J’ai changé de crémerie (3/3)

Suite et fin de la catharsis de mon incarnation professionnelle à Zarma.pro.

Collègue Je-Sais-Tout

Vous vous rappelez, quand vous étiez gamin, on vous parlait souvent d’un Monsieur ou d’une Madame Je-Sais-Tout ? Eh bien le Monsieur c’est lui. Je l’ai rencontré en vrai.

Inutile de décrire sa particularité comportementale, je vais vous narrer sans plus tarder ses anecdotes rigolotes.

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Je lui dit que je vais mettre mes écouteurs, car j’ai besoin de me focuser sur du code. Du coup, il me demande ce que j’aime comme musique.

Cette question m’a toujours embêté. D’un côté il y a les mélomanes intégristes, qui connaissent exactement tous les sous-genres de ce qu’ils apprécient et qui sont capables de vous sortir des phrases comme « Hannnn, mais n’importe quoi ! C’est pas du trash-metal que t’écoutes, c’est du grindcore, ça n’a riiiiieeeeen à voir ! ». De l’autre côté il y a moi.

Lorsque j’écoute une musique, je sais dire si je l’aime ou pas. Je sais dire quelle type générique de son ou de mélodie j’aime entendre, même si, lorsque je l’écris, ça donne pas grand-chose :

J’aime la musique qui fait ‘rotototototom’ avec des ‘wobwobwob’. Et si en fond il y a un petit ‘pala-lala-pam’, je kiffe taquet grave.

Mais j’ai toujours été incapable de donner le genre précis de la musique qui me plaît. Je crois que j’aime la dub. Il est possible que je me fourvoie sur ce qu’est réellement ‘la dub’ et qu’en réalité ce que j’aime soit du dubstep, du trip-hop ou juste de l’électro. J’en sais rien. D’ailleurs faudrait que je planche sur le sujet, car ça me pose problème lorsque je cherche des nouvelles choses à écouter sur internet.

J’explique à Collègue Je-Sais-Tout mon ignorance des genres musicaux. Il me demande s’il peut écouter. Je lui prête les oreillettes. 10 secondes plus tard, il me sort tout fier : « c’est de la world techno ».

Ah ouais d’accord. Je me disais aussi. Heureusement qu’il est là pour m’apprendre des trucs.

Je n’ai aucune idée de ce qu’est la ‘world techno’, il est tout à fait possible que ce soit réellement ça que j’écoute. Mais ce dont je suis sûr, c’est qu’il ne connait rien à ce domaine de la musique. Lui il écoute du rock. C’est très bien le rock, il s’y connait sûrement à fond. Mais mon embryon de connaissance mélomanique me permet quand même de savoir que le rock n’a pas grand chose à voir avec le/la dub/trip-hop/electro/world-techno. Il serait donc gentil de la boucler.

En plus, ce boulet écoutait de la radio main-stream gavée de pub, genre RTL2. Il pourrissait sonoriquement notre burlingue avec. Du main-stream en streaming, ha ha ha.

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World ? Techno ?

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Il me dit de trier régulièrement mes mails et de les classer comme il faut dans des répertoires. Je lui explique que ça prend vachement de temps, que pour retrouver un mail c’est plus simple et plus rapide de faire une recherche. Ce à quoi il a répondu : « Trier, c’est important. Ça permet de mieux s’y retrouver. Force-toi à le faire ».

Un rangement sous forme d’arborescence de répertoires, que ce soit pour des mails ou autre chose, ça finit très souvent par des incohérences ou des impossibilités. On se dit qu’on y arrivera car on est beau et pailleté, qu’on tombera pas dans les pièges stupides où d’autres sont tombés. On crée vaillamment un répertoire par client, dans lequel on met un répertoire par projet, ou vice-versa. Tout est beau et propre. Et puis un beau jour, un projet est vendu à plusieurs clients, ou un client envoie un mail récapitulant les points en cours sur plusieurs projets, et tout foire.

L’idéal c’est un système de tags, ça permet des relations de type n-n. Sauf que ça prend tout autant de temps, sinon plus, que de ranger par répertoire, et ça reste moins pratique que de faire des simples recherches de mots.

Du coup je m’étais fait un répertoire ‘à ranger’. Quand Je-Sais-Tout constatait un trop-plein de mails dans ma boîte de réception et qu’il me demandait de les trier, je mettais tout en vrac dedans. Il y avait une jolie arborescence bidon juste à côté, pour faire genre. Hop, ni vu ni connu je t’embrouille.

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Dans mon dernier article, j’ai raconté l’épisode le plus merdique vécu à Zarma.pro. Voici maintenant l’un des plus stressants. Ça s’est passé lors d’une grosse démo, d’un logiciel que nous appellerons ‘Chabraque’. Aaaaah, les démos ! Tout le monde aime les démos.

La veille, on prépare tout bien comme il faut. (‘La veille’ ≠ ‘Complètement à l’arrache’. Je nous serais considéré à l’arrache uniquement si on avait préparé le jour même). Collègue Je-Sais-Tout installe Chabraque sur un mini-ordinateur. C’était pas une tablette ni un ultra-portable, mais un machin bizarre avec une poignée, un peu comme un jerrycan. (À Zarma.pro, on se retrouvait très souvent avec une palanquée de matos bizarre, j’ai jamais su pourquoi).

Collègue SuperCommercial vient vérifier que tout est prêt. Il demande si ce machin à poignée pourra afficher la démo sur le grand écran prévu à cet effet. Je-Sais-Tout répond : « Oui, pas de souci. Regarde, ça c’est une prise écran. Je brancherai ce câble dessus, et tac-tac-boum ! C’est exactement comme ton ordinateur qui a deux écrans. Tout pareil, mec. Tout pareil ! »

Collègue SuperCommercial redemande si c’est vraiment sûr que ça marchera. Je-Sais-Tout confirme.

Le lendemain, on arrive sur place, on tente de brancher. Epic fail ! La prise du machin à poignée n’était pas du VGA (pour les écrans) mais du série (pour un peu n’importe quoi, surtout des vieux appareils, mais certainement pas des écrans).

Panique totale. Il nous restait deux heures pour préparer, sauf qu’on ne pouvait pas retourner à la boîte et qu’on n’avait pas d’autre matos adapté. On a poireauté-stressé en attendant que Collègue SuperCommercial arrive avec son PC portable normal et sans poignée, on a tout installé dessus à l’arrache, ça a merdé à cause du middleware tantrique de merde (la foirure déjà mentionnée dans mes articles précédents) et finalement on a installé Modeli-Morvax 1.0 encore plus à l’arrache. Pour la démo, on ne s’en est pas trop mal tiré : on en a déroulé un bout sur le Chabraque du machin à poignée qu’on faisait passer parmi les gens et l’autre bout sur Modeli-Morvax.

On s’est bien évidemment fait engueuler par tous les chefs, comme quoi qu’on testait jamais rien jusqu’au bout et qu’on balarguait toujours tout en direct-live comme les dangereux gougnaffiers du chaos qu’on était.

Soyons clair, on méritait de se faire engueuler, on avait effectivement fait une connerie.

Soyons clair, je jette pas la pierre à Je-Sais-Tout pour cette bourde. Les prises séries et VGA, ça a tendance à se ressembler.

 

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port série (pour vieux trucs)

port VGA (vidéo)

port VGA (pour écrans)

Soyons clair, je suis aussi fautif que lui. La veille, j’avais tout le temps de vérifier le branchement ou d’insister auprès de Je-Sais-Tout pour qu’il vérifie jusqu’au bout. Je n’ai rien fait de ces actions. On aurait pu se rendre compte plus tôt que les prises faisaient pas papa-maman, ce qui nous aurait permis de régler le problème au calme.

Le problème n’est pas là. Le problème, c’est ce qu’a ensuite raconté Je-Sais-Tout à d’autres collègues. Il s’est plaint qu’on s’était fait engueuler, dans les termes suivants : « C’était pas la bonne prise. Pas de bol. Par contre, on s’est fait pouuuuuurriiiiiiiiiiiir ! ».

Non. Pas : ‘pas de bol’. C’est pas de la malchance, andouille. C’était de NOTRE FAUTE. Tu seras bien gentil de pas la ramener et d’occulter cet épisode de ta vie, afin qu’il soit progressivement oublié par le reste du monde. Parce qu’en rappelant une connerie qu’on a faite et en insistant lourdement dessus, tu jettes quelques tonnes de discrédit sur toi-même et accessoirement sur moi aussi. Donc ta gueule, Je-Sais-Tout. Tu fermes simplement ta gueule.

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Pour notre fameux produit Modeli-Morvax, il a fait un premier document de spec globales listant les fonctions à implémenter ainsi qu’un planning prévisionnel, à l’aide d’un logiciel de gestion de projet (je ne sais plus lequel).

Puis on a oublié qu’il avait fait tout ça. Il a refait la liste des fonctions et le planning, avec un autre logiciel de gestion de projet.

Et je me demande même si ça ne s’est pas répété une troisième fois.

Ça m’a toujours fait beaucoup rire les logiciels de gestion de projets. J’ai jamais vraiment compris ce qu’ils étaient censés faire, de plus ils sont tous payants.

Tout ce que je sais, c’est qu’à la fin, ça te chie un diagramme de Gantt, que Je-Sais-Tout était super content d’avoir. Chaque tâche était conditionnée à la réalisation de la tâche précédente, du coup le diagramme était une simple ligne descendante. Ça valait pas le coup de perdre du temps ni de la vie pour ça, on aurait pu tout lister vite fait dans un fichier texte.

Je pense qu’il aurait dû ajouter la tâche « remplir le diagramme de Gantt » dans son diagramme de Gantt.

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Un jour, Je-Sais-Tout s’est mis en tête de recenser les menus et fenêtres de ce toujours aussi fameux Modeli-Morvax. Il voulait les mettre dans un espèce de diagramme de pas-Gantt, en représentant les liens entre eux. C’est fort louable, surtout qu’on commençait à avoir pas mal d’éléments, et ça aurait pu faire un joli schéma à intégrer dans le manuel utilisateur.

Ce taré a fait trouzemille screenshots, les a imprimés et les a placés sur un grand poster. Je lui ai suggéré : « Euh… ce serait pas mieux de le faire en employant, tu sais, l’informatique ? À l’aide d’un, wouhou, logiciel, genre Visio, Powerpoint, ou même Paint, il est possible de créer des objets virtuels multimédias directement dans le cyberespace. C’est formid’ ! ».

Il m’a répondu par cet argument imparable : « on voit mieux quand c’est en grand sur du papier ». Bien sûr, suis-je bête.

Son atelier ‘découpage & collage’ a duré tout un après-midi. On avait décidé que la majorité de l’interface de Modeli-Morvax serait sur fond noir geeko-classe. Sur un écran, ça rend bien, mais dans le monde réel, c’est relativement crapouillou. Ses feuilles étaient devenues de véritables éponges gorgées de plusieurs gigalitres d’encre, ce qui l’a obligé a utiliser du papier plus épais et de qualité supérieure. La cartouche de noir était aussi vidée qu’un pitbull pédophile dans un jardin d’enfants. Bref, un concentré de gaspillage de temps et d’argent assez impressionnant.

Pour parachever l’absurdité de son œuvre, il avait tout assemblé à l’arrache avec des bouts de scotch claqués à la hussarde porcasse. Comme quoi : « en grand et sur du papier », on voit mieux que ça a été fait dégueulassement.

Quelques mois plus tard, on est passé à la version 2 de Modeli-Morvax. L’interface n’avait plus rien à voir. Son monstre de papier collant et dégoulinant a été mis à la benne. Une bien triste fin.

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Oh, et il y a eu la fois où Collèguette MesCouilles présentait son nouveau projet à toute la Te-boî. Elle a dit une phrase genre « concrètement, ça nous offre le challenge de devoir littéralement faire des cascades avec des requins », quelqu’un de quelconque a renchéri d’une blague du style : « attention, te fais pas mal, lol ! ». MesCouilles a alors répondu : « certes, mais on aura une bonne mutuelle ».

(Expliqué de cette manière, ça a l’air débile. Mais dans le contexte, ça se tenait).

Je-Sais-Tout, qui était assis à côté de moi, m’a discrètement soufflé à l’oreille : « c’est très habile, comme réponse ».

Il faut reconnaître que c’était effectivement semi-habile. Ces derniers mois, on était en pleine discussion sur le choix de la mutuelle qui allait devenir obligatoire et que les patrons allaient devoir payer à leurs ouvriers (ha ha ha ! pwnz ! ). Il est étrange que les entreprises doivent s’occuper de considérations relatives à la santé, mais c’est un sujet totalement autre, que nous n’aborderons pas ici. MesCouilles suggérait donc subtilement aux patrons qu’ils avaient intérêt à faire péter une mutuelle digne de ce nom.

Je-Sais-Tout avait donc raison en m’annonçant que c’était ‘très habile’. Et c’est cool. Sauf que c’est un peu du Captain Obvious. Et donc moi, en tant que personne un minimum au courant du monde physique à ma proximité, j’aurais dû approuver Je-Sais-Tout, afin de montrer que j’avais moi aussi repéré la très-habileté du propos.

Malheureusement, j’étais occupé à mesurer l’amplitude des mouvements de seins de Collèguette MesCouilles lorsqu’elle se déplaçait du côté droit de l’écran géant à PowerPoint vers le côté gauche de l’écran géant à PowerPoint. Du coup, j’avais pas repéré le Captain Obvious. Tout ce que j’ai trouvé à répondre à Je-Sais-Tout, c’est : « Ah bon ? ». Il m’a alors regardé d’un air malicieux.

Il a cru que je n’étais pas assez subtil dans ma tête pour repérer l’habileté de Colléguette MesCouilles. Je me suis alors dit : « Merde, il pense que j’ai vraiment besoin de lui pour comprendre les réalités de la vie, il va se déchaîner en continu à me sortir des brouettées de Captain Obvious ».

L’avenir montra qu’il n’a pas sorti plus de Captain Obvious que ce qu’il aurait pu sortir s’il m’avait pris pour un mec intelligent et pas accro aux nichons. Donc finalement tout va bien. C’est l’intérêt des gens qui sont dans leur petit monde de Je-Sais-Tout-itude. Tu peux faire n’importe quoi à côté d’eux, ils se comporteront toujours de la même manière.

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Pour les loisirs et les discussions hors travail, Je-Sais-Tout se la pétait également.

Il a découvert Battle for Wesnoth, un jeu de stratégie tour par tour bien sympa. Tout fier, il m’explique qu’il emploie une ‘stratégie par annihilation complète’. La façon dont il m’a énoncé cette vérité montrait bien qu’il pensait avoir inventé un concept totalement inédit. J’ai bien senti qu’il se gargarisait d’avance de me l’expliquer afin d’étaler sa science et me tartiner son génie jusque dans les parois internes de ma boîte crânienne.

Sa ‘stratégie par annihilation complète’ consiste à conserver provisoirement le dernier bâtiment d’une base ennemie. La partie n’est pas immédiatement gagnée, ce qui permet d’explorer toute la map et d’éliminer les unités hostiles restantes. La plupart des joueurs font ça. Et ceux qui ne le font pas ont au moins eu l’idée de le faire.

Ensuite, il m’a expliqué que juste avant l’attaque d’un de ces personnages, il sauvegardait et rechargeait sa partie tant que 100% des coups n’avaient pas touchés. Là encore, il était tout fou-fou de m’apprendre ça.

Je profite de l’occasion pour vous apprendre un mot de vocabulaire, tout en ayant l’humilité d’envisager la possibilité que vous le connaissiez déjà. Cette technique de sauvegarde-rechargement se nomme ‘save scumming’. Et donc, si ça porte un nom, c’est forcément que d’autres personnes y ont pensé avant ce cher Je-Sais-Tout.

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Il m’a également fait une ‘Star What’, ce qui est assez peu étonnant venant de lui. Il s’agit d’un acte assez fréquent, même les quotidiens les plus sérieux s’y amusent (http:// www. legorafi.fr/2015/12/15/le-gorafi-a-vu-pour-vous-star-wars-le-reveil-de-la-force/).

Vous ne savez pas ce qu’est une Star What ? Attendez, je vous la fais :

« Star Wars n’est pas un film réaliste, car en vrai il n’y a pas de sons dans l’espace. »

Les gens qui commettent des Star Whats, j’ai envie de les cogner. Bande d’abrutis ! Des rayons lasers qui s’arrêtent au bout de 40 centimètres, c’est réaliste ? Et un robot à roulettes qui se déplace dans du sable sans se vautrer lamentablement ? Et la créature aux gros doigts poilus qui ne se trompe jamais lorsqu’elle appuie sur les tout petits boutons du tableau de bord d’un vaisseau spatial ? (Vaisseau spatial que le propriétaire doit certainement traiter toutes les deux semaines contre les poux et les parasites vu la touffasse de poils du sus-mentionné machin).

