Medley d’événements corporates

Cet article sera bourré d’incohérences, encore plus que d’habitude, car il est inspiré de plusieurs événements. Ils se sont tous déroulés il y a plus de deux ans, ne soyez donc pas choqués s’il n’y est fait aucune référence à des masques ou des virus.

L’un de ces événements inaugure le démarrage du projet POILS_PUBIENS. À cette époque, nous n’étions que 4 :

  • Chef NightWish. Pouvoirs spéciaux : balancer des liens vers des docs en croyant que ça va automatiquement résoudre un de nos blocages techniques. Dire « on n’a pas réussi à faire telle chose » pour dire « tu n’as pas réussi à faire telle chose ».
  • Semi-Chef Lucene-Lapin. Pouvoirs spéciaux : travailler la nuit et dormir le jour, déclencher des « réunions coup-de-poing », coder des projets persos clients lourds en PHP (wtf ?). Son titre de noblesse a fluctué d’un article à l’autre : « Collègue », « Chef », etc. On va dire qu’il est Semi-Chef.
  • Collègue DocteurMaboul. Pouvoirs spéciaux : écrire de la documentation en LATEX, faire des présentations avec des images rigolotes hahaha.
  • Et moi, bien sûr.

Petit zoom sur Collègue DocteurMaboul, mon meilleur collègue de tous les temps et de toutes les boîtes où j’ai été :

  • Il gueule contre les chefs afin d’obtenir des avantages, pour lui-même et pour l’équipe, ce dont je suis incapable en tant que SuperFlamby.
  • Il lèche les bottes de ses collègues et encense le moindre petit morceau de travail produit, ce que j’aime en tant que SuperEgo.
  • Il glandouille et ne travaille que sur les sujets qui l’intéressent, au point de déformer l’espace glandique local, masquant ainsi les glanderies moins prononcées des collègues situés à proximité, ce qui m’intéresse en tant que SuperGlandeur.

C’était mon collègue-fusible. Je me disais : « tant qu’il est là, je peux glander un peu puisque de toutes façons je glanderai jamais autant que lui ». Spoiler alert : le fusible a pas tenu.

L’événement se déroule en Sicile, dans une villa isolée du monde extérieur. Nous y crécherons pendant 4 jours, l’objectif étant d’élaborer le « Business Model Canvas » du projet.

Phase 1 : on collecte des slips…

Petit rappel concernant POILS_PUBIENS : il s’agit d’une gamme d’application cosmologiques ayant pour sacerdoce de lutter contre les distortions spatio-temporelles de l’univers, sur tous les plans d’existence confiés par nos clients, afin d’empêcher un débordement de chaos. C’est un outil parmi d’autres dans ce passionant métier qu’est le maintien de la réalité, mais nous avons vocation à en faire un outil central qui recueillerait les détections de paradoxe génériques des autres outils.

Comme cet article est un medley, en même temps qu’on est 4, on est aussi une quinzaine de personne, mais l’événement va durer une seule journée et une seule nuit. La nuit sera longue…

Un nombre conséquent d’embauche a été récemment effectué, nous ne nous connaissons pas tous très bien. Nous avions donc pour consigne de préparer des petites présentations de nous-mêmes. Les collègues front-enders ont osé un Power Point ironico-dégueulasse rose fluo + WordArt arc-en-ciel + gif animés de dancing banana. Sa confection leur a pris une bonne demi-journée.

De mon côté, j’ai recensé des hobbys et des passions de chaque collègue, afin d’obtenir un joli graphe connexe (les collègues A et B aiment l’aquafootball, les collègues B et C aiment collectionner des images de nichons, etc.). J’ai ensuite créé un petit jeu dans lequel il faut retrouver toutes les associations hobby-personne. Je ne peux pas vous le montrer car il révélerait des choses trop intimes. Mais je l’ai recyclé en un jeu-hommage à Eye of the Beholder, décrit dans cet ancien article, et jouable par ici.

J’ai aussi demandé un petit créneau pour jouer un sketch de mon crû sur le langage python. Oui, on peut faire des blagues avec du code.

Patchwork narratif du matin

L’événement est situé à quelques lieues du Travail. Chef NightWish nous a laissé nous organiser pour le trajet, avec l’obligation d’arriver au plus tard à 12h30. Sous-entendu : « le matin vous bossez normalement, parce que les événements corporate faut pas en abuser. En partant vers 11h, vous serez large pour arriver à 12h30 ».

On part dès 9h. Chef NightWish tire la tronche. On fait semblant de rien et on s’éclipse.

On débarque tranquille dans la maison-villa AirBnB. La gérante nous fait visiter. Elle est un peu âgée, avec des seins énormes. Pour de vrai. C’est pas moi qui le fantasme.

Des collègues installent du matos musical (sono, guitare, piano électropsychédélique et autres fatras). Vous verrez bientôt pourquoi.

Concernant la boustifaille, nous avons chacun été affecté à un poste précis. Collègue Aquafootball, autoproclamé « roi du barbeuk », s’est proposé pour les saucisses du soir. Il se nomme ainsi car c’est un grand supporter de l’équipe locale d’aquafootball chilien, le sport populaire de la région.

J’ai personnellement opté pour la salade-tomate-mozzarella, du soir aussi. Je peux donc glander.

J’aurais aimé distiller dans cet article une ambiance glauque et effrayante : la villa sicilienne est hantée, on entend des bruits, des personnes disparaissent, on ne peut plus repartir car la voiture est en panne, etc. Mais la matière ne s’y prêtait pas. Les deux points les plus dérangeants de la maison sont :

  • la disposition des toilettes : juste à côté de la cuisine. Si ça ne tenait qu’à moi, on serait toujours à moins de 20 mètres d’une chiotte partout dans le monde. C’est important. Mais de là à avoir un accès direct aux chiottes depuis la cuisine, une limite a été franchie.
  • Une absence de moyen acceptable de faire du café. Nous disposons d’un récipient bizarre dans lequel il faut tout mettre en vrac (eau et café moulu), puis nous devons appuyer tout doucement sur un piston afin de séparer le café liquide du café moulu. Ça ne marche pas. Nous mâcherons du café pendant 4 jours.

On pose notre fatras informatique dans la salle principale. Entre temps, Chef NightWish est arrivé. Comme il s’y croit à fond, il annonce avec un corporatisme empreint d’ironie que cette pièce sera la « War Room ».

Collègue Aquafootball teste la tireuse à bière. Je discute du projet annexe Arcanciel avec Stagiaire SuperCSS.

Le projet annexe Arcanciel est un truc de dingue, développé en partenariat avec la Zuzu Academy (l’université gratuite de Marc Zuckerberg). Comme vous le savez, l’œil humain ne distingue pas toutes les couleurs, or certains bugs de réalité ne se voient que sur certaines longueurs d’onde chromatique bien spécifiques. Arcanciel est un framework javascript permettant de convertir les couleurs d’un type d’œil vers un autre. Vous pouvez afficher une image telle que vue par un daltonien deutéranope, ou bien vue par un chien qui veut savoir comment voient les yeux d’une mante de mer, etc. C’est énormément de code, avec des calculs ultra-optimisés.

Tout le monde est là, c’est le moment de montrer notre surprise à Chef NightWish, car c’est son anniversaire ! Nous lui offrons une interprétation de la chanson « Something Wrong » du groupe islandais Bang Gang, avec des paroles personnalisées pour lui. Il a une petite larmette pendant notre prestation.

Bang Gang : meilleur groupe du monde, meilleur nom de groupe du monde, va te faire foutre la SEO.

C’est Semi-Chef Lucene-Lapin qui s’est occupé des paroles. Il avait inévitablement déclenché une « réunion-coup-de-poing » pour en faire part au reste de l’équipe, avec réservation de salle et tout. J’étais un peu gêné. Des gens passaient dans le couloir et voyaient à travers la vitre un texte humoristique projeté sur grand écran.

Ça lui avait pris deux demi-nuits. Ce mec peut travailler des nuits entières sur des documents sérieux, puis d’autres nuits entières sur des trucs complètement aléatoires tels que des énigmes amusantes proposées par des collègues (pour une fois c’était pas moi). La journée, il m’appelle pour me narrer ce qu’il a fait de ses nuits (le sérieux ET l’aléatoire). Toutes ces heures passées au téléphone… Je les rentabilise en cassant des amandes, le téléphone sur l’oreille. J’en ai des pleines boîtes à chaussures, que je cueille chaque année sur les amandiers poussant autour de chez moi.

Et donc, cette performance chantatoire est la raison pour laquelle nous étions partis en avance. Nous devions installer le matos sans que Chef NightWish ne nous voit. Je ne suis pas sûr qu’il l’ait réalisé. Pour tous les domaines qu’il connait un minimum (entre autres, l’informatique et la musique), Chef NightWish croit systématiquement que chaque action « ne prendra pas plus de 5 minutes ». On retrouve ce caractère chez beaucoup de chefs.

