ça. En vertu de ce principe, j’essaie de maximiser mon temps de glandage pour faire des choses qui me tiennent à cœur.
Tout mon comportement professionnel est orienté dans ce sens. Je suis toujours en train de calculer dans ma tête combien de temps une tâche va réellement me prendre et combien de glandage cela me permettrait d’obtenir. Car, bien entendu, s’il y a des jours de rab’ par rapport au chiffrage, je me les prends pour moi. Je vais pas les donner en surproduction à l’entreprise. Oui c’est très vilain, mais j’estime que c’est juste. Si je suis suffisamment doué et travailleur pour accomplir quelque chose en moins de temps que prévu, alors le bonus est pour moi.
Je développerai ce sujet de manière plus détaillée dans un autre article. Oui je sais, je dis ça tout le temps. Le temps.
En plus, il y a pleins de petits moments où je bosse pour de vrai, sans que ce soit réellement comptabilisé: répondre à un utilisateur qui n’a aucune idée de ce que fait l’outil qu’il utilise, aider Germaine-Germaine qui s’est vautrée dans une expression régulière, assister à des réunions à la con…
Un autre téléphone portable sonne quelque part. Cette fois-ci, la sonnerie ressemble au début d’une chanson d’Echo Lali: « Les voyages de Léo ». Vous pouvez l’écouter / la télécharger librement (http ://www .jamendo.com/fr/list/a2403/la-valise-aux-mille-voyages).
Sur ce, le chiffrage étant fait, je peux me mettre à bosser sur ce fameux CUISSEAU. Mais surprise, on m’annonce dans l’oreillette qu’il y’a un autre truc à faire en urgence. Je dois relire le document de spécification de l’outil CASTOR. J’en sais pas plus et on s’en fout. Par contre, faut se dépêcher et ne pas y passer plus d’une demi-journée. (ben oui, sinon je pourrais le comptabiliser dans mon rapport d’activités. Ha ha ha).
(image de castor en train de baiser dans une baignoire de coke)
Je chope la spec sur le serveur et commence à me la farcir. Gros problème: hier, j’ai vu un film de James Bond avec un allemand méchant et caricatural. Tout ce que je lis dans ma tête prend maintenant l’accent allemand. « Les tonnées tu fichier Musseau_XX.txt effektuent la korrezpondanz entre l’intex du lapel et l’itentifiant te la karteu ». Difficile de se konzentrer.
Je me lève pour poser une question à Germaine-Germaine. C’est toujours un moment que je redoute. Pas qu’elle soit méchante, en général, nos échanges restent corrects. Mais à chaque fois, j’ai peur de faire un lapsus tout pourri et de l’appeler « Maman ». C’est déjà arrivé dans ma tête. J’ai peur que ça sorte par inadvertance.
Comme on est jeudi, je reçois un rappel automatique pour la réunion ‘QX’. Prof, le chef de couloir, nous a mis à tous ces alertes hebdomadaires, suite à quelques remarques de la part de la certification qualité, qui trouvait qu’on ne faisait pas ces réunions assez fréquemment. J’appuie sur le bouton « faire disparaître » et continue de bosser sur mon CASTOR.
Mini-fork:
Pour une fois, la réunion QX a réellement lieu. On se retrouve tous dans une salle, Prof galère avec le vidéo-projecteur (tiens c’est marrant, comme les vrais profs à l’école), chacun dit où il en est, Prof note des trucs en bleus/rouge/noir dans son super document Word de suivi des projets, et moi je fais des petits dessins sur mon cahier grand-format-petits-carreaux.
J’aurais aimé vous les montrer, mais entre temps, j’ai paumé le cahier (tiens c’est marrant, comme quand j’étais à l’école). Pas grave. Je les referai comme si c’était pendant une QX, et vous aurez ça dans un autre article.
Retour à l’instance originelle de notre univers.
Ça fait déjà quelques jours que Germaine-Germaine se galère avec son PC. Elle le trouve super lent. Je suis pas sûr de comprendre comment c’est possible car on produit notre code directement sur les serveurs de Deus Unlimited. En local, on ne fait que des rédactions de document à la con (genre les dissertes) et des visionnements de powerpoint rigolos. Des fois, la connexion vers la forteresse de Lekkemi’amorsh est super défibrillée et c’est clair que c’est lent, voire immobile. Mais un nouveau PC n’arrangera rien. Bon on s’en fout, le passage rigolo, c’est là, tout de suite:
Germaine-Germaine téléphone au Bureau Populaire de Gestion des Équipements Automatiques et explique sa situation à un chef de boîtier: comme quoi que elle peut pas décemment bosser avec la rougnasse dont on l’a affublée, que ça la stresse et tout et tout. Le monsieur fait un télé-examen de son PC et admet sans problème le caractère « rougnasse » de l’objet, mais il ajoute qu’il ne peut pas lui en donner un nouveau, because restrictions de budget imposées par le chef du Bureau Populaire.