Je vous laisse vous renseigner sur la notion de ‘suspension consentie de l’incrédulité’.

Le seul truc ‘incohérent’ (et non pas ‘irréaliste’) que je vois dans Star Wars, c’est Jar Jar Binks ayant réussi à atteindre l’âge adulte sans que personne ne l’ait préalablement massacré d’agacement. Il ne semble pas y avoir plus de sons dans l’espace que de darwinisme chez les Jar-jar-binkiens (j’emmerde le type dans le fond qui vient de piailler que ce sont des Gungans).

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Comme vous le savez (ou pas, mais osef), j’utilise la disposition de clavier Dvorak-bépo (https:// bepo. fr/wiki/Accueil). J’en ai chié des briques au début, puis je me suis senti suffisamment en confiance pour l’installer sur le PC du boulot.

J’en ai fait part à différents collègues, principalement pour me la péter mais aussi pour tenter de les convertir. (L’un d’eux s’y est essayé, ça m’a fait plaisir).

Je-Sais-Tout, pour qui toute idée ne venant pas de lui-même est systématiquement de la merde en branche, m’a très sérieusement expliqué que j’allais me retrouver dans la même situation que les gauchers. Ces pauvres gens ingâtés par la nature doivent continuellement switcher leur cerveau, selon qu’ils utilisent des objets génériques à préférence droitière ou des objets spécifiques à préférence gauchère. Je subis le même désagrément lorsque je passe momentanément sur un clavier azerty ‘normal’.

Ce switching est la raison pour laquelle les gauchers ont une espérance de vie un peu plus courte (leur cerveau et leurs muscles s’usent plus vite). Comme eux, je risque de mourir plus tôt.

Woaouw.

C’est bien connu : les bilingues, les gens utilisant plusieurs véhicules, les bisexuels et les bi-biphoques meurent tous prématurément.

J’ai lu quelque part que l’espérance de vie des gauchers semble statistiquement plus courte car les ‘gauchers seniors’ ne sont pas enregistrés comme tel. Il y a quelques dizaines d’années, on forçait tout le monde à utiliser sa main droite, et des gens qui auraient du être gaucher ont fini droitier ou gaucher contrarié. Il faut donc attendre encore une génération ou deux pour avoir des données fiables sur cette caractéristique.

Et même si les prédictions divinatoires de Je-Sais-Tout se révélaient exactes, je préfère mourir un peu plus tôt que vivre rongé par le regret permanent de ne pas avoir eu le courage de passer au clavier Dvorak-bépo. J’ai gagné la petite satisfaction personnelle d’avoir réussi à changer une habitude qui m’a été imposée par la masse populaire. Utiliser le Dvorak-bépo vous rend hype.

Lorsque je fais découvrir cette disposition de clavier à d’autres personnes, la plupart ne sont pas intéressées, trouvent ça bizarre ou estiment que c’est une perte de temps. C’est là ou Je-Sais-Tout est plus fort que les autres : il considère tellement que c’est une idée de merde qu’il tente de m’en sauver en me disant qu’elle va me faire vieillir prématurément. C’est une sorte d’égocentrique altruiste. Je ne savais même pas que c’était possible.

Attention, c'est une arme de vieillissement prématuré massif !

Attention, c’est une arme de vieillissement prématuré massif !

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Un jour, je lui ai dit comme ça : « C’est bizarre, à chaque fois que je prends une douche, j’ai soif juste après. »

Il m’a répondu : « Oui. L’eau, ça assèche. »

Du coup, je reste beaucoup moins de temps sous la douche, de peur de finir déshydraté.

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Lorsqu’il a appris la manière dont j’ai trouvé mon nouvel emploi (une candidature spontanée qui a mariné pendant un an avant de réapparaître), il a proféré d’une voix collégiale : « tu as pris un risque énoooooorme ».

Il voulait dire que cette candidature aurait pu ne pas aboutir, tout en parvenant malgré tout aux oreilles de Zarma.pro. Ça ne m’aurait pas mis en situation avantageuse : les divers chefs et collègues auraient été en droit de me le reprocher.

Je ne vois pas où est le problème. J’en avais vraiment marre de Zarma.pro (pour avoir le détail, lire mes articles précédents). J’essayais de faire ressentir cette marritude à mes chefs tout en leur empêchant d’y opposer du bullshit de type : « tu n’es qu’un gamin pleurnichard. Fais des efforts et on trouvera le moyen de te récompenser. Blabla implication blabla engagement blabla proactif. ».

Qu’ils apprennent d’une manière détournée que j’en ai ma claque au point de vouloir me barrer, ça me semblait être un signal d’alerte acceptable. Je m’en suis également servi pour m’aider à préserver ma santé mentale : je m’accrochais à ces petites lueurs d’espoir, ces candidatures spontanées que je lançais de ci de là, telles des bouteilles à la mer. ♫ ♪ ♬ Pris dans leur vaisseau de verre, les messages luttent, na na la la la la-la la, nia nia nia nia sur les rocheeeeeeeeeers ♪ ♫

De toutes façons, les chefs auraient fait quoi en ‘représailles’ ? Bloquer mes augmentations de salaire ? Me donner des tâches que j’aime pas tel que des maintenances client, au lieu de me laisser m’auto-kiffer sur du développement ? Me stresser à tel point que je me sente obligé de faire des heures sup’ d’esclaves sans même qu’ils aient besoin de me le demander explicitement ? Me dire en continu pendant plusieurs années que c’est pas le bon moment pour prendre des vacances ? Me retirer les projets que j’aime pour les jeter en pâture à Drache-Code qui les a gloubiboulgatisés ?

Ah non, c’est bon. Ils ont déjà fait tout ça. Du coup il n’y avait plus de représailles possibles.

Je soupçonne Je-Sais-Tout d’être un peu jaloux. Lui aussi aurait peut-être aimé partir de Zarma.pro. Là, il s’aperçoit qu’il avait une chance de le faire, mais elle lui est passée sous le nez. Alors il essaye de s’auto-rassurer en se disant qu’il n’aurait pas pu la saisir, car ça aurait impliqué qu’il prenne ‘un risque énoooooorme’. Peut-être qu’il est triste dans son coin et que pour minimiser cette tristesse, il se dit qu’il n’y pouvait rien, car il a choisi la sécurité pour sa vie professionnelle et familiale.

Honnêtement, je ne crois même pas que je puisse me vanter d’avoir pris un risque. Je ne pense pas être quelqu’un de vraiment courageux, en particulier pour tout ce qui concerne le Travail. Faire des candidatures spontanées, ce n’est pas un truc de ouf. Faut arrêter la parano.

Paranoia

D’autres gens

J’avais vraiment besoin de me lâcher sur mes chefs et quelques collègues en particulier. Ceci étant fait, il reste des personnes sur qui j’ai une quantité honorable de bêtises à dire. Je vous met tout en vrac.

Colléguette Dièse-effe-huit-effe

L’une des secrétaires. Elle s’appelle ainsi rapport à sa couleur préférée.

J’étais son délégué suppléant. Oui, figurez-vous que suite à un concours de circonstances un peu long à raconter et totalement inintéressant, j’ai été élu délégué du personnel et faisais partie du comité d’entreprise. Je l’ai techniquement souhaité, et je me suis dit que ce serait l’occasion de faire des trucs cools.

L’ensemble des délégués a accompli une foule de choses : organiser des repas de Noël, négocier cette fameuse mutuelle d’entreprise, reprendre les calculs d’indemnisation des déplacements, etc. Mais je n’ai personnellement servi à rien dans toutes ces réalisations.

J’assistais aux réunions et notais les phrases rigolotes de chacun pour me donner une contenance. C’est tout. Concernant les actions concrètes, je ne savais jamais par où commencer, et n’osais pas demander de peur de passer pour encore plus débile que je ne l’étais. Mon absolue inutilité a certainement fini par se voir, mais personne n’a eu la cavaliéritude de me le dire.

J’espère que Dièse-effe-huit-effe n’a pas été trop embêtée d’avoir eu un suppléant aussi plante-vertesque. Elle ne méritait pas ça, c’était une nana cool.

Cette expérience m’a apporté deux choses :

  • Si on me demande de refaire délégué du personnel, je pourrais répondre, sans éprouver la moindre culpabilité : « non merci, j’ai déjà fait, je ne me suis pas trouvé très compétent ».
  • J’ai décidé que je ne dénigrerai jamais le travail effectué par d’autres délégués du personnel. Je leur demanderai des choses en cas de besoin, mais je ne dirai jamais qu’ils font de la merde ou qu’ils branlent rien.
Le repas de Noël. Mais y'avait pas Jésus.

Le repas de Noël. Mais y’avait pas Jésus.

Colléguette Maryse-Gâteau

Une autre secrétaire.

Je n’ai pas bien compris pourquoi tout le monde la portait aux nues. Elle travaillait beaucoup, sérieusement et bien, mais beaucoup d’autres gens dans la boîte faisaient montre de la même abnégation sans qu’on chante leurs louanges (oui, je m’inclus dedans). Est-ce que c’est parce qu’elle avait ‘un certain âge’ ? Je ne sais pas.

Le fait que tout le monde la portait aux nues lui donnait le droit implicite d’être exigeante envers les autres, ce qui m’a valu un moment merdique de plus.

Je suis dans le bureau-open-space en compagnie d’un stagiaire. Collègue Eurod’ était présent le matin mais était ensuite parti en déplacement. Je suis donc le seul à pouvoir répondre au téléphone. Celui-ci sonne. Un client avec un problème urgent. Il me blablate ses symptômes, je prends le contrôle de son PC par TeamViewer et commence à dépatouiller son bronx.

Le téléphone re-sonne. Un autre client avec un autre problème. Il me précise que c’est ‘urgent urgent urgent’, soit deux ‘urgents’ de plus que le client précédent. Je décide donc de m’en occuper tout de suite. (Je m’étais établi mon propre système de hiérarchisation des tâches, suite aux non-définitions de priorités par Chef Random). Blablatage symptôme, TeamViewer, débronxage en cours.

Le téléphone de Collègue Eurod’ sonne. Un client jean-foutre qui veut qu’on lui renvoie son contrat de maintenance, parce qu’il ne parvient plus à le retrouver dans son bordel. C’est une tâche administrative, j’estime donc que ce n’est pas à moi de la faire, d’autant plus que je ne sais même pas où trouver ce papier à la con. Je lui dit de voir ça avec notre secrétaire et lui donne le numéro à appeler. Normalement on ne doit pas faire comme ça, on doit transférer l’appel. Mais je ne suis jamais sûr d’y parvenir avec ces téléphones auxquels je ne comprends rien et je voulais me débarrasser très vite de ce clampin car j’étais toujours au téléphone avec le client urgent urgent urgent.

Le téléphone de Collègue Eurod’ re-sonne. C’est Maryse-Gâteau pour me dire qu’elle vient d’avoir un client à la con requérant son contrat de maintenance à la con. Je lui dit que je suis au courant et que c’est moi qui l’ai refilé à Dièse-Effe-Huit-Effe. Mais cette dernière n’était pas à son bureau, c’est donc Maryse-Gâteau qui a pris l’appel. Cette dernière-dernière voulait avoir Collègue Eurod’ pour qu’il lui donne ce putain de contrat. Mais ce dernier n’était plus là. Mais elle ne s’en est pas rendu compte puisqu’elle l’avait vu le matin. Elle me dit : « Tu peux pas lui donner toi-même, ce contrat de maintenance ? ». Je dit que non, parce que je sais pas où il est. Elle rétorque « Ah bah voilà, si personne n’y met pas un peu du sien », puis elle raccroche.

5 minutes plus tard, Maryse-Gâteau débarque dans mon burlingue-open-space, ouvre un placard, en sort un classeur à paperasse, le referme en faisant « blong » bien fort et repart en clac-claquant des talons.

Je dis à mon client en cours que j’ai un petit truc urgent urgent urgent urgent à faire et que je le reprendrai dans quelques minutes. Je vais voir Maryse-Gâteau. Elle s’était construit un superbe regard lourdement armé de reproches. Je me confonds en excuses. Elle m’engueule comme quoi on est passé pour des imbéciles auprès du client qui a dû appeler plusieurs numéros à la suite, que j’aurais dû transférer l’appel ce qui m’aurait permis d’expliquer préalablement la situation.

Elle avait raison, mais j’estime que je ne méritais pas de me faire engueuler à ce point là. Je ne lui ai même pas dit que j’avais deux maintenances simultanées en cours. D’une part j’ai pas osé parce que ça risquait de la foutre encore plus en colère que je me permette de lui parler de MES problèmes de Travail, d’autre part elle m’a pas laissé en placer une et d’autre-autre part j’entrais dans la période où je commençais à en avoir plus rien à foutre de cette boîte.

Quelques semaines plus tard, je fais mon entretien quadri-annuel d’évaluation avec Chef Random. Il mentionne cette désastreuse histoire et fournit son avis personnel, à savoir que j’avais vraiment merdé. Ce gros nul avait tout suivi depuis son bureau juste à côté, il s’en servait pour me pourrir non-subtilement. Quand je vous disais que ce mec était un tocard social.

Lorsqu’elle devait s’absenter, Maryse-Gâteau me demandait parfois si elle pouvait rediriger son téléphone vers le mien. J’avais alors la charge de secrétaire. J’étais un tout petit peu fier qu’elle me confie cette tâche. Étrangement, elle ne me l’a plus jamais demandé ensuite. À vrai dire ça m’arrangeait. Je suis nul en secrétaire, j’ai une voix de benêt au téléphone et je fais des « euuuuh » d’adolescent de 13 ans.

Avant que tout cela n’arrive, il m’était arrivé une fois de rêver d’elle. Un rêve bizarre, mais tout public. Elle s’était monté un stand en plein milieu d’un immeuble en construction, avec une porte posée sur des tréteaux, et elle vendait des gâteaux. Les ouvriers passaient à côté d’elle sans vraiment y faire attention, mais elle gardait le sourire et l’espoir.

C’était mignon comme rêve et ça collait super bien à sa personnalité et ses hobbies. Je me suis dit que j’aurais pu lui raconter, à l’occasion, durant une pause café. Ça l’aurait fait rire. Je ne l’ai pas fait parce que raconter ses rêves relève d’une ouverture à l’autre assez intime. Elle aurait peut-être été gênée que je lui dévoile quelque chose d’aussi personnel. Finalement, j’ai bien fait d’avoir gardé ça pour moi.

Oui, c'est un gâteau. En forme de téléphone.

Oui, c’est un gâteau. En forme de téléphone.

Un jour, Collègue Tourbator avait lancé un concours de pâtisserie. Tous les mardis, quelqu’un apportait un gâteau fait maison. On le mangeait pendant la pause, on donnait des notes et le gagnant recevait je-sais-plus-quoi. J’avais participé avec un gâteau-minecraft qui me valut de ne pas terminer dernier, j’étais assez content de moi.

Maryse-Gâteau a remporté la palme avec des ultimo-tartelettes vraiment délicieuses. Est-ce qu’elle méritait vraiment de gagner ou est-ce que des gens lui ont hypocritement donné une très bonne note parce qu’ils la portent aux nues ? Je ne sais pas.

Une autre fois, elle a envoyé un mail pour signaler qu’un outil mis en place par Collègue SuperFlamby ne lui convenait pas. Elle avait raison, le bidule l’obligeait à faire une double saisie. Hou que c’est vilain les doubles saisies ! Personne n’aime ça.

Sauf qu’elle a envoyé ce mail à tout le monde au lieu de le limiter à SuperFlamby. On ne crie pas intempestivement à la face du monde ses râleries professio-personnelles, c’est donc une faute qui aurait pu lui être reprochée. J’ose espérer que MegaChef Storitel s’en est chargé, c’est quand même le rôle d’un chef d’effectuer ce genre de recadrage. Mais parmi les collègues de même rang professionnel : bernique. Je n’ai eu vent d’aucune remarque qui lui aurait été faite. Alors que par ailleurs, divers déblaterrages sur diverses personnes s’échouaient dans mes récepteurs auditifs et visuels.