De plus, il faut bien l’avouer, l’installation n’a pas pris énormément de temps. En tout cas, c’est sûr que ça ne nécessitait pas la contribution de tout le monde, puisque j’ai glandé pendant que d’autres s’y attelaient.

Pour finir cette matinée : repas classe et équilibré préparé avec amour par les collègues assignés à la bouffe du midi.

Moi pendant que les autres travaillaient.

Gloubiboulga récitatoire de l’après-midi

Séance de réflexion sur le Business Model Canvas et ses schémas annexes : Customer Journey Map, Economic Canvas, Environmental Canvas, Disruptifier Bullshit Canvas, etc. Vous connaissez le principe : on écrit un truc sur un post-it et on le colle sur un des schémas.

J’adore les pitreries corporate, mais j’ai beaucoup de mal à y garder mon sérieux. J’ai des idées de post-it que je trouve pertinentes, mais je ne peux m’empêcher de les présenter de manière débile. Par exemple, j’écris : « les lois étendues de conservation de la réalité physique, on n’y comprend rien ! ». Chef NightWish est obligé de dédébiliser le propos et de le remplacer par : « manque de connaissance théorique de l’équipe technique ». C’est pas très gentil de ma part et ça ralentit l’avancée de la réflexion, mais moi je me marre.

Le groupe de travail voisin, dans lequel officient Semi-Chef Lucene-Lapin et Collègue Aquafootball, a adopté la technique du pastis-post-it. Un post-it collé, un pastis, un post-it collé, un pastis, etc.

De manière prévisible, la War Room devient un océan de post-its aux couleurs criardes et entropiques.

Chef NightWish : « Nous ne devons pas hésiter à remettre en question ou casser des choses établies depuis des années. En gros : soyez punks ! ».

Des post-its punks.

Il nous donne comme exemple Elon Musk avec sa société SpaceX. La NASA imposait une gargantuesque liste d’exigences pour je-ne-sais-quel outil de navigation. Une seule entreprise au monde était capable de les fabriquer et les vendait à un prix stratosphérique (amusant pour un machin censé aller dans l’espace). Mumusk a pris un iPad, a (fait) effectuer une gargantuesque liste de tests pour prouver qu’il répondait aux exigences exigées, et c’est passé. Comme quoi il existe des appareils qui se vendent à un prix encore plus stratosphérique que le prix déjà bien stratosphérique d’un iPad.

Je reprécise que les événements corporates narrés ici datent de plusieurs années, Mumusk avait encore à peu près la cote auprès de la population humaine, Twitter gazouillait innocemment des propos d’une toxicité variable.

Vient alors le moment de faire nos auto-présentations. L’horrible & glorieux Power Point fait sensation. Collègue Aquafootball, alcoolisé par les bières et le pastis-post-it, commence à raconter n’importe quoi de plus en plus fort. Semi-Chef Lucene-Lapin trouve notre show très goleri, ha ha ha, mais aurait surtout souhaité une liste de nos compétences techniques : qui sait faire du python, du front-end, du big data, de la colorimétrie karmagraphique, … Ah oui, c’eut été intéressant.

Petite pause autorisée, avant de se remettre en groupe de travail pour préparer la restitution finale de nos post-its. Quelques personnes jouent au jeu des hobbys. Cool. Collègue DocteurMaboul entraine son groupe (dont moi) dans la méga-piscine de la maison. Le temps de pause file comme le vent. On revient à l’arrache, plus ou moins rhabillés et les cheveux dégoulinants. La restitution risque d’être un peu légère.

Dans une autre réalité, Chef NightWish nous présente le « Manifeste de la Bienveillance de POILS_PUBIENS ». Sur ce document est gravé en lettre de feu que nous devons être gentil, ne pas nous pourrir mutuellement et ne pas répéter ce que dit un collègue en prenant une voix de débile pour se moquer. Collègue BarryWhite met en doute la réelle utilité d’un tel texte. Chef NightWish répond que dans d’autres boîtes, il a vécu des moments où des ardeurs testostéronesques inter-collègues furent désamorcées grâce à quelqu’un qui montra du doigt le manifeste local placardé au mur.

Collègue BarryWhite continue d’émettre des doutes. Il est à la limite de se foutre de la gueule de Chef NightWish. Je lui réponds que dans le respect du Manifeste, on ne doit pas se foutre de la gueule des autres, y compris au sujet du Manifeste lui-même.

Collègue BarryWhite se nomme ainsi car il a le physique inverse de BarryWhite, tout en ayant sa voix. C’est assez troublant.

Le Manifeste.

Dans une autre réalité, un tournoi de paintball est organisé. Le gagnant remportera un coussin-peluche à l’effigie du logo de notre projet. Je suis l’un des plus mauvais, dans l’équipe la plus mauvaise. Ça me rappelle une partie de Laser Quest que j’avais disputé contre des gamins de 8 ans. J’étais arrivé avant-dernier. Évidemment, si ça avait été un tournoi de Clash of Codes, je leur aurai tous dévissé la tronche.

Malgré tout, je reste fair-play, en particulier lorsqu’une personne d’une autre équipe se vautre devant moi telle une otarie bourrée à la bière et se flingue le genou. Je m’enquiert de son état et ne lui tire pas dessus à bout portant. J’ai dû me faire violence, car cette personne est une autre fan d’aquafootball chilien, mais de type reloue. Elle arrête pas de fanfaronner chaque fois que son équipe gagne. Insupportable.

Chef NightWish n’est pas dans l’équipe la plus mauvaise, mais il est le plus mauvais. Ça finit par le gonfler d’arriver à rien. Dans les dernières minutes, il court dans tous les sens en rafalant aléatoirement et en insultant les mères de tout le monde.

Il est un peu essouflé et un peu rouge au moment de remettre le trophée à la personne gagnante (je ne sais plus qui c’est).

Saurez-vous deviner ce que représente ce trophée-coussin-peluche ?

Dans l’autre-autre réalité, notre restitution se déroule tant bien que mal et notre ardent travail est achevé. Les schémas dûment post-ités doivent maintenant nous permettre de déterminer notre Business Model. Chef NightWish énonce en quelques phrases le fonctionnement du projet et la manière dont il permettra de générer des clients et des soussous. On est tous bluffés : c’est clair, ça semble réaliste et c’est sorti naturellement. Une sorte de magie corporato-cognitive s’est opérée, notre travail de pastis-post-it-bullsh-it n’était rien d’autre qu’une préparation pour obtenir ces phrases qui nous sont maintenant évidentes.

Je pense que c’est des conneries et que Chef NightWish a tout fomenté à l’avance. Ces fameuses phrases étaient déjà prêtes bien avant le début de l’événement. Si je les ais instantanément approuvées, c’est surtout par fainéantise et par facilité. Dois-je rappeler que je préfère sauter dans une piscine, boire de la bière et réaliser des mini-jeux plutôt que de réfléchir à la proposition de valeur d’une start-up que l’on souhaiterait à haut potentiel de licornitude ?

Bachouillis racontariens du soir + lendemain

Réaffectation des tâches pour la préparation de la bouffe du soir, car Collègue Aquafootball est étrangement introuvable. Je me vois octroyé, d’autorité, le titre de « prince régent du barbeuk ». Je ne suis pas doué pour ce genre d’activité adulte et virile, je crame 73% des saucisses, ça aurait pu être pire.

Un québecois spawne de nul part, probablement un locataire comme nous. Comment a-t-il fait le trajet du Québec jusqu’à cette villa paumée en Sicile sans qu’on le voit arriver ? On ne le saura jamais. Il décline poliment notre invitation à partager notre repas, car il a déjà mangé. Mais il accepte l’invitation à boire et à discuter. Il a inévitablement un accent rigolo.

Je gratte les pourcentages de saucisse non-cramés et tente de les ingérer, car je n’aime pas gâcher la nourriture. Une voix proférant des propos aléatoires me fait relever la tête de mon assiette. Collègue Aquafootball a réapparu. Il parle avec le québecois, très fort et en anglais. Plusieurs personnes lui disent à plusieurs reprises que ce natif de la Belle Province parle et comprend le français, ce dont Collègue Aquafootball n’a cure. Un tel comportement peut-il être qualifié de « punk » ?

Il est 2 heures du matin, c’est le moment de sortir mon ordinateur et de proposer mon sketch sur le python. Dans un futur indéterminé, je vous ferais un article de blog pour vous le montrer. En attendant, voici un avant-goût : ouvrez une console python, écrivez None is not False et appuyez sur Entrée. Lolilol !

Dans tous les événements corporate dont cet article est le medley, je présente ce sketch. Chef NightWish, qui y a déjà assisté, me fait remarquer que la blague « None is not False », je finirai par ne plus pouvoir l’utiliser. Sous-entendu : « ton sketch, c’est du réchauffé ». Ouais, et alors ? T’as mieux à proposer ? Viens nous faire un sketch sur les Business Model Canvas ! (C’est même pas ironique).