Là, Germaine-Germaine s’énerve et dit au monsieur qu’il se moque d’elle, que c’est n’importe quoi, que lui de toutes façon il a que ça à faire et qu’ils devraient tous être à sa disposition dans ce fichu Bureau. Prof arrive, tente de calmer la situation et demande à Germaine-Germaine de parler plus constructivement avec eux, même si ils peuvent rien faire. Elle part se détendre en allant prier à l’autel de la déesse-machine-à-café.
J’aime bien ces moments-là. Mais globalement, ça me fait quand même un peu chier d’être ici et de bosser. Un spectacle que j’aimerais bien que l’on m’offrît, c’est un collègue quelconque qui pèterait les plombs, débarquerait avec un fusil et menacerait tout le monde. Là je m’imagine en héros. On me verrait planqué derrière un mur couvert d’impact de balle, un téléphone à la main, demandant à la madame de l’accueil de bloquer toutes les issues et de me laisser seul avec ce forcené. Puis je le choperais par surprise, le bloquerais avec une prise de jiu-jitsu, et commencerais à discuter avec lui. Là, il me pleurerait sa détresse, et je le comprendrais du plus profond de mon âme. Finalement, c’est moi qui prendrais le fusil et on partirait ensemble à la conquête de tout le couloir. Ce serait beau.
Mais y’a rien de tout ça en vrai. Le truc le plus ravageur qu’il s’est passé ici, c’était un exercice d’alarme incendie. Et Braillou qui braille dans son brailloir.
« Nous créons vraiment les drames qui remplissent nos existences. »
(A l’estomac, Chuck Palahniuck)
J’arrête pas de péter sur mon siège car j’ai la chiasse. J’essaye de rester le plus discret possible, mais parfois je rate et le prout s’entend. Je dis « excusez-moi ». Personne ne répond rien. Je suis vraiment une catastrophe. Quand je suis pas là, ils doivent certainement se foutre de ma gueule à ce sujet. Je devrais avoir honte. Tuez-moi.
Germaine-Germaine est revenue et semble calmée. Peine perdue, car son téléphone sonne immédiatement. Elle regarde le numéro appelant, déblatère d’un air colérique: “t’as que ça à faire toi?”, puis décroche.
Il s’agit de DuMoisi, son autre subordonné de pièce (qu’est pas dans la même pièce qu’elle, mais ça c’est à cause d’une crise des bureaux). La pauvre, elle a toujours eu un peu de mal avec DuMoisi. Elle m’a avoué, lors d’un dialogue-thérapie, qu’il arrêtait pas de poser des questions idiotes sur des détails de pinaillage.
Moi j’aime bien quand les gens viennent me voir privativement pour dire du mal d’autres collègues. Ha haha. Je suis le Diable. Je me repaît du mal des autres. Donnez-moi votre haine. Donnez-moi votre haine que je la nourrisse. C’est moi, super faux-cul. Vous allez tous m’aimer, car je valide vos délires personnels de médisance.
Liste d’expressions rigolotes du monde corporate:
- « ASAP ». je pensais pas qu’on pouvait le dire en vrai, avec la bouche.
- « La philosophie de quelque chose », pour dire : « le but de quelque chose »
- « Tu bascules sur CUISSEAU ». oooiiiiiinnnnkkk – cla-cla-cla-cla PONK!
- « Gagner du périmètre ». lequel? (Largeur + Longueur)*2, ou 2*Pi*Rayon?
- « Baisse/montée de charge ». Tiens rajoute un condensateur, ça consommera moins.
- « Monter en compétence ». Je suis pâtissier-tanneur lvl 41. Et toi, tu joues à quoi ?
- « Après rebouclage en interne ». Ça, en Monde-Réelie, ça veut dire: « j’ai demandé à mon collègue qui s’y connait mieux que moi sur le sujet ».
- « Baisser la voilure »: non c’est pas un truc d’homosexuel. Pourtant, tout ce qui est voile… (et vapeur).
J’ai fini la relecture de ce CASTOR. Je « bascule sur autre chose ». Je dois décaler tous les numéros de tests dans un script. Je sais plus trop d’où ça sort qu’il faille que je fasse ça. Et pis j’ai plus envie de détailler mes histoires à la noix. Il est vraiment super long cette article. On va s’arrêter là.
Je reprends mon duffel-coat et sors de la pièce. Affichées sur les murs du couloir, les espèces de photos motivationnelles super moches représentant des puces électroniques et des lave-vaisselle me font des clins d’œil goguenards. Bon camarade, je leur réponds d’un hochement d’esprit, très « second degré ».
J’aurais pas pu glander une seule seconde aujourd’hui, à cause des farces de la SNCF, des chiffrages amputés et des petits travaux surprises qu’on me demande de faire à l’arrache. Ça m’énerve. Mais c’est pas le moment de s’énerver. Là je dois stresser à me demander combien de temps de retard ça va me prendre pour faire le trajet de retour.