Une autre-autre fois, elle a traversé notre burlingue-open-space en se faisant la plus discrète possible tout en nous montrant qu’elle voulait être discrète. Je lui demande : « Tout va bien, Maryse-Gâteau ? ». Elle nous explique qu’elle venait de déblaterrer sur une technicienne-Cliente, la traitant de conne et autres noms d’oiseaux, et qu’ensuite elle s’était aperçue que cette personne attendait dans le couloir juste à côté. C’est pourquoi elle avait préféré s’éclipser discrètement par un chemin détourné.

C’est vrai que pourrir un Client alors qu’il y a un risque qu’il entende tout, c’est vachement moins grave que de le balader d’un numéro de téléphone à un autre. Mais là encore, personne n’est allé lui reprocher son erreur, alors que je n’étais pas seul dans le burlingue lorsqu’elle est passée.

Tout ça pour dire que je n’étais vraiment pas à l’aise avec Colléguette Maryse-Gâteau. J’avais l’impression d’être le seul sur Terre à m’apercevoir qu’elle faisait parfois des bêtises (comme tout humain normalement constitué) tandis que le reste du monde la portait aux nues et la trouvait constituée à 100% d’awesomeness professionel.

Maryse-Gâteau en stealth mode.

Maryse-Gâteau passant dans le burlingue en stealth mode.

Collègue SuperFlamby

C’était pas tout à fait un ‘collègue’, il était également chef d’un ensemble de bazar technique. Mais osef.

À chaque fois qu’il devait trancher, il choisissait la solution intermédiaire, d’où sa flambitude. Il utilisait des mots et des expressions pas très viril : « banette », « en regard de », « douchette », « lever un flag d’alerte » (en faisant le geste d’un petit drapeau qui se lève), …

Les scientifiques fous, dont j’ai parlé précédemment, avaient commandé un audit pour la conception de leur fameux logiciel d’analyse d’acariens. SuperFlamby avait rédigé un rapport assez bien ficelé, qui faisait office de document de spécification.

Ce rapport contenait plusieurs ‘stories’, des petites descriptions courtes racontant une utilisation particulière d’une fonctionnalité du logiciel. Il avait donc défini plusieurs profils d’utilisateurs, en attribuant un prénom à chacun, comme si c’était des gens du monde réel.

Je ne savais pas qu’on pouvait rédiger un document de spécification de cette manière. Ça aboutit à quelque chose de peu viril dans sa formulation, mais assez clair et bien présenté.

Par contre, là où il a complètement merdé, c’est au moment de baptiser les profils. Il y avait une « Renata ». WTF ? Même en Afrique post-colonialiste personne ne s’appelle comme ça !

C’était peut-être un clin d’œil scientifique à cette personne, ou celle-là (https:// en.wikipedia.org/wiki/Renata_Kallosh, https:// fr.wikipedia.org/wiki/Renata_Briano).

Hell Yeah ! Science !

Hell Yeah ! Science !

Actionnaire Roux

Étant donné mon niveau hiérarchique, je n’ai évidemment jamais eu la possibilité de l’approcher ni de m’imprégner de son aura divine.

Mais j’ai tout de même eu la chance de le voir apparaître à une méga-réunion annuelle corporate. Il nous a dit qu’en tant qu’Actionnaire, il était « confiant » et « rafraîchi » par des réunions comme ça.

Ensuite, on est allé bâffrer gratoche au traditionnel apéro empiffratoire du midi.

Collègue Nounours

J’en ai déjà parlé ici et là.

C’était un rayon de soleil pour mes espoirs de glandage professionnels. Je le voyais soit buller, soit faire des trucs qui ne servaient à rien. Il était ma preuve secrète de la possibilité d’atteindre un jour mon nirvana personnel, à savoir : donner l’impression à tout le monde que je travaille tout en glandant comme un porc et en passant mes journées à coder des jeux vidéos et écrire des articles de blogs.

Il allait parfois démarcher des gens pour présenter nos super-logiciels. À son retour, Cheffette Gothique lui demandait comment ça s’était passé. Il se contentait de répondre « tu sais, avec ce type de clients, c’est sur du loooooooong terme. » C’est tout. Ça consistait l’intégralité de son compte-rendu de démarchage. Un rayon de soleil, vous dis-je.

Une autre fois, il s’est mis en colère parce qu’il ne retrouvait plus des papiers qu’on lui avait déplacés lors d’un de nos déménagements à moment merdique. Il nous a dit : « merde, merde, merde ET MERDE ! ». Quelques jours plus tard, il les a retrouvés. C’était très drôle.

Du looooooooong terme.

Du looooooooong terme.

Collègue KoupChou

Le responsable ‘infrastructure du monde physique’.

C’est auprès de lui que je venais pleurer ou m’excuser quand je foutais le bordel avec l’alarme du bâtiment. (Le dernier à partir devait allumer l’alarme, mais y’avait toujours une capilotade qui empêchait de le faire. Je ne peux pas vous raconter ces épisodes foireux car j’y comprenais jamais rien).

Un jour, on a été envahis par des cochonneries de petits insectes. Je ne sais pas du tout ce que c’était, on les nommera donc : ‘ploncres’.

Je vais voir Collègue KoupChou pour lui en parler. Et là, est-ce que tu sais ce qu’il me répond, lecteur ?

« Oui, c’est rigolo. Quand on shoote dans l’un d’eux, il se recroqueville sur lui même et roule comme une petite bille ! »

Je veux bien entendre qu’être responsable monde-physique soit une charge compliquée et que la quantité de tâches qui en décombe ait pour conséquence qu’on ne puisse correctement prévoir ni repousser une invasion de ploncres. Mais quand ça arrive, ce serait bien d’avoir la décence de pas faire son malin.

Je m’attendais à ce que KoupChou ait une réponse éventuellement impuissante, mais au moins humble : « on a été attaqué par surprise, j’ai pas le temps de m’en occuper maintenant ». Eh bien non. De son joyeux aplomb auto-validant, il n’éprouve aucune culpabilité à brâmer : « Bibilles ! Lol ! « .

Je vous passe les considérations d’hygiène qu’on pourrait hypothétiquement avoir quant à la prolifération de ploncres.

Ploncre rush !

Ploncre rush !

Collègue SuperCommercial

Un type un peu inquiétant. Il disait tellement que ce qu’on faisait était génial, que ça ne semblait pas naturel. Surtout que des fois on faisait quand même bien de la merde.

J’ai eu un road trip à faire avec lui. Ça a été très compliqué, mais pas pour la conversation. C’est un super-commercial, il a donc ce super-pouvoir de générer automatiquement un sujet dès qu’il y a un blanc. Le problème a été la conduite. Je suis une incommensurable quiche dès que j’ai un volant à la main. Au début ça allait, c’était de l’autoroute. Puis on est arrivé dans une ville, il a fallu regarder le GPS en même temps que conduire. Multi-drames :

  • Je me suis planté 3 fois de route (le GPS indiquait le bon chemin, mais je n’arrivais pas à analyser précisément ce qu’il me disait),
  • je me suis arrêté en plein milieu d’un embranchement sans savoir où aller,
  • mon cerveau me faisait paniquer en continu à tel point que je ne voyais plus les feux passer au vert,
  • pour se garer, SuperCommercial m’a pris le volant des mains car je ne comprenais même plus dans quel sens ça tournait quand on reculait (au reste, j’ai jamais vraiment compris le fonctionnement de ce concept extrêmement bizarre de ‘marche arrière’).

Il était totalement désespéré. Je pense qu’il avait dépassé le stade de la pitié pour atteindre une sorte d’état supérieur s’apparentant à celui d’un observateur externe étudiant un singe dans un zoo.

Je déteste conduire, c’est de la merde. Mais si je me lance dans ce sujet j’en ai encore pour 12 articles.

Un autre truc marrant avec ce monsieur, c’était son utilisation outrancière des anglicismes. Ça ne me dérange pas, ça fait partie de ses super-pouvoirs, d’ailleurs je dois certainement en utiliser moi-même sans m’en rendre compte. Là où ça devient rigolo, c’est avec le mot ‘bid’.

‘Bid’ signifie ‘offre’ ou ‘proposition’ (de vente ou d’autre chose). Dans une phrase en français, ça produit un effet assez ridicule : « on va faire un bid ! », « c’est vraiment un très gros bid », …

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Collègue NinjaBlingBling

Un mec cool. Je l’aimais bien, il avait pas peur d’ouvrir sa gueule et lâchait rien, il s’accordait donc à merveille avec des gens comme moi ayant une personnalité flambie.

Il a découvert une souris morte au milieu du couloir (c’est impressionnant la quantité de bestioles débiles qui squattait cette boîte). Il l’a jeté et a envoyé un mail de pourrissage général pour signaler qu’évidemment personne d’autres que lui n’avais fait l’effort de le faire et que donc on était tous très vilains. Sauf que son action héroïque, il l’a accomplie vers 8 heures du matin, en étant parmi les premiers arrivés. Alors oui forcément, personne n’a pu le faire avant lui.

Je me permet d’ajouter que quand j’ai décollé un cadavre de lapin mort sur le parking, je n’ai pas pourri la totalité de l’univers connu à coups de mails héroïques, ni signalé que « chacun doit nettoyer son propre caca ».

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Collègue GenerationY

J’en ai déjà parlé. Un mec bizarre.

Petite anecdote merdico-rigolote : lorsqu’il jouait à la belote à la pause de midi, il râlait et s’énervait tout seul parce qu’il n’avait jamais un bon jeu et que son partenaire du moment jouait comme un pied. J’ai fait une seule partie avec lui, ça a été un rouspéto-roumégage continu.

Maintenant que j’y pense, mon cerveau est vraiment un abruti de m’avoir mis mal à l’aise durant ces moments pouilleux où Collègue GenerationY me faisait bien sentir que j’étais un boulet. Le fait que c’était un petit enfant mauvais joueur aurais dû me donner la force de caractère pour m’immuniser contre ses influences boulettisantes.

Bref, encore un beau tocard de bonne facture.

De toutes façons j’ai jamais rien pigé à la belote. Je préfère le Perudo.

MégaChef De L’Industrie

Il est arrivé un peu de nul part. Mais sa légitimité a été automatiquement et unanimement approuvée lorsqu’on nous l’a présenté durant une grande messe corporate et qu’on nous a dit qu’il venait « de l’industrie ».

C’est sérieux l’industrie. Couillu, viril et tout. Pas comme ces petites taffiotades de logiciels qui sont des produits immatériels et qu’on ne peut donc pas physiquement bifler même en étant doté d’un énorme pénis d’industriel.

L’une des équipes de la boîte fonctionnait mal (pas Test-0-Steron, une autre). MégaChef De L’Industrie était chargé de la ‘redresser’. Il a étudié le tout, a écouté chaque personne et a donné une consigne générale :

« Messieurs les commerciaux, vendez. Vendez tout et n’importe quoi. Même des choses qui n’existent pas encore. Nous derrière, on saura vous fournir les moyens qu’il faut pour les faire exister. »

Vous la sentez venir, la cagafouillade géante ?

Les commerciaux, stressés par cette consigne, casseront les prix. Ils retourneront voir De L’Industrie, l’œil hagard et le costume débraillé, en clamant : « j’ai réussi à vendre un logiciel féérique et inexistant pour 100 euros. C’est un peu bas comme prix, mais je n’ai pas pu obtenir mieux, pourtant je me suis démené comme un beau diable ».

Ensuite, De L’Industrie dira aux ouvriers-codeurs de créer la féérie très très vite. Il ajoutera (ou pas) les « moyens qu’il faut ». Ça monopolisera trouze-mille jour-hommes et à la prochaine grande messe corporate, toute l’équipe sera pointée du doigt comme étant vilainement pas rentable.

Parce que « vendre tout ce qu’on peut » et « vendre tout ce qu’on peut en étant rentable », c’est pas la même chose. Mais si je dis ça, c’est sûrement parce que j’y connais rien en gestion d’entreprise, je viens tellement pas de l’industrie.

Ça c'est de l'industrie !

Ça c’est de l’industrie !

Collègue Moche

C’était juste un mec super moche. Ça arrive.

J’ai été choqué par le champ gravitationnel d’hypocrisie généré dans son entourage.

Aucun des autres collègues, mais absolument AUCUN, n’a mentionné son hypermocheté au détour d’une conversation quelconque. Même lorsqu’il n’était pas présent.

Ça m’a un peu inquiété. J’avais l’impression d’être le seul au monde à avoir remarqué sa pas-gueule, j’étais limite à me demander si ça faisait pas de moi un mec encore plus bizarre que je ne le pensais, ayant des critères de beauté totalement différents des autres.

Mais un jour, j’ai croisé ce collègue alors que j’étais dans un bar en compagnie de gens du pas-travail. Ils m’ont tous dit que j’avais du cran pour passer plusieurs heures par jour à moins d’un kilomètre de lui sans vomir. J’ai été rassuré.

On ne se rend pas assez compte à quel point c’est important pour sa santé mentale de côtoyer des gens qui n’hésitent pas à balancer du bon gros troll de merde.

(Ici, ne pas mettre de photo de Collègue Moche, sinon vous allez exploser).

Collègue Remplaçant

C’est donc le monsieur qui m’a remplacé lorsque je suis parti. Il était destiné à un autre morceau de la boîte, mais du coup il a été catapulté dans l’équipe Test-0-Steron.

Première rencontre avec lui, avant son embauche officielle. Cheffette Gothique lui demande : « Tu t’y connais en C# ? En karmagraphie tantrique ? En OpenGL ? ». (C’était les technos sur lesquelles je bossais).

Il répond que non, et que c’est pas ce qui l’intéresse ni ce qu’il voudrait apprendre. Cheffette est tombée des nues. La suite de la conversation a été assurée par d’autres collègues et ça a dérivé en pseudo-réunion de choix techniques sur Modeli-Morvax. Remplaçant était au milieu de tout ça, plus personne ne s’intéressait à lui (à moi non plus, mais c’était normal vu mon statut de lâcheur officiel en période de préavis de démission).

Le lendemain, Cheffette Gothique annonce à toute l’équipe que Chef «  » l’a appelée pour nous pourrir intégralement tous. Collègue Remplaçant était allé se plaindre qu’on l’avait mal accueilli et qu’il aurait du mal à s’intégrer, car on lui avait dit qu’il devait maîtriser des technologies ne faisant pas partie de ses intérêts.

Je ne peux pas savoir si Collègue Remplaçant a réellement pleuré dans les jupes de Chef «  », ou s’il a juste émis quelques remarques que Chef «  » a pris pour du pleurage de jupe. Personnellement je pencherais pour la deuxième option. Dans tous les cas, le premier contact entre Collègue Remplaçant et l’équipe Test-0-Steron a vraiment été supragénial et annonciateur d’auspices les plus suprameilleurs.

Les auspices girls ?

Les auspices girls ?

Des conneries que j’ai faites

Ayant bien déblaterré sur les déblaterrages de mes collègues et chefs, je me dois de rétablir un minimum d’équilibre dans l’univers global. Voici donc la liste de mes conneries. Je ne vais pas trop détailler car je ne suis vraiment pas fier de ces actes. Si vous ne comprenez pas de quoi je parle, ce n’est pas grave, passez à la suite. (Ce conseil s’applique également à l’ensemble de mon blog, voire à l’univers global).

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Je devais installer sur le poste d’un client le middleware tantrique de merde dont j’ai déjà parlé maintes et maintes fois. Comme toujours, cette action n’était pas censée prendre plus d’un quart d’heure. Comme toujours, y’a eu une merde. L’installation ne marchait pas, sans que je sois capable de déterminer pourquoi. J’en ai eu marre et j’ai dit au client qu’il y avait qu’à copier les fichiers du middleware. Ce que j’ai fait, en prenant ceux que j’avais sur mon poste. Ça a fonctionné, je suis passé à autre chose. Ensuite, le client à recopié ces mêmes fichiers sur une dizaine d’autres de ses postes, ce qui n’était pas déconnant puisque je lui avais dit que ça passait crème.

3 mois plus tard, tout a pété chez eux. La copie des fichiers avait embarqué notre clé de licence. Or il s’agissait, non pas d’une clé client, mais d’une clé partenaire, qui doit être renouvelée tous les ans.

C’est Collègue Drache-Code qui a dû réparer un par un tous les postes. Force est de reconnaître que cette fois-ci il a fait quelque chose de bien. Mais il était pas jouasse. Il a dit à la cantonnade de l’équipe : « j’en ai marre de nettoyer les merdes de tout le monde ». Je me suis confondu en excuses.

Oups... Boulette.