Semi-Chef Lucene-Lapin tente de mettre en défaut mes connaissances, en me questionnant sur la manière dont les nombres décimaux sont gérés en python. Il me suggère de tester des opérations mathématiques donnant des résultats faux à cause des approximations. C’est censé me surprendre.

Réponse : les nombres décimaux sont gérés pareil que dans la plupart des autres langages, c’est à dire avec la norme IEEE 754 (mais toujours en précision « double », 64 bits). Sauf que je maîtrise mal ces histoires de valeur approchées et ne parviens pas à lui répondre. Je considère que Semi-Chef Lucene-Lapin a mis en défaut mes connaissances sur la norme IEEE 754, mais pas sur le python.

Je me permets de lui montrer que s’il veut des valeurs plus exactes, avec une précision configurable et théoriquement infinie, il suffit d’utiliser le module « decimal », de la librairie standard du python. Merci, au revoir.

Le sketch terminé, chacun retourne à des occupations plus ou moins valorisantes : boisson, katastro-karaoké avec le matos de musique, discussion sur la vie, …

On re-perd Collègue Aquafootball. On le re-retrouve endormi dans un fossé, serrant dans ses bras une bouteille de whisky aromatisé au sirop d’érable. Stagiaire SuperCSS le traine jusque dans la villa et le pose en vrac sur un canapé. La plupart des gens partent se coucher. Nous ne sommes plus que quatre : Semi-Chef Lucene-Lapin, Collègue DocteurMaboul, Stagiaire SuperCSS et moi.

Collègue DocteurMaboul sort un petit carré de shit et commence à rouler. Ça fait plus de quinze ans que je n’avais pas fumé. Je le remercie pour ce petit moment de nostalgie qui me remémore ma vie étudiante et post-étudiante. À l’époque où ce récit se déroule, le CBD n’était pas encore à la mode. Cela dit j’ai jamais testé ce truc.

Dans une autre réalité, ce n’est pas la dernière nuit de l’événement, et le Business Model Canvas n’est pas fini. Nous restons à rédiger des post-its supplémentaires. C’est clairement pas la même réalité que celle avec le shit.

Dans la réalité précédente, nous discutons de l’avenir du projet jusqu’à 4 heures du matin.

Les deux réalités se rejoignent lorsqu’on va tous se coucher. Sauf pour Semi-Chef Lucene-Lapin, qui utilise son pouvoir spécial et continue de rédiger des post-its tout seul.

Le lendemain, les gens se réveillent à des heures non centrées et non normées. Nous rangeons le bordel : ordinateurs, bouteilles vides, tireuses à bière, morceaux de saucisse, matériel de musique, fins de pétards, post-its, …

Après un vote à l’unanimité, nous annulons les résultats du tournoi de paintball. La personne ayant gagné accepte de bon cœur de rendre le trophée-coussin-peluche-poils-pubiens (de toutes façons je savais même plus qui c’était), afin de le remettre solennellement et officiellement à Collègue Aquafootball, pour l’ensemble de sa prestation de la veille.

Covoiturage pour rentrer, dans la voiture de Collègue BarryWhite. Nous mettons plus de temps qu’à l’aller, car nous devons faire une pause tous les 20 kilomètres pour laisser vomir Collègue Aquafootball.

Durant l’une de ces sessions « dégobillage », nous sommes arrêtés dans un chemin d’entrée de maison. Un vieux affublé d’une casquette Spiderman s’approche de nous. On lui explique pourquoi on est là, qu’on est désolé et qu’on va très vite repartir. Le vieux ne dit rien et reste à nous regarder jusqu’à ce qu’on parte. C’était pas par méchanceté ni par crainte qu’on soit des cambrioleurs gérontophiles. C’est juste qu’il était très vieux et n’avait plus la faculté de parler. Un moment étrange, hors du temps.

Collègue Aquafootball perdu dans son vomi et le vieux Spiderman bizarre (allégorie).

Épilogue

Le dérapage alcoolisé de Collègue Aquafootball restera dans les esprits et sera diffusé, répété et mentionné durant plusieurs mois. Le pauvre ne méritait pas ça, d’autant plus que c’était exceptionnel (dans tous les sens du terme). Ce n’est pas un déglingopathe habitué du binge partying. Ça avait fait pareil avec Chef Peyotl : il a eu un seul écart malheureux et les gens en reparlaient encore des années après. C’est pourquoi, j’essaye pour ma part de ne pas trop faire circuler ce genre d’embarrassantes sorties de route. Sauf que je les écris et les immortalise dans ce blog. Zut…

Collègue BarryWhite deviendra un early adopter de Squarity. C’est grâce à des gens comme lui si je continue d’avoir le courage d’avancer ce pojet personnel. Ça avance juste très lentement.

Le coussin-peluche deviendra la mascotte de la boîte, trônant sur le burlingue de Collègue Aquafootball. Nous nous amuserons régulièrement à nous le lancer mutuellement à la tronche.

Stagiaire SuperCSS, armé d’un magnum de vodka, consacrera deux week-ends au projet annexe Arcanciel. Son travail rendra caduc et inutile tout le code déjà produit par la Zuzu Academy. Ce que la plupart des gens ignorent (mais pas lui), c’est que les codes couleurs CSS peuvent contenir de nombreuses valeurs hexadécimales. Les 3 premières indiquent les quantités de rouge, de vert et de bleu, les suivantes décrivent les différentes couleurs visibles par d’autres types de cônes et de bâtonnets présents dans différents types d’organes visuels, aussi bien humains que animaux.

color: #AABBCC1122334455667788990000111111

Collègue DocteurMaboul se fera intégralement virer comme un malpropre. Licenciement pour truanderie au travail et glanderie aggravée, sans indemnité ni pot de départ. C’était mon gonfleur d’égo, mon aggro à chefs, mon meilleur collègue de tous les temps. Il ne pouvait pas durer éternellement. Je le remercie de m’avoir permis de croiser son chemin à lui, iridescent et éthéré.

Semi-Chef Lucene-Lapin, armé d’un Jéroboam de Ricard, tentera de fusionner le PHP de Drupal avec le PHP de Symfony en une ultime application client lourd, mais échouera à cause de la mauvaise gestion des encodages de caractères dans le PHP, qui effacera tous les points-virgules de son code source. Son rythme de travail-sommeil incompatible avec le reste de l’humanité agacera la hiérarchie, qui le semi-placardisera en abaissant son contrat de travail aux trois cinquièmes.

Chef Nightwish démissionnera pour aller brouter de l’herbe plus verte ailleurs. Il fera un pot de départ comme il se doit, que je rentabiliserai un max (fondue savoyarde).

Des quatre fondateurs originaux du projet POILS_PUBIENS, il n’en reste maintenant plus que 1,6 (suite au passage aux trois-cinquième de Semi-Chef Lucene-Lapin). Ce dernier se rapproche doucement de l’âge de la retraite…

Sauf que bientôt, il ne restera plus que 0,6 fondateurs. Si vous avez lu cet article jusqu’ici, vous méritez bien une petite info exclusive : je vais très prochainement changer de crémerie ! Je ne manquerai pas de vous écrire une palanquée d’articles récapitulant les divers moments intéressants et étranges de cette présente incarnation professionnelle. Cependant, je dois vous avertir qu’il y aura moins de matière que ma série d’articles revanchards et cathartiques que j’avais écris en fuyant Zarma.pro.

À bientôt !

Ça c’est pas moi, c’est Collègue DocteurMaboul

Événement corporate : l’Ovuliaire 2019

Préambule (de savon) : l’entreprise qui m’emploie a retravaillé son nom. « ConcreteWorld.🌏 », avec un point, ça faisait bizarre, car on avait parfois l’impression que c’était un point de fin de phrase, alors que c’est un point genre comme ceux des urls. Du coup, elle se nomme maintenant « ConcreteWorld-🌏 », avec un tiret. Je rappelle que le caractère final se prononce « 1F30D ».

L’entreprise a également retravaillé le nom de son gros événement corporate annuel. « le Semencinaire » dont je vous avais narré le déroulement s’intitule maintenant « l’Ovuliaire », par souci d’écriture inclusive.

Les présentations-blablatages

Au programme, point de Corporate Bullshiste ni de jeu de la multi-biscotte. Juste des présentations sous forme de cours magistraux, dans un amphithéâtre avec des tablettes repose-bloc-notes, parfaites pour réaliser des petits dessins.

Initialisation des cours avec la présentation de notre MegaChef. Au fait, ce monsieur a maintenant un nom : MegaChef En-Même-Temps. C’est d’un macronisme totalement assumé.