Oups… Boulette.

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Y’a aussi l’histoire de Machin, un mec d’une société partenaire qui a dit à Chef Random qu’il passerait peut-être nous voir (on savait pas trop dans quel but). Après moultes tergiversations, il a envoyé un mail pour demander : « finalement, je me radine ou bien ? ». Je me suis dit que des gens plus importants que moi s’occuperaient de cette relation publique, je n’ai donc pas répondu, et je n’ai pas non plus transmis.

Chef Random vient me voir et me dit : « Yo. Il est mort pendant eul’ trajet, Partenaire Machin, ou bien ? ». Et là, un doute m’habita. Je reconsulte le mail et m’aperçois que les seuls destinataires sont moi et Collègue Eurod’ (qui était en congés). J’ai signalé ma boulette à Chef Random, mais c’était trop tard. L’heure du rendez-vous éventuel était pas-dépassée-mais-presque. Chef Random a été obligé de s’excuser auprès de Partenaire Machin. Ensuite il m’a engueulé.

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Je suis en partie responsable de L’IHM pourrie de Modeli-Morvax v1.0. Elle était tellement pourrie qu’on ne comprenait pas toujours les effets d’un clic ou d’un glisser-déplacer, ce qui a contribué à faire dire à Chef «  » que « Modeli-Morvax, il fait n’importe quoi ».

Mais sur cette connerie, j’étais pas tout seul. Drache-Code en était l’instigateur principal.

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Ça faisait plusieurs mois que je travaillais sur GLORP, un outil de mise à jour des glorps. À chaque livraison, le client nous balançait une liste de bugs. (Au passage, certains d’entre eux étaient la conséquence de spécifications initiales pas claires, mais ça c’est comme d’habitude).

Lors de l’une des livraisons, le client nous re-signale un bug déjà signalé la fois précédente. Je vérifie. Effectivement : j’avais oublié de coder la correction !

Je savais ce que je devais faire pour cette livraison, je m’étais concocté une petite liste. Eh bien j’ai oublié un truc dans cette liste.

Ça fait vraiment bizarre. On peut se planter de plein de manières quand on fait du dev, mais ‘oublier’ quelque chose, c’est rare, il faut vraiment être à la masse. (Je l’étais, ça faisait plusieurs mois que je codais régulièrement les soirs et les week-ends pour cette merde).

Après ça, on a décidé de créer des tests de validation pour GLORP. Excellente idée ! D’ailleurs, ne serait-ce pas ce qu’il aurait fallu faire dès le début ?

Sorry, my bad.

forgetfulness

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Il y a également les autres conneries que j’ai déjà racontées : la confusion prise série / prise VGA, la clusterisation de persona-pixels et le non-transfert du téléphone avec Maryse-Gâteau.

D’autres trucs en vrac

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Lorsqu’on part d’une boîte, on a droit à des vacances de fait : durant toute la période de préavis, vous pouvez glander, vous n’en avez plus rien à foutre. Légalement, cette période dure 3 mois. Mais les entreprises savent très bien que leurs ouvriers en profitent pour buller à foison tels des cachets d’aspirine dans l’eau, donc elles « acceptent gracieusement » de réduire ce temps à 2 mois.

Cette putain de boîte ne m’a même pas accordé la totalité de cette période magique. Lors de mon embauche 4 ans plus tôt, j’avais accepté d’avoir le statut de technicien et non pas d’ingénieur. Nonobstant la paye de merde, mon préavis était d’un mois seulement.

Sans que je comprenne pourquoi, j’éprouvais une espèce de stupide conscience professionnelle, certainement due au fait qu’ils m’avaient conditionné pour faire de moi un bon petit soldat corporate. Ce sentiment m’a forcé à travailler à nouveau les soirs et les week-ends, pour documenter tous les projets sur lesquels j’avais travaillé. Mon abruti de cerveau m’a forcé à ne pas partir en laissant mes collègues dans la merde.

Même ce tout petit mois de glandage autorisé, je n’en aurais pas profité pleinement. D’autre part, il est fort possible qu’ils ne lisent pas ma documentation. Clampins.

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Sur une période de plusieurs mois, j’ai gaspillé le temps libre que la société civile actuelle daigne m’accorder pour coder un super algorithme d’appariement de caractochromes karmagraphiques. Ça m’intéressait vraiment et c’était un chouette challenge de code.

L’algo fonctionnait plutôt bien. On s’en est servi pour fournir des prestations one-shot à des Clients. Chef Random et Collègue SuperFlamby ont eu vent de ma réalisation, l’ont trouvé sympa et m’ont dit que ça pourrait être sujet à du CIR (Crédit d’Impôt Recherche). Ça rapporterait peut-être pas beaucoup, surtout que d’autres projets bien plus sérieux avait été soumis, mais du pognon gratuit c’est jamais négligeable. Chef Random a laissé sous-entendre que ça pourrait même mériter une augmentation ou une prime.

J’étais super fier de moi. Beau gosse, bon petit soldat, viril et tout.

Ensuite, SuperFlamby m’a demandé de rédiger des documents pour argumenter la demande de CIR. Il les fallait évidemment pour avant-hier. J’ai à nouveau dépensé du temps libre, à un moment où je voulais le garder pour moi et me faire plaisir. Je n’ai jamais vu la couleur de mon augmentation ou de ma prime. Je ne me souviens même plus si le CIR en question a été validé.

Cette déliquescence est assez représentative de la déliquescence progressive générale de ma motivation dans cette boîte.

Je m’en veux d’avoir brûlé tout ce temps libre. On ne m’y reprendra plus jamais. Si un jour j’ai une super-idée d’un super-projet super-génial pour la super-boîte dans laquelle je super-bosse actuellement, j’en parlerais peut-être à des collègues, mais je ne claquerai pas une microseconde de Temps Libre pour ça.

"M'appelez pas CIR. Je ne suis plus roi."

« M’appelez pas CIR. Je ne suis plus roi. »

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Je me suis petitement remboursé de mes heures sup’ d’esclave et de mon salaire de misère non-augmenté, en volant régulièrement des serviettes essuie-mains que j’utilisais ensuite comme mouchoir. De plus, comme expliqué dans un ancien article, mon corps s’est inconsciemment entraîné à faire caca uniquement durant le travail.

Pendant plusieurs années, j’ai donc très peu acheté de mouchoir en papier et de PQ. Il n’y a pas de petites victoires.

Je tiens à remercier mon corps pour son dévouement et sa ténacité durant ces opérations d’optimisation de budget.

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Comme déjà écrit, on devait tracer le temps qu’on passait sur nos différentes tâches. Ça se faisait avec une interface poucrave et pas pratique, bien évidemment développée en interne. C’est marrant, la situation était la même à Merluchon Corp (ma précédente-précédente boîte). Il y aurait peut-être du fric à gagner à vendre ce genre d’outil.

Je m’étais développé un petit script dans mon coin, (en python, of course). Il récupérait les décomptes de temps que j’avais écrit à l’arrache dans un fichier texte, ajoutait automatiquement le pipeautage nécessaire pour compléter ce que je n’avais pas (ou ne voulais pas) noter et générait un bout de Javascript. Je n’avais plus qu’à le copier-coller dans la console du navigateur et ça envoyait les requêtes Ajax comme si c’était moi qui saisissait tout bien comme il faut.

Cheffette Gothique a fini par me choper avec ce script. Elle a été gentille et l’a bien pris. Tant que les stupides décomptes étaient déclarés, elle ne trouvait rien à redire.

De toutes façons, les valeurs étaient totalement fausses et hypocrites. C’est le cas dans la plupart des boîtes, mais dans celle-ci c’était particulièrement flagrant. Attendez, je vous explique.

Le but annoncé de ces traçages de temps est de « pouvoir estimer les charges de travail des projets futurs, afin d’évaluer ceux qui seront les plus rentables ». Partons du principe que ce n’est pas une vaste blague.

Au début, l’unité utilisée était l’heure. Quand on faisait des heures supplémentaires, on arrivait à un total journalier supérieur à 8.

Le problème pour les chefs, c’est qu’un tel système traçait les heures sup’, qu’on aurait pu ensuite s’amuser à compter et à revendiquer. Il a donc été décidé d’utiliser l’unité de « fractions de journée ». La somme quotidienne des comptages de temps devait toujours être égale à 1, les heures sup’ n’était plus visibles.

Du coup, ces comptages étaient inévitablement faux, on ne pouvait en déduire la charge de travail réelle d’un projet, ni estimer celle des projets futurs. Le but annoncé au départ n’était donc bien qu’une vaste blague.

Autre chose amusante à ce sujet. Nos fringants financiers avaient estimé le coût journalier d’un ouvrier-codeur, afin de pouvoir directement évaluer si un projet est rentable ou pas. Ce coût journalier était bien plus haut qu’un salaire journalier d’ouvrier-codeur, ce qui est normal : il faut compter les charges, jours de congés, loyers, frais fixes ainsi que les salaires des « improductifs » : chefs, gens de l’infrastructure du monde physique, secrétaires, financiers, …

Ça vaudrait le coup de se poser la question d’un tel système, qui ne permet de mesurer que la productivité des gens productifs, mais je ne vais pas m’étendre là-dessus. Rappelons que je n’ai aucune idée de la manière dont est censé être géré une boîte et que je m’en fous complètement.

Un beau jour, ce fameux coût journalier a été recalculé par les financiers, qui l’ont instantanément fait grimper de 150 euros ! Je veux bien croire que tout augmente, mais aussi rapidement c’est un peu suspect. Soit c’est du flan pour nous faire culpabiliser qu’on coûte cher et nous message-subliminaler qu’on doit travailler plus. Soit ils étaient complètement à l’arrache et n’avaient pas réajusté le coût depuis des années. Dans les deux cas, ça rend leurs savants calculs pas crédibles.

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Je suis parti

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J’étais venu dans cette boîte parce que la paye de merde était contrebalancée par le fait que la totalité des 35 heures étaient sous forme de RTT. Ça m’aurait fait plein de temps libre, ce qui est plus important que l’argent pour moi.

Je n’ai jamais pu prendre toutes ces belles RTT, pas plus que mes jours de congés. J’ai été obligé d’en cumuler une quantité stratosphérique. Ils m’ont tout remboursé quand je suis parti, sauf que c’était sur la base de mon salaire de merde. J’aurais vraiment préféré avoir ça sous forme de temps libre.

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Avant de partir, j’ai fini toutes les bouteilles entamées qui traînaient dans les frigos. Ça m’a donné un sentiment de nettoyage très soulageant. J’ai été heureux d’avoir pu saisir cette occasion de rendre service.

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À chaque fois qu’on change de boîte, on lance les dés. Si vous faites un triple 6 avec deux dés, vous arrivez dans un endroit magique dans lequel vous pouvez raisonnablement glander et faire des choses pour vous pendant les heures de travail. Mais vous ne pouvez jamais savoir à l’avance le résultat des dés.

Vous pouvez demander une foule de choses durant l’entretien d’embauche : Est-ce bien payé ? Y’a-t-il des formations ? Quelles sont les technologies utilisées ? Quels sont les projets en cours ? Comment sont les collègues ? Le café est-il bon ?

On ne vous dira peut-être pas la vérité. Mais vous pouvez au moins poser la question.

En revanche, vous ne pouvez pas demander s’il y a possibilité de glander. Ce n’est pas une question acceptable. À la limite, vous pouvez demander si le rythme est stressant ou pas, mais c’est délicat, et vous êtes à peu près sûr qu’on vous mentira.

D’où l’analogie avec le jet de dés.

Et là j’avais vraiment envie de les jeter à nouveau.

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Et dans la nouvelle boîte ?

Lorsque c’est la merde dans une boîte : délais non-euclidiens, projets pourris, collègues psychédéliques, etc. ça ne l’est jamais dès le départ. Mes débuts à Zarma.pro étaient fabuleux.

Je Travaille maintenant chez « ConcreteWorld.🌏 ». (Le dernier caractère se prononce « 1F30D »). Pour l’instant tout est fabuleux, mais je ne veux pas crier victoire trop vite. Ça fait 7 mois que j’y suis, je considère encore que c’est les débuts.

J’essayerai de vous raconter ce qu’il s’y passe au fur et à mesure. Ça m’évitera de balancer un roman en 3 articles géants au moment où j’en partirais. En attendant, voici quelques remarques rapides :

  • Le cœur de métier de cette entreprise est la conservation de la réalité. Peu de gens savent qu’un travail de fourmi est effectué dans l’univers entier, par une multitude d’entreprises et d’organismes, pour conserver la réalité telle que vous la connaissez. Les incohérences et autres paradoxes sont détectés et circonscrits au plus vite. Sans nous, des principes de base comme la causalité, l’entropie, la tridimensionnalité ou la constance de la constante cosmologique ne seraient pas intégralement garantis.
  • Un point négatif : la radio est diffusée en continu dans les toilettes. Ça me lourde vraiment d’entendre les connards de Peugeot ou de Lidl dégueuler leurs abruticités pendant que je me masturbe. C’est encore cette putain de RTL2 gavée de pub. Elle me suite partout cette radio de merde à la con.
  • Comme à chacun de mes changements de boîte, je fais vœu de non-flatulence. Celui-ci a tenu 3 jours.
  • Je suis beaucoup moins dérangé par des clients idiots ou des collègues impertinents. C’est quand même beaucoup mieux pour se concentrer. Lorsque je mets mon casque sur mes oreilles je peux avoir l’espoir d’écouter au moins 4 morceaux de musique en entier. À ce propos, je suis en train de me monter une bonne playlist dub dans soundcloud. Si ça vous intéresse c’est par ici : https://soundcloud.com/recher

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J’ai changé de crémerie (2/3)

Voici la suite du patch-work bizarristique de ma précédente incarnation professionnelle. Se référer à l’article précédent pour le début.

Je vais maintenant vous décrire …

Mes chefs

Cheffette Gothique

Il s’agissait de ma cheffette directe, dans notre fameuse équipe de personnes (A, B, C, D) au graphe complet de déblaterration-les-uns-sur-les-autres. (cf. vocabulaire de la théorie des graphes (https: //fr.wikipedia.org/wiki/Graphe_complet)).

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Je l’aimais bien. Par respect pour elle, j’ai vraiment essayé de modérer mon cerveau et de l’empêcher de me faire fantasmer sur ses nichons. Je ne peux pas prétendre y être totalement parvenu. On va dire que le fait d’avoir essayé suffit à constituer une marque de respect.

Là où j’ai moins aimé, c’est quand elle a commencé à attraper une ‘schizophrénie cheffale’. Vous connaissez ? Y’a le chef qui vous dit : « tu n’es pas obligé de faire toutes ces heures supplémentaires ni de travailler les soirs et les week-ends », et juste après il vous dit : « L’important c’est l’Engagement. Quand tu nous donnes une estimation de temps tu dois t’y tenir. Le MégaChef m’a prévenu qu’il donnerait des avertissements si on ne tient pas nos Engagements ».

C’est cette dernière petite phrase terrible qui a contribué à ce que je m’auto-force à pourrir mon temps de vie personnel par du temps de travail en rabiot, jusqu’à ce que mon ras-le-bol déborde et provoque mon départ. Mais je n’ai pas eu de méchants avertissements. Je suis un gentil petit soldat.

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Cheffette Gothique

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J’ai eu à inspecter une partie de son code. Pas très beau à voir. J’ai bien conscience qu’on a toujours tendance à trouver que le code des autres est pourri. J’essaye de tenir compte de ce sentiment pour modérer mes envies de quolibets et de destructions par la foudre. Mais là, quand même, elle avait réussi à me foirer un calcul de distance dans un espace de dimensions infinie. En karmagraphie, c’est un peu la base de tout, quand même.

J’aimerais bien rencontrer en vrai une femme qui code bien et que ça passionne. Je sais qu’il en existe. Parmi les vilains sentiments qui surgissent dans mon cerveau et dont j’ai infâmeusement honte, celui de « c’est une femme donc elle code mal » tient une place significative. Cheffette Gothique n’est pas une personne qui m’a aidé dans la lutte contre ce sentiment. Tant pis, peut-être une autre fois.

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Chef Random

L’ex-chef de ma cheffette. C’était un tocard social de taille assez conséquente.

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Réunion concernant le projet fou avec les relevés automatiques et massifs d’acariens. On en était au début, j’avais commencé à digérer les specs et voyais à peu près comment architecturer le bazar. Random me demande : « la réalisation, ça prendrait combien de temps ? ».