Explication : un MegaChef a intrinsèquement tendance à pousser ses employés à travailler au taquet. Cependant, ce serait trop frontal de dire « finissez-moi ce projet en deux fois moins de temps que nécessaire », or, comme il y a toujours des tonnes de projet à faire, sa solution à lui consiste à dire « finissez-moi le projet A en un temps normal, et ‘en même temps’ finissez-moi aussi le projet B en un temps normal ». L’incitation à mettre les bouchées doubles est toujours présente, mais un peu plus subtilement. Ça lui apporte également l’avantage de ne pas avoir besoin de prioriser les projets. Ils ont tous la priorité « super-haute, à faire en même temps ».

Cela dit, ce genre d’injonction n’a que peu d’implications sur moi, puisque je ne suis pas directement sous ses ordres. Mes chefs directs ont divers défauts, comme tout le monde, mais les incitations subliminales à travailler n’importe comment n’en font pas trop partie.

Rien de spécial à dire sur la présentation d’initialisation. On passe à celle de Colléguette PositiveAttitude, la nana du marketing.

Elle demande à la cantonnade si nous serions en mesure de citer une phrase d’un livre qui nous aurait marqué. Mon cerveau en trouve deux :

Les rats sont les seuls créatures véritablement underground. (Charles Bukowski, Journal d’un vieux dégueulasse).

La sexualité est un système de hiérarchie sociale. (Michel Houellebecq, Extension du domaine de la lutte).

Mais je n’ose me manifester pour les énoncer. Personne d’autres ne moufte, à croire que nous avons tous les mêmes lectures.

Ensuite, elle redemande à la cantonnade une citation d’un film. Des phrases de Fight Club, ainsi que le « Tu te masturbais ? » de American Beauty me viennent à l’esprit. Collègue TuLaBoucles me devance, et sors la phrase à la con de Forrest Gump : « la vie c’est comme une boîte de mon cul sur la commode ».

American Beauty, excellent film.

Colléguette PositiveAttitude nous explique alors que cette petite démonstration est la preuve que nous nous souvenons plus facilement d’images et de sons que de textes. Waouw. Impressionnant.

Sauf que c’est complètement biaisé. N’importe quel charlatan de spectacle de rue sait très bien qu’un public ne réagit jamais à une première harangue, et qu’il faut la répéter. D’où la fameuse technique du « Est-ce que ça va ? Je n’ai pas bien entendu ! EST-CE QUE ÇAAAA VAAAAAA ?? ». De plus, la recherche de souvenir est un mécanisme que le cerveau met un petit temps à déclencher. Il est donc normal que les informations ressortent plus nombreuses à la deuxième sollicitation.

Si elle nous avait demandé d’abord une citation de film, puis une citation de livre, on aurait répondu uniquement aux livres et sa démonstration nounouille se serait vautrée.

Pour finir, elle nous parle de l’infobésité, un concept intéressant même s’il n’est pas spécialement nouveau.

C’est le moment de la récréation, avec bâffrage croissant-confiture-café. Cool.

Collègue Pez s’approche de Collègue TuLaBoucles. Les deux se sont récemment fâchés à cause d’un truc à la con, qui ne mérite même pas d’être raconté ici.

− On se serre la main ou pas ?

− Ben non. Tu peux pas faire comme s’il s’était rien passé.

− OK. Alors tu la boucles.

Et c’est comme ça que Collègue TuLaBoucles s’est appelé « Collègue TuLaBoucles ».

Sur ce, il faut retourner en cours.

Étrangement, aucun power-point n’est doté d’une image ou d’une animation d’engrenages mal foutus et ostensiblement non fonctionnels. Nous avons juste droit à une sorte d’atomium-planète avec des petits machins gravitant autour. Je suis déçu.

C’est pas une gif, mais c’est déjà un atomium.

Chef Nightwish nous autorise à dire « ooooooh, c’est mignooooon » durant sa présentation, car il l’a ponctuée de photos de chats.

Chef Nightwish s’appelle ainsi car c’est un fan du groupe éponyme. Draxxx, le métalleux attitré de feu le magasine 42 détestait Nightwish. C’est assez rigolo. Il semble que ce groupe soit controversé. Bon, supposons que je veuille être un métalleux conventionnel, je devrais dire que j’aime ou que je déteste Nightwish ? Oh on s’en fout. En tout cas, « c’est mignooooon ».

Grâce aux efforts continus d’innovation et de recherche, la technologie évolue progressivement, et les supports de cours ont pu ne pas être exclusivement constitués de powères-pointt. Une petite vidéo sympa nous est dispensée, montrant des collègues répondant à des questions existentielles comme « qu’est-ce qui vous plaît à ConcreteWorld-🌏 », « que voudriez-vous changer ? », etc.

Certains collègues sont interviewés par deux. Ils se répondent l’un l’autre, sur un ton inhabituel et chargé de non-sens. Ça fait très Kaamelott.

Cette journée est tellement fofolle en terme d’innovation post-power-points que nous avons droit à un quizz ! En effet, le compte-rendu de l’Action Bisounours nous a été restitué sous ce formalisme.

Explication : l’Action Bisounours est un badge social-et-sociétal, comme une norme ISO-truc, garantissant qu’une entreprise agit de manière gentillounette avec ses parties prenantes : clients, employés, fournisseurs, etc.

Le quizz comportait des questions telles que : « l’Action Bisounours définit-elle un indice de visibilité de minorité, permettant de savoir, par exemple, si les Noirs seraient plus discriminés ou moins discriminés que les Mormons, les Jeunes ou les Gauchers ? ». La bonne réponse était « Non, bien sûr. Les humains sont tous différents et tous égaux, sauf l’empereur Néron qui était vraiment un superconnard. »

Un smartphone était nécessaire pour participer au quizz, ce que je ne possède pas. On nous avait demandé de prévenir à l’avance si nous étions dans ce cas, afin de mettre en place des smartphones de secours. J’avais prévu de m’en tamponner complet. Malheureusement, le nombre d’inscrits s’affichait publiquement et en temps réel. Collèguette Choucroute, l’une des organisatrices, attendait de pied ferme que celui-ci corresponde au nombre de gens dans l’amphi. J’ai donc demandé un smartphone à l’arrache et je me suis fait gronder. Je suis un Boulet (indice de visibilité de minorité : 42%).

Je m’inscrit sous le pseudo « ‘;drop database », histoire de tenter une injection SQL et d’amuser la galerie. La galerie a été amusée. Youpi.

C’est Mascotte À-Fleurs qui claque le meilleur score. Bravo à lui. Il s’appelle ainsi parce qu’il met parfois un splendide pantalon bizarre avec des fleurs dessus. Son titre de noblesse est ‘Mascotte’ et non pas ‘Collègue’, vous avez compris pourquoi.

Il gagne un cadeau-surprise en différé, qui lui sera offert au prochain goûter corporate. Spoiler Alert : le cadeau-surprise est un bonnet en forme de Bisounours.

Vient ensuite la correction du quizz. Colléguette Choucroute explique chaque bonne réponse en débutant toutes ses phrases par « effectivement ». Il y a du brouhaha. Elle nous rappelle régulièrement à l’ordre comme si nous étions des petits-enfants-bisounours.

La suite de la journée se déroule classiquement. En résumé :

  • Un autre quizz, sur le sujet « les gens de la Bizness Iounite ‘Protection de la Réalité' ». Cool.
  • Réalisation de deux magnifiques dessins grâce à la tablette repose-bloc-notes. Je vous les montrerai dans un prochain article, afin de séparer les catégories blogales « dessin » et « univers fascinant du travail ».
  • Repas-buffet gratuit le midi, très bon, mais sans alcool.
  • Discussion à propos de CodinGame avec Collègue Docteur-Maboul, dont l’un des amis est un fondateur du site. Je me garde cette info sous le coude, au cas où.
  • On nous demande régulièrement de partager sur les rézosocios tel article ou tel nouvelle, pour « transmettre » et pour « que l’on parle de nous ». Je n’ose pas dire suffisamment fort que ça va rajouter de l’infobésité.

Twit ! Twit ? J’ai faim !

La présentation finale

Celle-ci nous est offerte par Viril Virgile, l’entraineur de l’équipe régionale d’aquafootball chilien.

Viril Virgile, dans les vestiaires pro du stade officiel.

Explication : l’aquafootball chilien n’est pas très connu en France, excepté dans notre région. La Chevalerie du Ballon d’Airin (c’est le nom de l’équipe) est parvenue au fil des ans à se forger (ha ha ha) une renommée internationale. La plupart des gens du coin sont des supporters-évangélistes de ce sport. Vous pouvez pas chier dans la rue sans en croiser un.

ConcreteWorld-🌏 étant sponsor officiel, nous avons régulièrement des places gratuites pour aller voir des matchs, en tribune VIP, s’il vous plaît. Ça a l’air tellement important que c’est compté comme avantage social pour les employés.