C’est toujours sympa de devoir faire une estimation alors qu’on n’a pas été prévenu qu’il fallait en faire une. J’y réfléchis à fond pendant deux secondes. Comme d’habitude, une partie de mon cerveau me hurle d’annoncer trois fois plus long car c’est de toutes façons le temps que ça prendra réellement même si personne ne veut encore le reconnaître. Je rabat le caquet à cette partie de cerveau. Je me tourne vers Collègue Nounours avec un regard de pitié et donne un délai qui ne me semble pas trop pourri. Nounours n’affiche aucune réaction, montrant bien que je suis seul à m’Engager sur ce sujet (en même temps, je le comprends).

Entendant mon estimation, Chef Random pousse instantanément un râle de mécontentement : « Rrrraaah putaaaaaiiiiiin !!! ». Il n’a rien ajouté de plus. La demi-dizaine de personnes présentes à la réunion n’a absolument pas su comment réagir face à un comportement aussi bizarre. Il y eut un blanc de conversation tout comme j’aime, puis on est passé à autre chose.

Le bramement de Random était tellement immédiat qu’on a tous plus ou moins réalisé qu’il avait prévu de le pousser quelle que soit mon estimation. Il a dû penser que cela ferait ainsi naître en moi un sentiment de culpabilité et me forcerait à mettre les bouchées doubles d’heures sup’ pour terminer le plus vite possible. C’est un crétin peu respectueux.

Inévitablement, la réalisation a été quatre fois plus longue que mon estimation initiale. Je tiens à (re)préciser que je n’ai que très peu truandé de temps libre, chez Zarma.pro en général et pour ce projet en particulier. Par contre, bosser avec des scientifiques fous, ça aide pas à terminer dans les délais. Mais vous saviez certainement déjà cela.

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Voyager dans le temps, non. Voyager dans les délais, oui.

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Chef Random ne priorisait jamais les actions. J’avais souvent plusieurs choses à faire sur des sujets relativement différents, à moi de choisir l’ordre que je préférais. Ça fonctionnait pas trop mal. Disons que lorsque je me faisais engueuler, ce n’est pas parce que j’avais incorrectement ordonné mes tâches, c’est juste qu’il trouvait que globalement tout allait trop lentement et son humeur du moment l’invitait à m’engueuler.

D’ailleurs il ne m’engueulait jamais explicitement. Il suggérait juste de manière non-subtil que c’était pas le moment de prendre des congés ni des RTT. Ça aussi, ça a fortement contribué à mon ras-le-bol global.

À un certain moment de son incarnation professionnelle, Chef Random a été progressivement démis de ses fonctions de chef. J’ai pas suivi tous les détails car je m’en branlais. Vu de mon balcon, je dirais simplement que les autres MégaChefs se sont aperçus que Chef Random était un tocard.

Il y eut donc une période de transition durant laquelle nous avions deux chefs : Random et «  ». (Je parlerai de Chef «  » juste après).

Je me suis dit : « nouveau chef, nouvelle façon de travailler ». Un jour que mes tâches en cours était quelques peu hétérogènes, je me fendis d’un mail aux deux chefs, (le plus court possible, 6 ou 7 lignes à peine), dans lequel je résumais ces tâches et demandais un ordonnancement éventuel. J’obtins une réponse immédiate de Chef Random contenant des priorités claires et explicites. J’étais plutôt content.

Un peu plus tard, réunion avec des collègues et Chef Random. Ce dernier explique que Chef «  » va assurer le suivi d’un petit peu tout (voilà un périmètre d’action très clair et très défini). J’en profite pour dire que du coup j’ai bien fait d’écrire ce petit mail pour demander les priorités. Chef Random répond alors « Non, Réchèr. Pas bonne idée. Chef «  » m’a contacté ensuite et a rouspété comme quoi ‘ce sont des vrais gamins’. C’est pour ça que j’ai répondu très vite en fixant les priorités. C’était pour vous sauver la vie. S’il avait eu à répondre par lui-même, il vous aurait dévissé vos gueules et chié dans vos cous ».

Ah d’accord. Bon eh bien je vais continuer de m’auto-fixer mes priorités. Mais ça m’a permis d’apprendre que Chef «  » me considère comme un gamin. Vraiment super.

Je veux bien admettre que les chefs, lorsqu’ils sont entre eux, parlent de leurs ouvriers-codeurs en termes insultants. On fait pareils lorsqu’on parle entre nous de nos chefs. Mais la moindre des choses c’est de ne pas répéter tel quel les propos proférés durant ces dialogues privés. Chef Random a donc bien tocardisé sur ce coup là.

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Il a vilainement encaissé le démettage de responsabilités qui lui a été imposé, il était tout triste de ne plus se sentir important dans la boîte. Il s’en est épanché auprès de différents collègues. Pas moi, mais j’ai fini par l’apprendre indirectement.

Il a été très bien inspiré de ne pas effectuer ses épanchements sur mon épaule, sinon je lui aurais rentré dans le lard direct. Sérieusement quoi ! Il gardait son salaire pharaonique de MégaChef, tout en obtenant une charge de travail très inférieure. Moi j’avais un salaire très bas au départ, qui l’est resté puisque je n’ai jamais été augmenté en 4 ans de boîte, par contre ma charge de travail et de pression culpabilisatoire, elle, a bien augmentée.

En fait ça m’a fait chier d’apprendre qu’il s’était plaint, sans qu’il soit venu se plaindre directement auprès de moi. C’est presque comme si j’avais eu à subir ses jérémiades sans avoir eu l’occasion de lui rentrer dans le lard. C’est la faute des gens qui ont véhiculé ses plaintes. D’autant plus que les gens en question ont eu l’indécence de compatir à ses problèmes. Ouais, j’avais quelques collègues un peu lèche-bottes.

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Finalement, la plus haute charge qui est restée incombée à Chef Random était ‘responsable du site’. (On ne sait pas en quoi ça consiste). C’est ce qui lui a permis de provoquer le moment le plus merdique que j’ai vécu à Zarma.pro.

Pour une raison quelconque, on venait de déménager dans une autre pièce, que moi et mes collègues étions en train de réarranger. C’était pas forcément très optimisé ni très feng shui. On avait fait un simple gros carré de bureaux en plein milieu, avec une zone spéciale pour notre bordel d’appareils karmagraphiques (les extrapoleurs de champs et autres quincailleries). C’était viable, et vu la quantité de bastringue matériel requis à portée de main, il était difficile de maximiser le feng shui.

Chef Random nous tournait autour en inspectant nos actions et nos décisions, sans véritablement nous aider. Je suppose qu’en tant que « responsable du site déchu de toutes ses autres fonctions », il s’est senti investi d’une mission divine de décorateur d’intérieur. Il a passé toute la matinée à nous houspiller et à dénigrer notre agencement : « C’est moche », « C’est pas raccord », « Ça fait pas rangé », … On a senti en lui la volonté de vouloir faire évoluer ces dénigrements en attaques personnelles. Il arguait que même dans son atelier chez lui, c’était mieux organisé, et que si c’est comme ça dans ce bureau, il serait curieux de savoir comment c’est chez nous. Blabla blabla.

Moi je m’en fichais. Mais ça a justement ajouté au problème, car il s’en est aperçu et m’a regardé bien dans les yeux en m’interpellant : « Vous vous en fichez, à vrai dire ? ». J’ai pas su quoi répondre. Il avait tellement raison.

Ce sketch qu’il nous a fait, je l’ai toujours en travers de la gueule. Cheffette Gothique a essayé de réduire l’hémorragie en nous conseillant de ne pas nous formaliser sur ses écarts de comportements. Eh bien si justement, je préfère me formaliser. Il nous a jeté inutilement des morceaux d’excréments, tout ça parce qu’il voulait se donner l’illusion qu’il possédait encore un petit pouvoir.

Sur ce coup là, Il a magistralement tocardisé.

Le feng shui, ça prend de la place sur une table.

Le feng shui, ça prend de la place sur une table.

Quelques semaines plus tard, alors qu’il passait dans notre tout nouveau bureau, il me demande « Eh bien Réchèr, vous me faites la tête ? Ça fait un petit moment que vous ne venez plus me dire bonjour ».

Je ne crois pas avoir eu la volonté de le snober. En tant que chef, il avait son beau bureau à lui tout seul (magnifiquement bien agencé par lui-même, of course). Je n’allais pas le saluer lorsque sa porte était fermée, car il pouvait avoir envie de ne pas être dérangé, pour cause de conversation importante de chef. C’est ce que je lui ai répondu et c’en est resté là.

J’ai scanné mes souvenirs des jours précédents, j’y ai effectivement trouvé que sa porte était souvent fermée, provoquant une suite de non-bonjours pouvant être assimilée à un faisage de tête. Ceci dit, il est fort possible que j’ai inconsciemment décidé de le snober réellement, et que mon cerveau m’ait caché cette décision interne car mon cerveau est une putain de petite fiotte.

Que mes actes aient été inconscients ou pas, Chef Random a cru que je lui faisais la tête, ce qui tend à prouver qu’il avait quelque chose à se reprocher. Tocard.

Encore quelques semaines plus tard, on voulait faire déménager Collègue NinjaBlingBling dans notre toujours-aussi-nouveau bureau (on lui avait fait une place au milieu de notre bastringue). On avertit Chef Random, qui ne nous donne pas d’avis particulier. On l’annonce ensuite à Collègue NinjaBlingBling, qui rétorque « Je ne peux pas travailler à proximité de vous. Vous êtes tout le temps au téléphone avec des clients, moi je bosse sur des nouvelles technologies, j’ai besoin de me concentrer ». Ça nous embêtait un peu.

On a signalé ce refus à Chef Random, qui a continué de ne pas donner son avis. En tant que fameux ‘responsable du site’, il aurait dû, soit être d’accord et obliger Collègue NinjaBlingBling à déménager, soit ne pas être d’accord et nous dire dès le départ qu’il n’était pas question de le déménager. Il n’a fait aucune des deux actions, car « il s’en fichait, à vrai dire ».

C’est donc bien un tocard social, doublé d’une petite fiotte.

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Un jour que j’étais seul dans la pièce, Chef Random débarque et regarde le bureau de Collègue Drache-Code. D’un ton blasé, il lâche : « C’est le désordre. Il y a un énorme tas de stylos, des feuilles de partout, une fourchette en plastique cassée et des gobelets vides ». J’avais envie de troller quelque chose comme : « Au fait, les capotes usagées que j’ai mis dans ma corbeille, ça se recycle ? ». Mais j’ai juste dit « Oh lala, c’est pas classe. Vous voulez que je lui en parle pour qu’il range un peu ? ». Il m’a répondu que ce n’était pas la peine et a ajouté, sur son ton toujours aussi blasé, que « chacun vit comme il veut ».

En fait il n’osait pas en parler directement à Collègue Drache-Code, et n’osait pas non plus le dire aux autres collègues. Il s’est adressé à moi seul car il savait que de manière générale, j’ouvre pas trop ma gueule. Son intention devait être que je transmette sa remarque à Drache-Code. Comme ça, il se mouille pas, mais il a quand même le sentiment d’avoir accompli son travail de ‘responsable du site’.

C’est donc bien un tocard social, doublé d’une petite fiotte. (J’aime bien copier-coller des phrases).

Je n’ai bien évidemment absolument rien transmis à Collègue Drache-Code.

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Pour finir avec Chef Random, je mentionnerai rapidement les trois heures de déplacement professionnel que j’ai dû faire avec lui, coincé dans la même voiture.

C’est des choses qui arrivent et je ne peux en vouloir à personne. Mais quand même, c’était horriblement décrépissant. On essayait de trouver des sujets de conversation pour meubler, tout en restant dans la banalité car on ne se connaissait pas assez pour savoir si on avait des intérêts en commun.

J’ai du me retenir de péter pendant trois heures. Mes gaz, ne pouvant s’échapper, ont finis par se répartir dans mes tuyaux internes. Lorsque je suis arrivé à ma maison, ils n’ont donc pas pu tous sortir d’un coup et j’ai passé la soirée à pourrir progressivement mon chez-moi. Dur dur.

Moi et Chef Random souriant, durant notre road trip qui a créé une amitié éternelle entre nous deux.

Moi et Chef Random, souriants, durant notre road trip qui a créé une amitié éternelle entre nous deux.

Chef «  »

Le Chef de Cheffette Gothique et de plein d’autres gens. Il s’appelle «  » car je n’ai eu que très peu d’occasions de lui parler directement, et en général c’était plus lui qui parlait tout seul pour nous engueuler. Ce sentiment d’absence de contact s’est propagé dans son propre nom, qui est lui aussi devenu absent.

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En fait je suis un peu mauvaise langue : j’ai eu l’occasion de lui parler directement. Lorsqu’il voulait joindre Cheffette Gothique et qu’elle n’était pas disponible, c’est moi qui décrochait le téléphone. Il me demandait : « Ça va ? ». J’avais 2 secondes pour trouver un sujet cool pouvant potentiellement aboutir à une conversation cool de 30 secondes. Évidemment, comme j’étais concentré dans d’autres trucs qui étaient rarement cools, je ne trouvais rien à lui dire et répondais juste : « ça va ». Je ne suis peut-être pas assez doué pour l’improvisation.

Mais lui était tellement fan d’improvisation qu’il aimait provoquer des réunions là-tout-de-suite-maintenant. On avait des maintenance prévues avec des clients, on était en déplacement ou en congés. Osef. Si tu peux pas être à la réunion, c’est tant pis pour ta gueule. (Ou tant mieux, puisque dans ces réunions on se faisait principalement engueuler).

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Chef «  » tenait à ce que nous soyons soudés comme ‘une équipe’. C’est fort louable. Mais je ne sais pas si ça a bien fonctionné (cf le fameux graphe de déblaterration complet).

Soudés ou pas, il ne voulait pas entendre parler de nos éventuels problèmes internes. Pour lui, l’interlocuteuse principale était Cheffette Gothique et personne d’autre. Il nous a bien répété plusieurs fois qu’on n’avait pas à le contacter ‘en direct’. J’ai rien contre les structures pyramidales (je me contrefous de savoir comment une entreprise doit être organisée), mais ce serait tout de même gentil de ne pas trop insister sur le caractère immuable de ladite pyramide, surtout auprès des gens qui en sont au rez-de-chaussée, voire à la cave, voire à la chambre funéraire.

Phrase rigolote : « La structure pyramidale est gravée dans le marbre ». Amis géologues, bonjour.

Un jour, Collègue Eurod’ a fait une connerie assez volumineuse. Suffisamment pour que Cheffette Gothique estime qu’il méritât d’être pourri au point d’inclure Chef «  » ‘dans la boucle’. Mais elle ne pouvait pas le faire, puisque Chef «  » ne voulait pas qu’on l’embarrasse avec des problèmes individuels.

Elle a donc fait un mail de pourrissage général de l’équipe, citant la connerie faite par Eurod’, sans mentionner que c’était lui. Chef «  » a bien évidemment renchéri d’un mail hurlant que toute notre super-équipe devait respecter à la lettre les recommandations re-serinées par Cheffette Gothique. On top of the market, Collègue DRH était ‘en copie des mails’, histoire de bien enfoncer la vis jusqu’à la garde à coup de marteau-piqueur.

Cheffette Gothique m’a ensuite précisé que je pouvais répondre à son mail pour donner mon avis personnel. Le fait qu’il s’agissait d’un pourrissage général me donnait ce droit. Je m’en fichais un peu, mais finalement j’ai décidé de le faire, afin de passer pour un bon élève obéissant auprès d’elle, par contraste avec Collègue Eurod’ le vilain mauvais élève du moment.

Je me fends donc d’un ‘répondre à tous’ et tente de nuancer le pourrissage de la manière la plus courtoise et la plus objective possible. Cheffette Gothique lit ma prose et ne la trouve pas trop déconnante. Je suis plutôt heureux.

Et là, Chef «  » nous répond-à-tous, en caractère gras : « veuillez immédiatement arrêter cette joute verbale, on fera une réunion pour mettre tout ça au clair ». Génial.

Évidemment, Cheffette Gothique n’est jamais allée dire à Chef «  » que c’est elle qui m’avait incité à joute-verbaler. Ça c’est de la bonne soudure d’équipe.

Évidemment², on n’a jamais fait de réunion pour mettre tout ça au clair. Et même si on en avait faite une, la date aurait été choisie à l’arrache par Chef «  », on aurait pas tous été disponibles et il se serait réuni tout seul pour nous engueuler virtuellement, au cours d’une mono-joute verbale des plus magistrale.

(Tiens, j’ai dit ‘mono’, je viens de faire une Euroderie).

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Verbal joust ?

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Réunion téléphonique à laquelle j’étais semi-disponible (je codais des trucs qui n’étaient en retard que de deux mois, et je n’avais pas de maintenance client en cours). Celle-ci s’éternise et Chef «  » commence à en avoir assez. Il nous annonce alors que « il passe trop de temps avec nous par rapport à ce que nous rapportons » et laisse à Collègue SuperCommercial le soin de terminer la réunion.

Il avait sûrement raison et il était en droit de nous dire ça. Mais du coup, je suis parti sans la moindre once de regret.

Une fois, Collègue Nounours l’a appelé directement. Ils ont discuté, se sont pris le bec, et Chef «  » a dû se dire que Nounours rapportait tellement pas assez que ça ne valait même pas la peine de consacrer quelques secondes pour lui dire qu’il ne rapportait pas assez. Il lui a directement raccroché au nez.

C’est terriblement prétentieux et méprisant envers les autres de présenter les choses de cette manière. Je ne vous apprends rien en vous disant que la vie d’une personne n’est rien de plus qu’une quantité finie de temps. Chef «  » a une si haute opinion de son propre temps, donc de sa propre vie, qu’on ressent bien qu’il pense que la pauvre vie de nous autres ouvriers-codeurs n’est pas aussi précieuse.

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On résultait de la liquéfaction de deux mini-équipes, ayant chacune leur nom. Chef «  », au début de sa prise de pouvoir, nous suggéra d’en trouver un nouveau par nous-même, qui nous plairait et ferait naître en nous un puissant sentiment d’appartenance corporatif.

Personne n’a moufté que d’alle. J’ai proposé à mes petits camarades : ‘équipe Chou-fleur’, parce que les légumes c’est bien, et que le chou-fleur c’est une très jolie fractale naturelle. Ça n’a pas eu l’écho que je voulais.

Quinze jour plus tard, on reçoit un mail de Chef «  » :

Là tout de suite ce matin, réunion pour Test-0-Steron.

On s’est tous demandé ce que c’était que ce nouveau projet ‘Test-0-Steron’ dont on n’avait jamais entendu parler. Collègue Eurod’ a commencé à râler : « Non mais c’est n’importe quoi, on est déjà charrette-brouette sur tous nos projets, et on nous en colle un de plus. Ça va partir en cacahuète-soufflette ! »

(Ce n’était pas exactement ce qu’il a dit, mais sa façon unique d’utiliser la langue française fait qu’il est difficile de retenir et retranscrire ses propos avec fidélité).

Intérieurement, cette nouvelle m’apportait une petite bouffée de bonheur. Un nouveau projet, ça voulait dire une chance de travailler autrement, moins de temps consacré à faire des maintenances sur les projets existants (dont je ne maîtrisais pas la moitié), d’autres clients, et peut-être même, comble de la félicité, pas de clients du tout durant les premiers temps du projet. Ça signifiait également une raison légitime d’avoir du retard sur un petit peu tout, puisqu’on nous augmentait d’un coup notre charge de travail.

Mes espoirs se volatilisèrent lorsque j’appris, (complètement à l’arrache évidemment) que c’était le nouveau nom de notre équipe. Il sortait de nul part. J’ai jamais vraiment su pourquoi on s’appelait comme ça.

En même temps, on s’en est pas trop mal sorti. Une autre équipe gérée par Chef «  » avait pour nom ‘Cleveland Steamer’. Aucun rapport avec ça (http:// www. urbandictionary.com/define.php?term=Cleveland%20Steamer), mais personne n’a pu s’empêcher de faire le rapprochement.

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Chou-fleur fractal

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Je suis obligé de reconnaître qu’une fois, une seule fois, Chef «  » nous a félicité. On avait commencé la nouvelle version de Modeli-Morvax, un logiciel assez innovant qui pouvait texturer des volumes karmagraphiques constitués par l’ensemble des sous-points de gens ayant des personnalités similaires. On stockait dans des bases SQLite des images d’une infinité de pixels répartis dans une infinité de dimensions. Sans déconner, c’était pas trop mal branlé comme truc.

Je dois avouer que quand je l’ai entendu nous féliciter, ça m’a fait plus peur qu’autre chose. Déjà, j’avais pas énormément participé à cette nouvelle version, mais surtout, ça voulait dire qu’il était capable de féliciter des gens. Ça aurait été bien plus rassurant qu’il nous engueule en continu, on aurait fini par faire abstraction et il aurait totalement disparu de nos esprits. Déjà que son nom avait disparu.

Dans ma paranoïa personnelle, je m’imagine qu’il ne souhaitait pas réellement nous féliciter. En fait on était à quelques heures d’une grosse présentation de ce logiciel devant tout le monde de la boîte. Il voulait juste nous mettre en confiance pour éviter qu’on finisse dans un magistral fail publique et que nos conneries éclaboussent sa réputation personnelle.

Ou alors il nous a félicité une seule fois pour légitimer toutes les engueulades qu’il nous éructait. « Je sais reconnaître un travail bien fait, mais je sais aussi reconnaître de la mayrde, et là, vous faites de la mayrde en continu !! »

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Voici quelques phrases d’engueulade qui ont provoqué des moments bizarres dans mon corps et mon esprit.

« Modeli-Morvax, il fait n’importe quoi ! »

Il n’avait pas tout à fait tort. C’était la version 1.1, et elle était méga-buggée, car réalisée par Collègue Drache-Code (je parlerai de cette personne un peu plus loin).

« Je ne veux plus entendre parler de problème de discipline au sein de l’équipe. »

Là non plus il n’avait pas tort. Une fois de plus, c’était pas de ma faute, mais il tenait à s’adresser à l’équipe dans son ensemble. Donc on s’est tous ‘pris ce tir’ dans la gueule. Ça fait vraiment bizarre de (ré)entendre le mot ‘discipline’.

*me regarder bizarrement après que j’ai dit ‘bataille navale’.

Ouais bon, je suppose que c’était de ma faute. Collègue Drache-Code discourait sur la notation Shiva-Lingamienne des coordonnées karmagraphiques, c’est là que je me suis immiscé dans la conversation pour énoncer une remarque rigolote : « ça ressemble à la bataille navale ».

Chef «  » m’a regardé d’un air « qu’est-ce qu’il me veut ce connard ? ». Je ne savais plus comment réagir et ais préféré me tourner vers mon écran sans rien dire. Quelques secondes plus tard, j’ai voulu voir si le moment bizarre avait été acquitté. Nos regards se sont alors re-croisés, mais cette fois-ci le sien avait un air « qu’est-ce qu’il me veut ce connard, à pas avoir compris ce que j’ai voulu lui signifier la première fois que je l’ai regardé d’un air ‘qu’est-ce qu’il me veut ce connard ?’ ? ».

C’est bête. Je la trouvais super drôle, la blague de la notation Shiva-Lingamienne qui ressemble à la bataille navale.

Bataille navale !

Bataille navale !

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Lorsqu’on quitte une entreprise, la convention veut qu’on ait droit à un petit dialogue privé avec la hiérarchie. On remonte ainsi la chaîne alimentaire, on découvre ce que chacun des chefs pensait du travail qu’on faisait, et on peut dire ce qu’on pense d’eux. Ça reste hypocrite et langue de bois, car on ne veut pas se griller au cas où on aurait besoin de reprendre contact avec l’entreprise, mais on a une petite marge de lâchage.

Amélie Nothomb a déjà décrit ce remontage de chaîne alimentaire dans ‘Stupeurs et Tremblements’.

C’est une sorte d’entretien annuel final. (Ça rattrape le fait que je n’ai eu qu’un entretien annuel en 4 ans, et que j’en aurais eu zéro si je n’avais pas trépigné et envoyé des mails, mais c’est une autre histoire, osef).

J’ai eu l’occasion d’avoir ce petit dialogue final avec Cheffette Gothique et MégaChef Storitel (j’en parle tout de suite après). Mais Chef «  », nullement. Comme quoi, il s’appelait vraiment «  », et je ne saurais jamais ce qu’il pensait de moi. Donc : osef.

I have no mouth and anyway I have nothing to tell you

I have no mouth and anyway I have nothing to tell you

MégaChef Storitel

Le Chef de Tout. On dit aussi ‘Président du directoire’ ou ‘Directeur du présidoire’. Il s’appelle comme ça car c’est un grand fan de story-telling :

  • Lorsqu’on fait une démo à des clients, il faut leur raconter une histoire.
  • Le travail qu’on produisait pour l’entreprise constituait aussi une histoire qu’on racontait, et pas juste des actions aléatoires dans le but d’avoir un salaire.
  • Par extension, pour nous signifier qu’on avait qu’à partir si on n’était pas d’accord, il disait : « dans ce cas on ne raconte plus la même histoire ».

Du coup, on a l’impression qu’il s’appelle MégaChef Sofitel, et on ne peut s’empêcher de faire des rapprochements scabreux. Mais en fait non, rien à voir.

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Lui et ses amis chefs n’ont eu de cesse de nous dire que lorsqu’on estime un temps de réalisation, il faut s’y tenir (le fameux ‘Engagement’). La raison officielle étant que ça complique la gestion des plannings et que ça ne permet pas de décider correctement du lancement ou du non-lancement d’un projet car sa rentabilité ne peut être fiablement calculée. « Sinon on navigue à vue, et vous comprenez bien que c’est pas possible ».

La vraie raison c’est qu’il sait très bien que c’est humain de sous-estimer le temps que prendra une tâche. Il nous laisse nous planter tout seul pour ensuite nous forcer à tenir nos promesses humainement irréalistes en faisant des heures sup’ d’esclaves.

Bataille navale dans laquelle on navigue à vue !

Bataille navale dans laquelle on navigue à vue !

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MégaChef Storitel demande à Collègue NinjaBlingBling de faire une estimation. Celui-ci fournit quelque chose qui semble tenir la route.

Réponse de MégaChef : « Je trouve que ce chiffrage est un peu protectif ».

Oui, le mot ‘protectif’. Il existe et pis c’est tout.

C’est génial. Dans tous les cas, on se fait verre-pilo-sodomisé et ça finit avec des heures sup’ d’esclaves. Soit on chiffre bas, on se plante et on fait des heures sup’ parce qu’on est censé ‘tenir nos Engagements’. Soit on chiffre haut, on s’entend dire que c’est protectif, on rechiffre plus bas, go to étape précédente.

Chef «  » nous assénait les mêmes coups. Il m’avait répondu (par le biais de Cheffette Gothique puisqu’il ne me parlait pas directement), que telle estimation « était inadmissible ».

C’était devenu très très drôle. Finalement, plus personne n’osait estimer quoi que ce soit. Aucun d’entre nous ne se mouillait, on s’était métamorphosés en gens flippés de nos mères. Pour le coup, l’esprit d’équipe était présent : on était tous dans la même merde. Et donc on était dans la merde. Merde alors.

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Le jour de mon pot de départ, j’installe la bouffe et la piache comme il faut sur les tables, puis je bat le rappel pour prévenir tout le monde que ça y est, c’est l’heure de s’en coller une gratuitement. Je termine par le bureau de MégaChef Storitel. Il me dit « tu as 5 minutes qu’on parle un petit peu ? », je dit que oui, et c’est là qu’a eu lieu mon petit dialogue de départ avec lui. J’étais arrivé au bout de la chaîne alimentaire de la hiérarchie.

Sauf que j’ai pas trouvé ça très sympa de sa part, parce que tout le monde m’attendait et ils n’avaient pas osé mettre les bouteilles en perce sans moi. J’ais dit à plusieurs reprises à MégaChef que les estomacs des collègues devaient gargouiller famine et que leurs yeux injectés de sang allaient sortir de leurs orbites pour se plonger d’eux-mêmes dans l’alcool libérateur et expiatoire. Il m’a répondu que se faire attendre et désirer, c’était une bonne technique pour augmenter le bonheur des gens lorsque on apparaît enfin.

J’ai apprécié cette conversation avec lui. Mais ça m’a fait chier qu’il la prenne sur le temps de mon pot de départ. Le pot de départ, c’est un peu le quart d’heure de gloire final d’une incarnation professionnelle. On discute avec les gens, ils demandent ce qu’on va faire après, on peut se lâcher un peu (tout en respectant le minimum d’hypocrisie de sécurité, comme d’habitude). À la fin, on part dans une superbe gerbe d’étincelles pyrotechnique, laissant à ceux qui restent un bon gros sentiment de jalousie bien dégoulinant de cafardisme.

Il m’a volé une partie de ça et je le regrette un peu. (J’ai dit quelques paragraphes plus haut que j’étais parti sans la moindre once de regret, mais j’ai jamais dit que les propos de cet article seraient entièrement cohérents).

Mes collègues mourant de faim

Mes collègues mourant de faim juste avant le signal de départ de mon pot de départ

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Quelques petites phrases amusantes durant ce fameux dialogue d’entretien annuel final.

« Tu travaillais bien. Mais tu aurais pu être plus proactif. »

Ça, en dialogue corporatiste de Chef, ça veut dire : « On n’a jamais pris le temps de s’occuper de toi et de la façon dont tu aurais pu évoluer dans l’entreprise. Alors tu aurais dû faire tout ça par toi-même. »

Je trouve au contraire que j’ai été très proactif. Quand j’ai senti que ça puait dans cette boîte et que je continuais de ne pas être augmenté, j’ai cherché les entreprises alentours qui émettaient des signes d’embauche et j’ai fait une grande quantité de candidatures spontanées. La plupart on échouées, sauf une qui est magiquement réapparue après avoir marinée pendant un an, je l’ai alors proactivement saisie au vol.

Prévoir les choses à l’avance, agir par soi-même, puis attendre patiemment et sans s’énerver que le monde extérieur daigne fournir un retour sur les actions effectuées, tout en continuant de prévoir et d’agir : c’est du proactivisme.

« Tu aurais pu nous le dire avant que tu voulais partir, on t’aurais aidé. »

Ha ha ha ha ha ! Ha ha ha ! Pauvre naïf ! Quel idiot annoncerait qu’il veut partir alors qu’il n’est pas encore sûr de partir ?

Durant les grosses réunions corporate rassemblant toute l’entreprise, Storitel nous faisait des petits discours et des petites présentations. C’est durant ces moments intenses qu’il nous a appris que « on n’était pas dans le monde des bisounours ». Merci du tuyau.

Un ouvrier-codeur qui prévient qu’il va se barrer parce qu’il en a marre du bordel, du salaire de merde et des heures sup’, sans pour autant avoir de piste tangible pour se barrer, c’est pas un peu du bisounoursisme de patron ?

Ah ah, quel tanche géante ! J’en ris encore dans mon cerveau.

« Tu veux partir parce que tu en as assez de faire des heures supplémentaires ? Mais ce sera pareil dans la nouvelle boîte. Durant ta période d’essai tu vas devoir travailler un peu plus que la normale si tu veux qu’ils te gardent, et ensuite si tu baisses le rythme, ils vont pas comprendre pourquoi. »

Là j’ai répondu : « on verra bien ». Je voulais ajouter « ta gueule » et « de toutes façons ça pourra pas être pire », mais j’ai fait comme ce que je fais la plupart du temps dans ma vie : je l’ai bouclé et je me suis barré. Je ne suis qu’une ombre qui passe et je vous emmerde.

Sur ce, passons à autre chose.

MégaChef Storitel le raconteur d'histoires

MégaChef Storitel le raconteur d’histoires

Collègue Drache-code

Le pourrisseur officiel de toute librairie, toute classe, toute ligne de code ; passée, présente et à venir.

Je l’ai vu faire, il pisse le code dont il a besoin à l’endroit où est son curseur. Entre ses mains diaboliques, des fichiers sont devenus d’horribles monstres de Frankenstein de plusieurs milliers de lignes et traînant des lambeaux de code mort encore accrochés à leurs commentaires, des fonctions courtoises et prévisibles sont devenues folles à lier et se sont mises à courir frénétiquement sur les murs et au plafond. Une fois, on a appelé un collègue exorciste pour essayer de sauver l’un des projets qu’il avait massacré, le pauvre en a chié dans son froc en continu pendant plusieurs heures.

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Frankencode ?

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Quand je codais, je mettais parfois des commentaires de TODO. Je trouvais ça plutôt correct. Ça permettait d’avancer assez vite et de ne pas trop exploser nos estimations de temps, tout en gardant une trace des trucs faits à l’arrache qu’il faudrait corriger après. (Comprendre : qu’on n’avait jamais le temps de corriger et pour lesquels on priait que ça nous pète pas à la gueule).