Personnellement j’en ai rien à foutre de ce sport à la con, rien à foutre de la VIPerie, et rien à foutre que Viril Virgile nous gratifie de sa présence et soit venu décharger en nous sa sagesse d’entraîneur. Le seul truc dont j’ai pas rien à foutre, c’est les mails envoyés régulièrement « à tout le monde » annonçant les places disponibles pour le prochain match. Ça m’agace car ça rajoute de l’infobésité à ma boîte mail boîtale. Je ne dis rien sous peine de passer pour un gros naze qui ne s’intéresse pas « aux valeurs du sport ».

Je reconnais que cette présentation m’a appris des choses, car j’endosse parfois le rôle d’anthropologue toujours prêt à découvrir des modes de vie de catégories socio-professionnelles différentes de la mienne. Je découvre également le personnage de Viril Virgile, et là c’est une expérience bien moins captivante, du fait de son côté « gros ours mal taillé dans un bloc de parpaing lui-même mal taillé dans un bloc de parpaing plus gros ».

Liste de ses gros-oursitudes :

  • « Bon, je vois qu’il y a des femmes. Désolé, vous vous ennuierez peut-être un peu. » (Du coup, t’aurais dû venir avec une cargaison de cartes-cadeaux Zara et des boules de geisha, pour distraire ces pauvres dames. On n’est plus à un cliché près).
  • « Et aussi, je vais parfois dire des gros mots. » (Apporte-aussi des écouteurs diffusant en boucle du Vianney, du Katy Perry ou n’importe quelle autre soupe girlie, on n’est plus à deux clichés près).
  • Son support de présentation en est resté au stade du power-point. Qui plus est, avec des transitions moches en 3D. Certaines diapos sont présentes en double, voire triple exemplaire.
  • À croire qu’il aime les (répétitions)³, ou alors qu’il se prend pour le Général de Gaulle à l’appel du 18 juin, car il redit parfois trois fois de suite la même phrase.
  • Certaines diapos montrent des fiches de compte-rendu de match. Il y a des smileys content et pas-content dessiné en gros, pour bien montrer aux joueurs ce qui a été bien et pas bien. On a l’impression d’être chez les super-teubés.
  • Mini-vidéo les montrant en visite dans une usine locale de lacets de chaussure. L’un d’eux se prend un carton rouge car il s’énerve durant le quizz final. On peut voir en arrière-plan un grand écran affichant la dernière réponse du quizz, à savoir : « les chaussures ». Laissez-moi deviner la question : « que permet de lacer les objets fabriqués dans notre usine ? ».
  • Pour que les joueurs de l’équipe se sentent impliqués et se comportent correctement avec les journalistes et les gens normaux, Viril Virgile les nomme « Les Chevaliers ». « Tous les membres de l’équipe doivent avoir l’esprit de la ‘chevalerie’ ancré en eux ».
  • Photo de joueurs se serrant dans les bras durant un match, dans une franche, chevaleresque et virile camaraderie. Je dis : « Oooooh, c’est mignon ». Mais ça ne fait pas rire beaucoup de gens autour de moi. Tant pis.
  • Une saison sportive d’aquafootball chilien étant jalonnée d’événements et matchs divers, il est utile d’effectuer une analogie avec une autre histoire, en faisant correspondre leurs étapes respectives. Voilà une idée intéressante. L’année dernière, l’histoire choisie était : le tournoi des 5 nations du rugby. Euh… WTF ? C’est quoi l’intérêt de faire une analogie entre la saison sportive d’un sport et la saison sportive d’un autre sport ? En tout cas, ça va pas aider à diminuer l’impression qu’ils sont super-teubés.

Un collègue sort de la salle. Vraisemblablement parce qu’il en a marre ou qu’il veut aller aux toilettes.

Un peu plus tard, une diapo-power-point affiche le texte « homo numericus ». Viril Virgile nous raconte qu’en voyant cela, l’un de ses Chevaliers a rétorqué en riant : « Hurr hurr huuurr, je préfère être numericus que homo. Hurr hurr huuurr. ». L’assemblée rit légèrement. Viril Virgile ajoute : « Bon, il a dit ça comme ça. Mais je suis assez d’accord. Pas de pédés dans mon équipe. » L’assemblée re-rit à nouveau. J’écoutais à moitié, puisque je dessinais. Je n’ai pas su déterminer s’il disait cela sur le ton de l’humour ou pas.

Collègue Machin dit à ses voisins : « Mais pourquoi les gens rient ? C’est pas drôle. On se targue d’être Action-Bisounours-Compliant, et on rigole à des blagues comme ça ? ».

Je passe quelques minutes à réfléchir à la situation, puis je décide que Viril Virgile ne blaguait pas, que de toutes façons sa présentation commence à me gonfler, et que vu qu’une personne est déjà sortie, j’ai bien le droit de faire pareil.

J’embarque mes dessins et je me casse. Je me retrouve seul dans le hall d’entrée à finir de gribouiller. Je suis un peu inquiet quand même. J’ai peur de devoir me justifier par la suite, et de passer pour le gros boulet qui se permet de monter sur ses grands chevaux juste pour se donner un peu de personnalité.

Lorsqu’enfin la présentation se termine et que tout le monde sort, je découvre que je n’ai rien raté de notable. Ça s’est terminé avec des questions de l’assemblée, dont un bon chapelet de questions chiantes par Collègue GrandBlondAvecPasDeChaussureNoire.

Je me sens obligé d’exprimer pourquoi je suis parti. Je suis agréablement surpris car personne ne désapprouve. Certains s’en tamponnent, d’autres me disent qu’ils ont eux aussi hésité à sortir sans oser le faire, et d’autres encore ont relevé ses remarques introductives de merde à propos des femmes et des gros mots.

Potlatch d’échange

Le lieu de l’orgie dînatoire n’est pas très loin du lieu des présentations, ce qui me permet d’y aller tranquillement en vélo. De plus, je pourrais m’alcooliser sans scrupules puisque pour rentrer chez moi, je ne serais dépendant ni d’un véhicule à moteur ni d’une autre personne.

Comme l’année précédente, un potlatch d’échange est organisé. Chacun vient avec un cadeau et repart avec un autre. En revanche, pas de collègue déguisé en Père Noël. Dommage. On a des collègues noirs, j’aurais trouvé ça super classe et tellement Action-Bisounours-Compliant d’avoir un Père Noël noir.

− T’es pas vraiment fringué en père Noël.
− Et t’es pas vraiment un Bisounours.

Ma contribution à ce potlatch était Boulonix, le chien-robot qui fait caca. Vous l’aurez deviné, le but de ce cadeau était uniquement de me la péter auprès de mes collègues, qu’ils voient comment je suis trop créatif et ingénieux.

Et ça marche. Les gens défilent pour voir ma création, je performe plusieurs fois de suite la démonstration de la nourriture qu’on met dans la bouche de Boulonix et qui ressort par le trou-du-luc.

Les deux nénettes du Département boîtal « Pollinisation de l’entropie réalitoire » sont admiratives. Je suis très content. Dans mon cerveau un peu bancal, ces deux personnes sont des fantasmes platoniques, comme Colléguette Platona dont je vous ai parlé lors du Semencinaire 2018.

Ce serait un peu impersonnel de les appeler « Platona 2 » et « Platona 3 », alors, comme elles s’occupent de pollinisation et que je suis un mec super drôle, la première s’appelle Colléguette Pauline. La deuxième aurait pu s’appeler Colléguette Paulette, mais ça aurait été du second degré tellement naze que ça en serait devenu du zéro degré. Alors en fait elle s’appelle Colléguette Babiole. C’en est presque poétique.

Je les aime bien ces deux nanas. Nous avons vécu des moments d’amitié intenses, à l’époque où nos burlingues étaient dans la même zone d’open space. Surtout lorsque je sortais des blagues débiles et des jeux de mots dignes de Michel Drucker s’il avait décidé de faire des jeux de mots.

En tant que geek-cliché, j’ai aidé Colléguette Pauline à résoudre les exercices de math de son fils. D’autre part, j’ai ouï dire que Colléguette Babiole faisait un peu de graphisme ou de dessin. Et c’est cool.

Une œuvre (en pixel art CGA) de Colléguette Babiole.

Notre amitié éternelle et légendaire a perdu un peu de son intensité lorsque j’ai déménagé de burlingue-open space. Mais on se croise régulièrement à la machine à café ou aux toilettes. Rappelons que je suis une personne qui se rend énormément souvent aux toilettes.

Et donc, ces deux dames trouvent Boulonix magnifique. Flattage d’ego, flattage d’ego. Elles me font promettre de leur en fabriquer un autre du même genre, pour mettre sur leur burlingue commun. Faudra que je m’occupe de ça à l’occasion.

En revanche, Colléguette Carnea n’accroche pas trop. Lorsque je lui fais la démonstration du cacatage boulonixien, elle a un petit sourire crispé sur un air « qu’est-ce qu’il me veut ce gamin avec son jouet scatologique ? ».

Je papillonne dans divers groupes de discussion, à montrer mon chien et/ou mes dessins (ego, ego, ego). Je retombe sur Collègue Docteur-Maboul. Je découvre que lui aussi connait Bukowski, ça fait plaisir.

Durant notre conversation, le contexte fait qu’il éprouve le besoin d’énoncer une expression de type « Avec des ‘si’, on mettrait Paris en bouteille ». Celle qu’il me sort est éminemment über-classe : « Si mon grand-père avait trois couilles, ce serait un flipper ». J’adore.

Le grand-père de Collègue Docteur-Maboul

Çay parti pour le showe !

L’année dernière, le show avait été assuré pas un magicien, que tout le monde avait trouvé tout pourri, mais que j’avais personnellement bien aimé, (je suis peut-être un peu con-con en terme de magie).

Revirement complet pour cette édition, puisque nous avons droit à un spectacle de cabaret, avec danseuses peu habillées. Excellent !

En apprenant cela, plusieurs personnes se sont posé la question de la pertinence d’un spectacle de type foire-à-la-greluche pour une soirée corporate. La cheffette du département boîtal « Orgies Internes » nous a expliqué que celui-ci avait été conseillé par un organisme partenaire, en qui elle avait entière confiance. Lorsqu’elle s’est renseignée plus conséquemment, elle a découvert la nature exacte de la prestation, mais il était trop tard pour chercher autre chose. Elle a malgré tout réussi à négocier quelques conventionnalisations, notamment le fait de ne pas trop montrer de bouts de seins.

Il faut reconnaître qu’elle a réussi à bien gérer la situation, avec les moyens et les infos qu’elle avait. Mais moi, j’aurais bien voulu les voir les bouts de seins. #BalanceTonCorps .

Et qui était donc l’organisme partenaire nous ayant bayé ce conseil ? La Chevalerie du Ballon d’Airin, bien sûr ! Ah nom de dieu de putain de couille de loup, qu’est-ce qu’on se marre.

Ce spectacle de cabaret avait pour thème « les cabarets de Paris ». Wouuuu !!! Une prise de risque artistique de malade !

Qu’à cela ne tienne, ça me plait beaucoup car il y a des femmes rondes.

Les modèles du spectacle

Je suis à la même table que MégaChef En-Même-Temps, du coup j’essaye de me tenir bien. Mais il part assez vite vers le fond de la salle, pour non-danser à côté de quelques personnes qui dansent.

Colléguette Doctoresse-Chaussure, ma voisine de table, est un peu mal à l’aise à cause de cette profusion de peau nue. Je dois avouer que je n’ai pas spécialement fait attention à elle, trop occupé à baver. Heureusement, Colléguette Platona est venue la voir.

Par contre, un type qui nous a lourdé pendant toute la soirée, c’est le chanteur de cabaret. Il apparaissait le temps d’un numéro pour nous pousser une de ses interprétations, tout en essayant de lancer l’ambiance avec des injonctions nazes : « vous pouvez taper dans vos mains si vous voulez ». Wéééééééé !

Je lui hurle dessus qu’on veut soit du Patrick Sébastien, soit les madames. Je tape des mains comme un orang-outang et passe tout le temps de ses chansons merdiques à faire tourner ma serviette. Entre-temps, je me fais une tâche de vin rouge, ce qui était hautement prévisible.

Pour son dernier numéro, ce super-tocard apparait sapé comme le capitaine de La Croisière S’Amuse. Collègue TuLaBoucles annonce : « Ah, on va avoir droit à du Michel Sardou. ‘♪ Quand je pense à la vieille anglaise ♫’. ». Je comprends pas du tout de quoi il parle, jusqu’à ce que super-tocard commence à chanter. On ne l’appellera plus jamais, celui-là.

Les interprétations musicales de super-tocard (allégorie).

Le show se termine sur une apothéose de plumes et de paillettes. Les dames descendent dans le public pour froufrouter leurs robes sur la tête des gens. C’est trop rigolo. On tape dans nos mains, mais cette fois-ci pour applaudir.

Je discutaille ici et là au fur et à mesure que les gens partent. On embarque chacun un super package-cadeau avec de la bonne bouffe et du pinard dedans. Chouette.

Finalement, je rentre tranquillement en vélo. Comme d’habitude, je me plante de chemin mais je ne fais pas demi-tour pour ne pas me taper la honte nucléaire ultime de recroiser des gens qui vont se rendre compte que je me suis planté de chemin. Je parviens malgré tout à rentrer chez moi, avec mon package de miam-miam et ma tâche de vin rouge.

C’était une super journée, riche en bouffe gratuite et en courbes généreuses. Merci ConcreteWorld-🌏 !

Événement corporate : les Temps Forts de Pochtronarr (1/2)

Hey vous, voici le récit d’un événement corporate.

Y’en a une tartine, donc je l’ai coupé en deux.

Contextualisation rapide

Je travaille à ConcreteWorld.🌏, une société qui a pour mission de conserver la réalité dans l’univers.

Nous détectons et corrigeons les événements de non-application des lois de la physique avec une réactivité et un soin exemplaire. Vous avez entendu parler des bugs dans la Matrice ? Eh bien dans les mètres-cubes-seconde de coordonnées spatio-temporelles dont nous avons la charge, il en est survenu très peu. Notre activité grandit progressivement, car la confiance de nos clients, la ténacité de nos commerciaux et l’abnégation de nos techniciens nous font remporter de plus en plus de m³.s.

Cette description provient de notre site internet. J’espère que vous ne m’en voudrez pas trop pour le corporate bullshit.

Comme toute entreprise qui se respecte, nous utilisons un « outil de gestion de trucs ». Celui-ci supervise, entre autres, les latences de causalité, les pertes d’euclidianité, la localisation des relais de synchronisation d’entropie, la surveillance de la machine à café, les stocks de papiers toilette, etc.

Très souvent, le fameux outil « pour tout gérer » ne gère finalement rien, mais ce n’est pas intrinsèquement de sa faute. C’est juste qu’il faudrait finir de le configurer, le maintenir, saisir les données nécessaires, mettre à jour les processus, etc. Bref, tout ce qui a été malencontreusement pas mentionné ni prévu lors de son achat. L’outil végète donc dans un coin et est utilisé pour 0.05 trucs sur les 1000 imaginés au départ. Pour achever le tout, il est souvent indisponible et avec un temps de réponse décourageant, car le serveur sur lequel il a été installé héberge maintenant 10 autres applications qui elles, sont utilisées réellement.

À ConcreteWorld.🌏, c’est un peu différent. Si l’outil qui gère tout ne gère rien, ce n’est pas uniquement à cause de son environnement, c’est aussi et surtout la faute de l’outil lui-même, buggé jusqu’à la garde. Je ne vais pas vous faire la liste complète des aberrations de ce charnier de code, j’en aurais pour une bonne douzaine d’articles de blogs. Retenez juste ces 3 informations principales :

  • L’outil se nomme Pochtronarr.
  • Il est édité (et vendu à un prix non négligeable) par une société appelée « Ploucocratt ».
  • Il est tout pourri.

Le décor étant planté, je peux maintenant vous narrer l’événement corporate dont il est question : Ploucocratt nous a convié à un rassemblement de leurs Clients, afin de nous présenter les évolutions des produits, d’échanger entre nous, de participer à des tables rondes, de bouffer gratuit, etc. Ils ont baptisé cette journée : « Les Temps Forts de Pochtronarr », en précisant bien qu’elle serait placée « sous le signe de la convivialité ». Youpi.

L’invitation à ces Temps Forts nous est arrivée sous forme d’un mail, dont la première ligne était :

Bonjour, cher {nom_du_contact}.

Petit souci de template de mass mailing. M’étonnerait pas qu’ils aient programmés ça avec Pochtronarr.

J’étais moyen chaud pour faire le déplacement, mais Semi-Chef Pez y tenait grave taquet, alors j’ai fini par dire « banco ».

Semi-Chef Pez est le responsable de la mise en place de Pochtronarr. En fait c’est un Collègue, mais Chef Peyotl m’a donné pour ordre de suivre ses directives, ce qui l’a donc promu au grade de Semi-Chef.

Il s’appelle Pez car il a une dépendance au sucre. Il a toujours un chargeur de ces petits bonbons, et en ingère un de temps en temps dans un petit bruit de « cla-clak ».

Chef Peyotl s’appelle ainsi car il a visité tous les pays du monde pour trouver l’alcool qu’il apprécierait le plus. Ça s’est révélé être le peyotl.

 

En route !

Nous voilà donc partis en road trip, Semi-Chef Pez et moi, en direction du fief de Ploucocratt.