Un peu plus tard, j’ai fait découvrir à Collègue Drache-Code la notion de ‘dette technique’ : quelque chose qu’on décide de faire plus tard, ou jamais.

Du coup, il a voulu se la péter en réutilisant le mot que je venais de lui apprendre et m’a dit : « ne met plus de TODO dans le code, ça fait de la dette technique. Tu dois tout terminer bien comme il faut, du premier coup ».

Entendre ça de sa part, c’était très drôle.

Je précise aussi que certains TODO étaient là parce qu’il me manquait des éléments pour finaliser le bout de code (specs, config, données réelles, …), ça ne dépendait pas que de moi.

Bref, j’ai continué de coder en laissant des trucs à l’arrache, et j’écrivais mes TODO, non plus dans le code, mais dans un fichier à part que je gardais planqué dans un coin. Il ne s’est jamais aperçu de rien.

Et curieusement, sa remarque a été utile, car je me suis rendu compte que c’était plus intelligent de centraliser les TODO dans un même endroit. On les retrouve plus facilement, on peut les tagger, les classer, les prioriser. En fait c’est comme un bug tracker. Sauf que je ne pouvais pas mettre mes TODO dans notre bug tracker officiel, puisque Drache-Code les aurait vu et m’aurait dit : « Nia nia nia dette technique ».

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Comme vous l’avez constaté, j’aime citer des phrases amusantes de mes collègues et de mes chefs. Concernant Drache-Code, quoi de mieux que de citer ses morceaux de code ?

foreach (machin in aMachins)
{
    try 
    {
        // ici, Drache-Code utilise le machin.
    }
    catch
    {
        // Ça arrive parfois. On passe au suivant.
    }
}

Il a vraiment écrit un bloc catch contenant uniquement le commentaire « Ça arrive parfois. On passe au suivant ». C’était génial, on était sûr que l’application plantait jamais. Par contre, comme le disait si bien Chef «  » : « ça fait n’importe quoi ». Ah, on ne peut pas tout avoir.

Et au passage, ça plantait quand même, mais pas à cause de ce bout de code en particulier. On va pas chipoter pour ce genre de détail.

6-Mark-36-Nuclear-Explosion

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Collègue Drache-Code a programmé des threads qui faisait tout péter à cause d’accès concurrents sur une même ressource. Erreur classique, ça m’est arrivé aussi. Sauf que moi je m’en suis aperçu au bout de quelques heures. Lui, ce sont les autres qui s’en sont aperçus pour lui au bout d’une semaine, parce qu’il testait jamais rien.

J’étais donc chargé de dépatouiller son bordel de threads. Il me dit, la bouche en cœur : « j’ai un DataSet qui est accédé par un peu tout le monde. Ça vient peut-être de là. Met-le en ‘volatile’ pour voir ».

Un DataSet en volatile ! Mais bien sûr ! Ça va certainement régler d’un seul coup tous nos problèmes d’accès concurrents !

Pour ceux qui connaissent pas, c’est du C#. Je vous explique rapidement.

Un ‘DataSet’, c’est comme une mini-base de données en mémoire RAM. On peut y mettre des tables assez volumineuses, faire des sélections, des tris, des filtres, des jointures entre tables, etc. Ça marche super bien, mais toutes les opérations effectuées dessus ne sont pas atomiques, puisque c’est un objet assez complexe.

Le mot-clé ‘volatile’ peut s’ajouter à la plupart des variables. Il permet de signaler au compilateur que celle-ci sera lue et modifiée par plusieurs threads, et qu’il ne faut donc pas optimiser le code machine qui la manipule sinon ça fait planter.

Le caractère volatile a une influence sur les actions effectuées sur la variable elle-même, mais ne change rien concernant les actions sur le bazar lié à la variable. Lorsque la variable est un type simple (entier, booléen, …), ça ne fait aucune différence. Un DataSet est une référence (un pointeur, pour les gens de la vieille école) vers un gros tas de trucs.

Les actions sur le pointeur en lui-même, on s’en branle. Il doit y avoir tout au plus une affectation initiale. Ce qu’il faut protéger des accès concurrents, c’est tout ce qu’on fait sur le DataSet après l’affectation du pointeur. Pour ça, je ne connais pas d’autres solutions que des locks de partout. Et va donc mettre des locks dans plusieurs milliers de lignes de code pissées aléatoirement ! Ça peut se faire, tout est possible, mais mes chefs me trouvaient des choses à faire qui étaient un peu plus tangibles et dont ils étaient un peu plus sûrs du résultat.

Un oiseau volatile

Un oiseau volatile

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Un truc dont je ne suis pas très fier car c’est quand même un peu de ma faute.

Dans Modeli-Morvax, on voulait ajouter une fonction de clusterisation de persona-pixels multi-dimensionnels. Bon, c’est quelque chose d’assez simple, on en trouve des algos plus ou moins tout fait sur stackoverflow.

Je chope un truc pas trop dégueux, je l’intègre à Modeli-Morvax et le teste sur des petits clusters. Ça marche. Je suis tout fier de moi et montre à Collègue Drache-Code comment ça fait trop joli à l’écran. Sur un ton vilipendieux, il m’interjecte : « tu plaisantes ? Je pensais que tu afficherais des clusters de personnalité entière ! »

Sur le coup, j’ai pas réalisé qu’il était vraiment colère. Mon cerveau a dû faire abstraction de son ton et de ses paroles. Je lui ais calmement répondu que c’était juste des données de tests, et que ça marcherait très bien avec plus de persona-pixels. Il s’est calmé.

Quelques semaines plus tard, les affectations de projet ayant changées (sinon c’est pas drôle), c’était à lui qu’incombait de continuer Modeli-Morvax. Il prend des gros clusters et les balance dans ma fonction. Ça marche pas. J’essaye de comprendre avec lui. Je re-teste la clusterisation de 3 pauvres persona-pixels sur sa version du code. Ça marche pas non plus, ça n’affiche rien. Il me dit que c’est pas grave et qu’il va recoder ça lui-même à partir d’autres morceaux glanés sur stackoverflow. Il y parvient sans problème.

Encore quelques semaines plus tard, les affectations de projet ayant encore changées, je devais afficher des clusters dans un écran tridimensionnel gélatineux. Je reprends son code, l’adapte à la gélatine, et voilà que ‘paf !’ ça se plante en une boucle infinie (on a failli solidifier la gélatine). J’ai repris mon code originel que j’ai vaguement réussi à faire fonctionner. Je parvenais à afficher un cluster sur deux.

Je crois que ça venait de la façon dont on stockait les coordonnées des persona-pixels. Lui les avait ordonné par couleur, moi par densité. Mais je n’ai jamais réussi à comprendre où était réellement le problème. Je ne pouvais pas afficher ses clusters avec ma fonction, il ne pouvait pas afficher les miens avec la sienne.

Mais je n’ai pas non plus complètement réussi à afficher des gros clusters avec ma propre fonction, et c’est pour ça que je ne suis pas très fier de moi.

Malgré tout, je me dis que ma façon de coder et de tester est, dans l’ensemble, plus sécurisée que la sienne. Lorsque ma fonction plantait, elle ne renvoyait rien. Lorsque sa fonction plantait, elle faisait une boucle infinie.

Un nuage de pixel

Un nuage de pixel

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Collègue Drache-Code crée une classe A contenant parmi ses variables membres une classe B, puis il ajoute dans la classe B des appels à des fonctions statiques définies dans la classe A. Ça fonctionne, ce n’est pas une dépendance circulaire (et encore moins une redondance cyclique, hahaha). Mais c’est un peu bizarre.

Ces fonctions statiques étaient assez génériques et méritaient d’être dans une classe statique C, qu’on aurait utilisé un peu partout. La façon dont il l’a fait montrait vraiment qu’il pissait son code là où y’avait son curseur.

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On avait un gentil stagiaire. Un mec plutôt dégourdi, qui avait par ailleurs marqué « musique electro » sur son CV (osef). Il a commencé par récupérer toute notre base de code. Son PC moulinait sa mère à la compiler, quand soudain, boum ! Vautrage comme une otarie bourrée à la bière !

Je ne suis pas plus choqué que ça. Une recompilation complète à partir de zéro, ça marche jamais du premier coup. Même en essayant plusieurs fois de suite, dans le but d’avoir plusieurs ‘premiers coups’.

Le stagiaire m’appelle à l’aide, j’investigue (comme on dit en parler moche), et m’aperçois que les projets qui ont foirés sont ceux sur lequel Drache-Code travaille. Celui-ci m’informe alors de sa joyeuse voix auto-validatrice : « ah oui, j’ai committé des trucs qui compilent pas ».

Je lui rétorque gentiment : « n’est-ce pas le mal absolu par rapport à ce qu’on avait décidé de nos processus de production ? ». Il me répond alors, toujours aussi auto-validatoirement : « je dois sauvegarder vraiment fréquemment car vu la vétusté de mon PC, j’ai peur que mon disque dur crame d’un moment à l’autre ».

Génial ! Du coup tu mets quoi dans tes commentaires de commit ? « Morceau de code qui ne se suffit pas à lui même et dont je ne peux faire un commentaire cohérent » ? Ah non suis-je bête, tu mets rien dans tes commentaires de commit.

La prochaine fois, chers ex-collègues de Zarma.pro, vous utiliserez git ou mercurial et vous ferez des branches, bandes de paltoquets. Vous aimez faire les bûcherons, vous devriez aimer les branches, non ?

git merge *

git merge *

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Et on va finir par des expressions rigolotes, pas en code, mais en langage naturel.

« L’application a besoin d’être stabilisée. »

Moui… Pour moi, une application est soit finie, soit pas finie, soit buggée. Mais ‘instable’, c’est vraiment bizarre. Ça sonne encore pire que ‘buggée’. On sent l’aléatoire, on sent le « ça fait n’importe quoi ».

On peut faire des conneries quand on code, j’en fais plein. Mais on ne fabrique jamais quelque chose ‘d’instable’. La seule fois où ça m’est arrivé, c’est parce que je dépendais d’éléments tierces et c’est eux qui étaient instables (notre fameux middleware tantrique de merde dont j’ai parlé dans l’article précédent).

« Ça pète de partout !  »

« Ah ouais, il se merde. » (En parlant d’un truc qu’il a codé et qui plantait).

De jolis cris de détresse. À nouveau, on sent la notion de hasard complet, le fait que tout ce qui arrive semble être complètement fortuit. C’est pas vraiment de sa faute, ce sont des éléments qu’il ne maîtrise pas et qui semblent être doté d’une volonté propre. Drache-Code créait des programmes qui finissaient par être vivant.

« Je ne fais pas de démo, parce que ça marche jamais au moment de la démo ».

Ça, je peux comprendre. Le fameux ‘effet démo’, je me le suis pris dans la gueule plusieurs fois, dont des fois où c’était entièrement de ma faute. Mais ce genre de phrase, il ne faut pas l’annoncer directement à un Client ! Qui plus est un Client potentiel qui veut savoir ce qu’on crée, et à qui justement on n’a encore jamais fait de démo.

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To be continued

J’ai encore un package de chose à dire, et je mentionnerais un peu comment ça se passe dans la nouvelle boîte (toujours aussi bien pour l’instant, mais je reste prudent). À bientôt !

Magazine 42 numéro 33 : pro-crasse-thym-nation

Je suis désolé.

Vous ne savez pas encore pourquoi, mais pour me faire pardonner, voici déjà une jolie image.

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Or donc, je suis désolé, rapport au thème du dernier magazine 42 (http:// 42lemag.fr/).

Il était vraiment génial. C’était du sur-mesure pour moi, qui peste toujours de ne pas avoir assez de temps pour faire ce que je veux, qui souffre de ne pas pouvoir concrétiser toutes les choses bizarres qui sautillent dans ma tête, qui vilipende la réalité et le monde du Travail chronogâcheur, qui promet toujours moults articles dans ce blog pour les faire ensuite avec 6 mois de retard voire jamais.

Ce thème, c’était la procrastination. Une occasion rêvée de compiler, structurer et argumenter en un bel article, tout ce que je raconte en boucle dans ce blog depuis qu’il existe.

magazine 42 couverture du numéro 33

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Eh bien je ne l’ai pas fait. Devinez pourquoi ? Parce que je n’ai pas réussi à trouver le temps de le faire. Superbe ironie n’est-ce pas ? Ne pas avoir écrit d’article sur la procrastination parce qu’on l’a trop souvent remis au lendemain. Ah Ah Ah.

Je suis obligé d’être re-désolé pour ce trait d’humour un peu téléphoné. Procrastiner une action relative à la procrastination, c’est une blague digne de Bibi Laberlue. D’ailleurs, par convention, vous la trouverez dans l’édito et la couverture du magazine. Tagadzim !

J’aime bien m’auto-flageller, pour qu’ensuite les gens puissent me plaindre et me dire que « non, c’est pas grave, c’est pas de ta faute ».

De plus, pour cette fois, c’est vraiment pas de ma faute. J’ai gaspillé une bonne partie de mon temps libre des 15 dernières semaines à coder, de chez moi, une application hyper poussée de détection de similitudes entre coordonnées karmagraphiques. Ça m’a bien fait chier parce que c’est pour mon boulot. D’un autre côté, ça m’a vraiment intéressé de le faire. C’est de l’algorithmique pur. Le tout en python, évidemment.

coord-karmagraphie

Malgré tout…

… j’ai pas fait que procrastiner de tout mon temps libre. Je suis parvenu à réaliser deux petites mignardises pour ce numéro 33. Les voici.

Page 29 : jeu moisi. Le diagramme de Glandtt.

Le nom est transformé par besoin de lol, mais en vrai ça s’appelle « diagramme de Gantt ». Il s’agit d’un truc idiot qu’on apprend à l’école de n’ingénieurs, et qui est également présent dans les supers logiciels de gestion de projet. (Wouhou ! « Gestion de projet », rien que de le dire, je bande). Ça permet de savoir dans quel ordre effectuer des actions, lesquelles peuvent être parallélisées, à quel moment on a besoin d’une ressource particulière, etc.

Bien évidemment, on part du principe que le temps de réalisation de chaque tâche a été correctement estimé. Or, c’est ce qui est le plus difficile à faire. Personne ne le dit, ni à l’école, ni ailleurs (seul Douglas Hofstadter l’a compris, se référer à sa loi récursive). Par conséquent, ces pauvres gentils petits dessins plein de cases et de flèches tombent lamentablement et systématiquement à l’eau. Mais les supers chefs de projet continuent d’y croire, c’est beau.

Le jeu moisi que j’ai fait est donc un diagramme de ce type, sauf qu’il sert à organiser de la glande, au lieu de du Travail. Y’a qu’à ça que ça peut réellement servir. Organiser la glande, c’est quelque chose de vraiment utile. Il m’a donc semblé important de faire une initiation à ces diagrammes, sous forme de jeu.

Work. You are doing it wrong.

« Work » : you are doing it wrong.

Gantt est-ce qu'on mange ?

Gantt est-ce qu’on mange ?

Page 60 : roman-photo. Pinocchio touche du bois.

Pas plus, pas moins de débilité que dans mes romans-photos précédents. Il n’y a pas vraiment de message sous-jacent, à part l’habituel : « travailler, ça sert à rien et ça va vous tuer », que je rabâche ici et ailleurs, encore et encore.

En fait, si, il y a un message sous-jacent. J’ai dit que y’en avait pas pour donner un effet de surprise.

L’histoire de Pinocchio est une métaphore de l’enfant devenant adulte grâce à l’apprentissage et la découverte du monde. Eh bien moi, ce que j’ai voulu dire, c’est que devenir adulte c’est pas si cool, et que retomber en enfance, c’est un plan de carrière envisageable. D’ailleurs y’a plein de vieux qui le font, ce qui prouve bien que c’est un aboutissement de vie professionnelle cohérent et possible.

Voilà. Et sinon, je tiens à dire que trouver des images de Pinocchio sur internet, c’est facile, mais des images de Pinocchio en vrai petit garçon, c’est une autre paire de bretzels. Ah ça, pour montrer des chats qui s’enculent à la chaîne, internet, il est là. Mais dès qu’on veut quelque chose d’un peu plus subtil et spécifique, y’a plus personne. Feignasse d’internet.

Pinocchio  Bite en bois. C'est quoi l'adjectif pour un rapprochement facile à faire mais qu'on s'en voudrait de ne pas faire ?