Comme précédemment révélé, je suis une grosse quiche au volant. Il existe des conducteurs qui maîtrisent, mais qui aiment les sensations fortes, ce qui les rend dangereux. Moi c’est plus simple, je maîtrise juste pas.

Semi-Chef Pez est une grosse quiche en guidage de conducteur, car il ne sait pas se servir d’un Tom-tom.

Nous avons donc très intelligement attribué le rôle de conducteur à moi-même, et celui de copilote à Pez. Plusieurs mois après, il m’a avoué que mon style de conduite chaotique lui avait fait « chier de l’huile » durant tout le trajet.

On devrait avoir le droit de dire sur son CV qu’on est, voituralement parlant, un handicapé saltimbanque cyclothymique.

Rien d’autre de notable à dire sur ce passage de ma vie. On arrive à l’hôtel, on s’installe, on se retrouve pour bouffer, on a une discussion conventionnelle, on se retire chacun dans notre chambre-bungalow respectif. Je trouve un scolopendre dans le lavabo, mais osef.

 

Le matin

Mini-trip en voiture, mini-chiage d’huile par Pez et nous arrivons au prestigieux lieu des Temps Forts. Nous sommes accueillis par des Ploucocratiens habillés en semi-formal, ce qui souligne la convivialitude de l’événement, tout en montrant qu’ils ont fait un petit effort pour nous, car un peu de lèche-bottage ne fait jamais de mal.

On nous donne à chacun un sac à goodies contenant du bla-bla de présentation, un formulaire de participation à un quizz stupide, un polo et un chargeur universel de trucs rechargeables. Ce serait des objets intéressants s’ils n’étaient pas estampillés « Pochtronarr ».

Nous nous voyons également offrir un petit carton à notre nom, à accrocher à notre boutonnière, afin de savoir qui est qui et de quelle boîte. Nonobstant le fait que la police de caractère utilisée est le Comic Sans MS, les prénoms ne sont pas écrits. C’est « Monsieur Machin », « Madame Truc », etc. C’est pas ce qui aide le plus à se placer « sous le signe de la convivialité ».

On prend place pour les premières démonstrations, le thème étant « les nouveautés de la nouvelle version ». Je ne vous conte pas tout en détail, ce serait lourdingue (autant que le fait que cela nous est présenté sous forme de Power Point). Voici donc un florilège des moments les plus amusants.

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Diapo de remerciement général, avec les logos de tous les gentils clients, disposés de manière à former le mot « merci ». Celui de ConcreteWorld.🌏 n’y est pas. On ne doit pas être assez prestigieux, ou alors ils nous détestent parce qu’on arrête pas de relever leurs bugs et leurs failles de sécurité.

Diapo de trombinoscope des fringants employés ploucocratiens. Le locuteur annonce : « je vais lister les gens de gauche à droite » et il les liste de haut en bas.

Nous avons :

  • Fournisseur-Mega-Chef TecNoTIC.
  • Fournisseur-Consultant Frigo.
  • Fournisseuse-Commerciale Jacquotte.
  • Fournisseur-Dir-Tech Ashereff.
  • Fournisseur-Sous-Mega-Chef Mick-Jagger.
  • Fournisseur-Support Jeunot.
  • Fournisseur-Consultant Craquelé.
  • Fournisseur-Développeur Drache-Code 1
  • Fournisseur-Développeur Drache-Code 2
  • etc.

Vous l’avez certainement déjà compris : leur titre de noblesse à tous est préfixé de « Fournisseur » car ils sont fournisseurs de ConcreteWorld.🌏. On aurait pu utiliser le préfixe « Sous-Traitant », mais c’est moins classe, et ça aurait fait des titres encore plus long.

Nous expliquerons au fur et à mesure du récit les noms de certaines de ces personnes.

Diapo animée vantant les fonctionnalités de Pochtronarr, avec des engrenages qui tournent. Ils ne sont pas synchros et se traversent. C’est très amusant et très représentatif de l’outil : à première vue tout fonctionne, mais dès qu’on fait le moindre simple test, des symptômes révèlent que tout va péter et que c’était totalement irréaliste de croire que ça allait marcher.

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Dans une présentation corporate, l’humilité assumée est le nouveau moyen de se la péter. On dit qu’on s’est planté, pour pouvoir ensuite insister sur le fait qu’on a été suffisamment observateur pour détecter le problème, suffisamment intelligent pour se remettre en question et suffisamment re-intelligent pour trouver une autre approche. Fusent alors des expressions comme : « on s’est aperçu que », « on a corrigé les erreurs de jeunesse », « on reconnaît que », etc.

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Expressions qui claquent :

« On se développe à l’international, nous avons maintenant des clients à Monaco. »

Ouais, sauf que la base de données de l’outil est encodée en Latin-1. Du coup, vous allez vous développer à l’international-anglais. Oublions les chinois, les arabes, les russes et les grecs.

« Nous éditons un ERP Métier ».

Le mot « Métier », ça impressionne toujours.

« Une solution adaptée au marché, avec les nouvelles technologies ».

En vrai c’est du C#, les pages web sont en asp.net, et le langage de script pour implémenter les process Métier c’est du … On verra ça plus tard, je vous laisse la surprise.

« On a un existant qui est lourd ».

Ça veut dire que leur base de code est pourrie, mais qu’ils n’ont pas la capacité intellectuelle et/ou financière de poser leurs gonades sur leur clavier et de tout remettre à plat. Donc ils rajoutent des couches de bordel, des patchs, des bouchons, des solutions de secours, des outils externes qui rattrapent les boulettes, etc. En tout cas, cet « existant lourd » est leur excuse par défaut à chaque bug que je leur signale.

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Un gros paquet de communication a été émis concernant la nouvelle version majeure de Pochtronarr, un paquet encore plus gros sur la refonte totale de l’aspect visuel, l’ergonomie et la convivialité. (Décidément, ce mot « convivialité », il claque, voire même il chabraque du brontosaure hydrocéphale à la scie égoïne).

Durant les différentes démonstrations, les impondérables suivants ont été relevés :

  • Un clic sur une option fait apparaître un sous-menu déroulant, mais celui-ci est masqué par certains éléments de la page. Petit souci de « z-bug ».
  • Un tableau de données s’affiche au même endroit qu’un autre texte. Il faut développer-réduire deux fois de suite ce tableau pour que ça se réorganise correctement.
  • La liste d’une combo-box est coupée par la limite du formulaire dans laquelle elle se trouve, et n’affiche que les deux premiers choix.
  • Une fenêtre d’alerte mal taillée, cachant la fin du texte du message.
  • Diverses fautes d’orthographe dans les formulaires, en particulier des terminaisons de verbe « er/é ». (Astuce futée : remplacer par un verbe du troisième groupe, le mieux étant le verbe ‘prendre’, car il permet de détecter le féminin avec ‘prise’).
  • Un mail envoyé automatiquement, comportant le mot « Mail » dans son sujet. Merci Captain Obvious.

Je dois toutefois modérer mon propos : plus tard, j’ai eu l’occasion de tester cette fameuse nouvelle version avec Chrome et Firefox, et la plupart de ces impondérables n’y sont pas apparus. C’est juste que là c’était sous IE.

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Madame Roupy, de la société Nil, glousse à chaque remarque prétendument humoristique.

Est-ce que c’est sexiste, de mentionner ce non-événement, ou pas ?

Ça ne devrait pas, puisque cet article brosse également le portrait d’individus masculins, en des termes aussi peu élogieux que ce que je viens d’écrire là. Mais le gloussage est une activité qu’on attribue péjorativement aux femmes, donc c’est sexiste de renforcer ce stéréotype. De plus, je mentionne beaucoup d’hommes, ce qui amène quelques petits passages avec des termes moins pas-élogieux que d’habitude. Or, je n’ai pas l’occasion de faire cela avec les femmes, puisqu’elles sont moins mentionnées. Là encore, c’est sexiste. Mais c’est pas de ma faute dans le sens où il y avaient beaucoup plus d’hommes que de femmes lors de ces Temps Forts.

Est-ce que je dois augmenter artificiellement la mention et la présence des femmes dans cet article, pour atténuer le sexisme et la non-parité inhérente aux métiers de l’informatique ? Est-ce que ça ne risque pas de rendre mon article bidon, encore plus irréaliste que ce qu’il n’est déjà, et entâché de bien-pensance niaise ?

Est-ce que c’est sexiste d’avoir écrit ce paragraphe de réflexion interne, qui sous-entend lourdement que si je me suis senti obligé de l’écrire, c’est justement parce que notre époque a changé et qu’on doit maintenant faire beaucoup plus attention à ne pas balancer des remarques relevant du sexisme ordinaire ?

Je ne sais pas. Passons à autre chose.

Où sont les femmes qui auraient pu faire de l’informatique ? Ah ben elles sont là.