Pinocchio – Bite en bois. C’est quoi l’adjectif pour un rapprochement facile à faire, mais qu’on s’en voudrait de ne pas avoir fait ?

D'aucun pensent que devenir adulte doit passer par une étape de ce genre. Je vous laisse juge.

D’aucuns pensent que devenir adulte doit passer par une étape de ce genre. À vous de décider.

Et c’est tout. Dans ce numéro 42-33, je n’ai même pas écrit de vrai article avec du texte. Sur ce, je vais me cuisiner une bière au micro-ondes. Quelqu’un en veut une ?

introduction à la karmagraphie

Un peu d’histoire

Première Conjecture de Goblavanala Rashpurlamharad :
Toutes les informations possèdent une valeur de karma.

bollywood

Goblavanala Rashpurlamharad, inventeuse de la karmagraphie.
Là, elle est à une conférence-beuverie d’éminents chercheurs.

Le mot « information » est ici à prendre au sens large, en tant qu’objet ou groupe d’objet du Monde Des Idées. Cela inclut : l’esprit d’un être vivant, les œuvres d’art, les souvenirs, les mots, les concepts, etc. Pour faire savant et pro, on utilise l’appellation « objet informationnel ».

La Deuxième Conjecture, on s’en fout un peu. Je vous la met ici juste pour la culture générale :
Pour qu’une information puisse avoir une influence dans un univers, elle doit exister, en au moins un exemplaire, dans l’univers lui-même, sur un support en accord avec sa physique.

Forte de ces découvertes, Goblavanala décida de ne pas progresser dans ses recherches, car elle venait de décrocher un petit rôle dans une production cinématographique. Elle eut son petit succès dans les années 50, et coule maintenant des jours paisibles en tant que rentière culturelle.

Quelques années plus tard, les ordinateurs et la théorie de l’information arrivèrent avec leur gros sabots, et annoncèrent en grande pompe que le karma, au même titre que tout le reste, pouvait s’exprimer sous la forme d’une suite d’octets. C’était super, sauf que ça nous avançait pas plus que ça.

grande pompe

La grande pompe utilisée pour l’annonce.
En fait c’est un modèle 3D fait sous Blender, sauvegardé dans le monde réel.

Évidemment, y’en a qui se sont amusés à dire que puisque le karma est une information, et que toutes les informations possèdent une valeur de karma, alors chaque valeur de karma possède une valeur de karma. Ha ha ha. Douglas Hofstadter trouve qu’il trouve que cela est cool.

Cependant, le problème principal subsistait : comment, techniquement, mesurer une valeur de karma ? Et surtout : à quoi ça pourrait servir ?

Après les conjectures, un peu de sérieux

Arriva alors celui qui allait devenir le père de la karmagraphie (on avait déjà la mère, voilà le père, mais ils n’ont jamais fait de cochonneries ensemble, la karmagraphie étant une immaculée conception).

Il s’agit de Tavaldlav Odkazapriba, ouvrier-bibliographe, qui travaillait la nuit tous les soirs dans sa chambre, entouré de petites sculptures amicales fabriquées avec du porridge.

russe Georgi Vitsin

C’est lui. Là il est à une conférence-beuverie organisée par lui-même, à laquelle il était le seul invité.

Principe de Tavaldlav, confirmé par plusieurs expériences :

Le karma d’un objet informationnel quelconque est un simple point, situé dans un espace imaginaire d’une infinité de dimensions.

Certains karmatologues pensent que cet espace est Le Monde Des Idées en lui-même, mais ça reste une hypothèse.

Grâce à ce principe, la karmagraphie put se développer, et mérita entièrement sa qualification de Science.

Méthodes de mesure

Il est actuellement impossible de déterminer les coordonnées absolues d’un point de karma, mais on peut calculer des distances.

Eurod’, mon collègue de travail (diplômé de karmatologie de l’université de Prout) m’a expliqué la méthode. Je vais essayer de vous la résumer ici.

Lorsqu’on mesure les ondes cérébrales d’une personne, on peut en déduire une projection de son point de karma, sur un espace à dimension finie. C’est bien, mais comme c’est jamais projeté sur les mêmes dimensions d’une mesure à l’autre, ça ne sert pas à grand-chose.

Heureusement, il y a une astuce : en mesurant la résonance des ondes cérébrales émises par 2 personnes, et à l’aide de quelques bidouilles calculatoires ésotériques, on obtient la distance karmique entre ces personnes.

Je sens une question poindre dans votre petit cortex tout électrifié. Si le nombre de dimensions est infini, la distance entre 2 points a de grande chance d’être infinie, elle aussi. Du coup, qu’est-ce qu’on peut bien en faire ?

Votre cortex a tout à fait raison. Les karmatologues s’en sortent avec une seconde astuce, d’ordre mathématique. En effet, il existe des infinis plus grands que d’autres. Pour les comparer, il suffit de les représenter sous forme d’une division par zéro. Une distance karmique de 5000/0 est plus grande qu’une de 0.0001/0.

Karma Komba 320

Vue d’artiste du Monde des Idées : une éponge verte infinidimensionnelle, représentée par une infinité d’éponge verte bidimensionnelles.

Pour mesurer la distance karmique entre une personne et un objet informationnel « inerte » (chanson, texte, feuille d’impôt, …) il faut procéder autrement, puisqu’un objet inerte ne génère pas d’ondes cérébrales.

Lorsqu’une personne consulte un objet informationnel, ses ondes se modifient légèrement. D’éminents savants ont mesuré cette écart, et ont tenté d’en déduire un point de karma, mais ça n’a pas fonctionné.

Ça paraît évident maintenant, mais sur le coup, ils étaient perplexes. En fait, cette mesure d’écart ne permet que d’obtenir une projection du point de karma de l’objet informationnel inerte.

Il faut deux personnes. On commence par mesurer leur distance karmique. Ensuite, l’une des deux consulte l’objet informationnel, mais pas l’autre. La résonance d’ondes cérébrales change un peu, donc la distance karmique aussi.

B comme BoxSons Bad Idea The Killers

Les premiers karmamètres. Oui c’était un peu encombrant.

Le changement de distance entre les deux personnes, avant et après consultation, donne une approximation de la distance karmique entre la personne ayant consulté l’objet informationnel, et l’objet lui-même.

Vous l’aurez deviné, tout cela reste très approximatif, car le point de karma d’une personne est toujours plus ou moins en mouvement : selon son humeur, qu’elle ait fait caca le matin, la météo, etc. Pour le moment, on n’a pas de meilleur technique.

Cas des distances finies

Dans certaines situations bien spécifiques, une distance karmique peut être finie. C’est à dire qu’il y a un nombre infini de coordonnées égales entre elles, et seulement quelques unes de différentes. On passe d’un point à l’autre grâce à un simple mouvement de translation.

Ce phénomène n’a pu être observé que dans deux cas :

  • Entre une œuvre d’art et son créateur. Et encore, au bout de quelques années, le point du créateur a bougé, et la distance peut devenir infinie. Ça s’appelle l’effet « Quoi ? C’est moi qu’avais fait ce truc là ? Je m’en souviens même plus. »
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Les distances karmiques entre cette photo, et les deux femmes qui sont dessus, sont finies. Mais la distance entre les deux femmes est infinie. Bizarre n’est-ce pas ?

  • Entre deux nouveaux-nés d’une même espèce. Là encore, ça s’éloigne très vite et devient infini au bout de quelques minutes de vie. Certains chercheurs pensent que la distance est également finie entre deux nouveaux-nés de n’importe quelle espèce, mais cette proximité ne durerait que quelques microsecondes. S’ils parviennent à le prouver, les répercussions seraient très importantes. Cela impliquerait qu’il existe un point de repère absolu pour le karma. Une sorte d’origine.
singes dans une brouette

Poilu, Dormeur, Tripote-Mascagne, Picassiette, Jean-René-Robert-Tolkien, R2D2, Igor et Grichka : les singes ayant permis de découvrir le 2ème cas de distance finie.

Tout cela est bien joli. Mais quelles applications concrètes y’a-t-il à cette discipline scientifique de haut vol ?

Plein ! En fait, la plupart des appareils que vous manipulez font appel à la karmagraphie, sans que vous vous en rendiez compte. Je donnerais divers exemples dans un prochain article. Là, faut que j’aille boire du champagne, afin de me donner l’illusion que ma vie est super.

Et entre temps, je vous ferais mon article récapitulatif de 42. Une fois de plus, je suis en retard là-dessus.

Unrelated pic, mais c’est pour respecter mes quotas blogaliens de femmes rondes.

Introduction à une introduction à la karmagraphie

Aujourd’hui (ou plutôt la semaine dernière) (ou plutôt il y a 15 jours, le temps que je finisse cet article), Eurod’ et moi, on s’est fait engueuler par Random. Selon ce dernier, il semblerait que nos journées de Travail ne soient « pas optimisées », parce que « on discute trop ».

Eurod’, c’est mon collègue. Il s’appelle comme ça parce qu’il est fan d’Eurodance. Il met la radio pendant qu’il bosse. Moi ça me dérange pas, rappelons que je suis un inconditionnel d’Ace of Base. Mais du coup, on se fait régurgiter les mêmes chansons plusieurs fois par jour dans nos pauvres oreilles, jusque à ce que les circonvolutions en soient tellement sales qu’elles se collent entre elles. C’est assez peu ragoûtant. Toutes les radios font ça, qu’elles soient web ou à ondes, j’ai jamais compris pourquoi. Le patrimoine musical Eurodance est suffisamment bigarré, éclectique et foisonnant pour qu’on y trouve facilement 24 heures de chansons excellentes sans doublons, non ? Enfin ce n’est pas le sujet.

Ace of Base

« L’amour est mon moteur, et tu dois être du carburant ».

Random, c’est notre chef. Il s’appelle comme ça parce que son état « bien ou mal luné » est totalement soumis au hasard. Attention, il s’appelle bien « Random », et non pas « Random() ». Ce n’est pas un simple appel à la fonction, mais la fonction elle-même. Enfin, ce n’est pas le  sujet.

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« Mal luné » : une expression à la con.

Et donc quand Random a sorti cette remarque, j’ai voulu répondre que nos discussions avaient pour sujet notre Travail. Le vrai Travail : le sérieux, le couillu, le viril, celui pour lequel on me donne un salaire pharaonique, celui pour lequel « je me lève le matin ».

C’est faux, je me lève le matin pour un salaire de serf, et rien n’est couillu nul part, mais ce n’est pas le sujet.

Random ne m’a pas laissé le temps de finir ma phrase, il m’a balancé que c’était « des discussions inutiles », et que « mes états d’âme sur le C++, on pouvait s’en passer ».

C’est assez étrange. Il aurait pu riposter de manière bien plus simple, en arguant que nos discussions ne concernent pas à 100% le Travail. Et ce serait la vérité.

Je tiens toutefois à préciser que c’est pas de ma faute si on parle pas à 100% de Travail. C’est 100% la faute à Eurod’. Moi, de manière générale j’aime pas trop discuter, parce que j’aime pas trop les humains. Mais ce n’est pas le sujet.

Bref, voilà. Random a décidé de m’attaquer sur mes états d’âmes C++iens, je l’ai mal pris, et je considère cela comme une insulte et un affront. (Qui ne saurait se laver autrement que dans le sang, mais on ne va pas le faire).

Voyez-vous, je suis chercheur du CNRS en geekologie, moi. Je connais plus de 15 langages de programmation différents, moi (dont le glapumBasic, qui ne possède qu’une seule instruction, et c’est une grossièreté). J’étudie la sémanticologie, la syntaxologie, la grammaticologie, moi. J’ai écrit un article scientifique sur l’expression du vide, moi. J’ai dressé une taxonomie des méthodes d’échanges de A et B, moi. J’ai créé un langage permettant de coder en alsacien, moi (basé sur le C++, au passage). J’ai découvert que « Vulture repellent doesn’t work », moi. Et bien d’autres choses encore, moi.

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Alors mes états d’âme sur le C++, ça constitue une analyse ontologique fine, détaillée et pertinente, que beaucoup d’autres chercheurs du CNRS seraient prêts à tuer père et mère le prix fort pour l’avoir. Capito ?

Comme vous êtes gentils et que vous êtes sur mon blog, je vous résume rapidement cette analyse. Ainsi, vous aurez seulement à tuer votre chien le prix moyen pour l’obtenir. Ça vous va ? Oui ? Merci, vous êtes des gens géniaux et gentils, et j’aime bien être avec vous dans ma tête.

Mon analyse du C++

Il s’agit d’un vieux langage. C’est pourquoi il ne possède pas tous les raccourcis syntaxiques dont on a l’habitude maintenant. Je rappelle qu’il faut écrire deux fois la même chose, respectivement dans le .c et le .h, que les chaînes de caractère sont implémentées de plusieurs manières différentes, et qu’on peut préciser qu’un caractère est signé ou non signé, ce qui n’a aucun sens.

Métaphoriquement parlant, le codeur C++ est donc une sorte de moine tibétain solitaire perdu au milieu des paysages aride de la taïga russe. Le fait qu’il puisse y avoir d’autres moines solitaires autour de lui ne le rend pas moins solitaire.

moine

#define FALSE TRUE

Pour autant, ce langage conserve son utilité. Notamment dans les cas suivants :

  • lorsqu’on veut « rester proche de la machine » (ce n’est pas sale)
  • dans le cadre de la réalisation de micro-contrôleurs de tondeuses à gazon
  • à des fins pédagogiques, pour expliquer « ce qui se passe sous le capot ».

En revanche, programmer à un haut niveau d’abstraction, manipuler une interface graphique riche, ou bidouiller de la communication complexe de web service, tout cela en C++, c’est complètement crétin. Et le fait que ce soit du Microsoft Visual C++ millésime 2048 n’arrange rien à l’affaire, voyez-vous.

Random m’a reproché d’exprimer cette vérité, alors que j’en avais besoin pour m’exutoirer cathartiqement. J’ai mal pris ce reproche et c’est ce que j’ai voulu raconter ici, afin d’exutoirer cathartiquement le fait que je n’ai pas le droit de m’exutoirer cathartiquement sous prétexte que c’est « pas optimisé de dedans le Travail ».

C’est tout ce que je voulais dire et je ne me sens pas très bien.

Ce n’est pas tout ce que je voulais dire et je ne me sens pas très bien.

Car je dois malgré tout reconnaître que, dans ce nouveau boulot qui est actuellement le mien, je jouit d’un gros mieux, à savoir :

Le Métier

metier à tisser patrimoine

Métier complètement con, ou quoi ?

Que veux-je dire par là ? Quel est ce nouvel venu dans notre vocabulaire ?

Les informaticiens n’ont pas de Métier. Leurs compétences et leurs savoir-faire ne méritent pas d’être inscrit dans l’encyclopédie de Diderot et D’Alembert. Ce ne sont que des geekeries absconses de gamins attardés qui n’ont pas grandi.

Les informaticiens sont au service d’autres gens, qui eux, ont un vrai Métier. Quelque chose dont ils sont fiers, quelque chose de couillu, de viril, le truc pour lequel ils « se lèvent le matin ».

Bull Humps Donkey Bull Humps Statue

Une allégorie de la virilité du Travail.

Parfois, le vrai Métier des vrais gens auquel l’informaticien se met au service est chiant. C’était le cas de mon ancien boulot, avec les tondeuses à gazon, machines à laver, accélèromètres, et autres trucs que je savais même pas ce que c’était, je ne reviens pas dessus.

Et parfois, le Métier est fun, rigolo et intéressant. C’est le cas de mon boulot actuel. Je fais des applications informatiques orientée karmagraphie. Ça ne m’empêche pas de trouver le boulot chiant et privateur de liberté, mais ce ressenti personnel s’applique à tous les boulots, et à la notion de Travail en général.

Bref donc, la karmagraphie est un métier rigolo. Et maintenant que je l’ai découvert, je peux me fendre d’une petite

intro-

duction

à la

karma-

graphie

Sauf que je vais pas la faire tout de suite car j’ai pas le temps. Ce sera le prochain article !

The Temptations To Be Continued 86

To be continued, comme disent les Jackson Five.

Et vu que je viens de mettre des gens avec des belettes en guise de coiffure, et que mon nouveau l’ami de l’internet voulait une alternance belette/nichons, voici l’autre moitié de l’alternance. Moitié qui est constitué d’une double dose de nichons, donc 4.

tumblr_m1uyvijxiN1qcru98o1_400 Nadine Jansen Milena Velba

Mmmrrrrppppffflllmmmm !!!

À bientôt !