*)

Ces Temps Forts sont également l’occasion pour les ploucocratiens de s’envoyer des fleurs entre eux et se faire des petites blagounettes de convivialititude.

« Le rendu des graphiques en mode image était très mauvais. Mais nos développeurs ont arrangé ça et j’ai été bluffé. »

« Je ne désespère pas qu’ils améliorent la fonctionnalité des récaps. (Hu hu hu, j’en profite pour leur passer des messages). »

« On est les seuls à faire un produit qui soit compatible Oracle, postgreSQL et SQL Server »

Oui, euh… ça s’appelle un ORM (Object-relational mapping). Django le fait, pour ne citer qu’eux. Sauf que vous, vous mettez les différences de dialecte SQL au niveau des scripts de process métiers, alors que ça devrait être à un niveau plus bas (dans le moteur de l’outil). Parce que là on doit tout se repalucher à chaque script. Dans les faits, on repaluche rien, on reste sur le SGBD choisi au départ, et on prie pour qu’on n’ait jamais besoin de le changer.

« Il reste un petit souci avec les indicateurs graphiques, mais les développeurs vont nous optimiser tout ça. Il y a eu un gros effort d’intégration. »

« Haha, quel rigolo je fais ! Dans le formulaire, je n’ai coché que des PC marqués comme étant ‘en panne’. »

« Oups, ça n’a pas marché. Mais c’est normal, le champ Description est obligatoire. Quel intelligent coquin cet outil ! Il me demande de me justifier. »

Fournisseur-Mega-Chef TecNoTIC annonce fièrement :

« on a entièrement restructuré nos méthodes de travail en interne, maintenant, on est AGILE. Les développeurs sont à fond durant leurs ‘ ‘ ‘sprints’ ‘ ‘. ».

Il avait tellement mis de guillemets autour du mot « sprint » qu’on a tous compris que pour lui, ça restait un terme très exotique. Et il avait tellement mis de guillemets autour des guillemets autour du mot « sprint », qu’on avait également compris qu’il revendiquait sa non-comprenance totale de la méthode AGILE.

TecNoTIC s’appelle ainsi car il travaille dans une entreprise de TIC, mais lui-même n’y connait rien. Vous avez peut-être déjà rencontré ce genre de chef. Ils se vantent de leur ignorance. C’est un comportement que l’on pourrait relier au concept de « l’humilité assumée qui est un nouveau moyen de se la péter. ».

Mais c’est aussi une insulte envers lui-même. L’informatique fait maintenant tellement partie de notre vie que même si vous ne travaillez pas dedans, c’est important de s’y connaître un minimum.

Et c’est aussi-aussi une manifestation de condescendance, voire de mépris, envers ses employés : « la programmation est un domaine pour les gueux travaillant au bas de l’échelle. Je suis au-dessus de ça, donc je n’ai pas besoin de m’y connaître ».

Petit édulcorage de mon propos : j’ai eu l’occasion, plus tard, de rediscuter avec cette personne, il se trouve qu’il s’y connait malgré tout un minimum. Disons qu’il sait ce qu’est un cookie et qu’il a une vague connaissance du concept de l’authentification décentralisée.

Allez les gueux ! Finissez-moi ces features et pondez-moi cette release ! *claquement de fouet

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Je profite de toutes ces démos pour remplir la feuille du quizz à la con.

Il est gavé de questions stupides et captain-obvioussesques. C’est limite un dénigrement de mon intelligence et de ma mémoire.

La dernière question :

Qu’y a-t-il dans la nouvelle version de Pochtronarr (multi-cochage possible) ?

– Une refonte totale et endoscopique de l’interface utilisateur.

– Un module d’analyse d’image vous obligeant à utiliser des photos de vous à poil pour votre image de profil.

– Un changement de paradigme intrinsèque dans le noyau du sous-moteur déterminant la couleur des graphes en camemberts.

Je rajoute une case en dessous, sans la cocher, et j’écris : « intégration du langage python, parce que les scripts métiers en Small-Talk avec l’IDE de Scratch, on a fait mieux depuis ».

Voilà comment ont programme les scripts. Ça valait le coup de l’annoncer avec un peu de suspens.

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Parfois, les ploucocratiens s’envoient de vilaines petites piques.

« Nombreux sont les consultants qui ont eu un peu de mal avec la nouvelle fonctionnalité de multi-affichage. »

« On a eu quelques mauvaises surprises sur les temps de réponses. »

(Après une remarque d’un ploucocratien random) : « Non mais c’est à moi de parler, c’est pas à toi ».

« Je suis pas commercial, je fais pas d’effet d’annonce. »

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Et bien sûr, nous avons les inévitables aléas dûs au célébrissime « effet démo ».

« Ah, mon poste n’est pas en forme. »

Le glisser-déplacer d’un fichier dans une zone d’un formulaire web qui foire.

Une belle petite erreur 500. On a les mêmes. Elles sont totalement aléatoires.

« Moui bon, il y’a un petit souci sur les abscisses. »

(Aspect visuel, convivialitationnitudité, tout ça…)

Tentative de faire un regroupement de champ avec un tableau de données de 3000 enregistrements. Boum, ça pète.

« Ça devient moins rapide au fur et à mesure qu’on rajoute des fonctionnalités. »

Euh, non. Quand le moteur interne est bien structuré et que la fonctionnalité est ajoutée correctement, ça ralentit pas tout le reste. Mais bon…

« Ouh, vous êtes un aventurier. »

C’est la réponse que j’ai obtenue après avoir demandé qu’on teste quelque chose de particulier (je ne sais même plus ce que c’était, et osef). À vrai dire, j’avais à peine énoncé une action préliminaire à ce que je voulais réellement voir testé. Rien que ça faisait déjà de moi « un aventurier ».

« Globalement, normalement, ça fonctionne. »

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Parfois, les problèmes ne viennent pas d’un vilain et inattendu effet démo, mais des fonctionnalités elles-mêmes, ou de la manière de les présenter.

« À la demande de beaucoup de nos clients, l’enquête de satisfaction a été intégrée dans les mails ».

Dit comme ça, c’est impressionnant. En vérité, c’est juste des urls ouvrant sur une page spécifique de Pochtronarr. Et comme les infos de connexion ne sont pas enregistrées dans un cookie comme dans tout site qui se respecte (me demandez pas où elles sont enregistrées, j’ai même pas cherché), eh bien il faut se relogger pour répondre à l’enquête. Passons…

Démonstration de cette fonctionnalité. L’exécuteur de la démo clique sur la note la plus mauvaise (un petit smiley pas content du tout, #on_est_trop_des_geeks) et indique en commentaire : « ça ne marche pas, gros nuls ». Voilà un story-telling couronné de conconvivivialiturpitude !

« Le champ ‘Remarques’, vous oubliez ».

Ce champ contenait du putain de SQL. Merci de ne pas nous prendre pour des débiles. S’il est là, à priori c’est pas pour rien et faut justement pas « l’oublier ». D’autres part, quelle décadence d’enchaînement d’événements a-t-on dû s’infliger pour se retrouver dans une situation dans laquelle un champ intitulé « Remarques » doit contenir du SQL  ?

« Wolk on line »

Il s’agit de la manière dont Fournisseur-Consultant Frigo prononce le terme « Wake on lan ». (Plus de détails ici : https :// fr.wikipedia.org/wiki/Wake-on-LAN).

De manière générale, j’ai remarqué que l’ensemble des interfaces et de la documentation de Pochtronarr montre des symptômes inquiétants de gloubiboulgatisation sémantique et de mauvaise maîtrise du langage (qu’il soit parlé ou de programmation) : fautes d’orthographes, homonymes dans les noms de concepts, code non factorisé, encodage et caractères spéciaux non compris, etc. Ce « wolk on line » en est une confirmation.

Vous vous rappelez de Collègue Eurod’, l’anti-Raymond Devos de l’ancienne crémerie où je travaillais ? Je retrouve un petit peu de lui dans Pochtronarr.

Sur ce, les fabuleuses démonstrations du matin se terminent, il est temps de se précipiter vers la boustifaillou-graillasse.

 

Repas de midi

Sauf que c’est pas tout de suite l’instant boustifaillou-graillasse. Là c’est « temps libre pour sociabiliser avec nos homologues d’autres sociétés ». Une idée fort louable, mais pour laquelle je n’ai que très peu de talent. J’envoie un SMS à une personne imaginaire pour me donner une contenance.

Semi-Chef Pez, qui est meilleur que moi à ces mondanités, parvient à choper « Monsieur Mucarpet », un techos d’apparat de chez CarGlass affublé de lunettes de la sécurité sociale. Oui oui, ils ont des techniciens informatiques chez CarGlass. Et leurs verres de lunettes sont très épais.

C’est une belle prise de la part de Pez, car nos deux instances de Pochtronarr ont un bug en commun. Une histoire de changement d’état d’un neuro-transmetteur virtuel qui est aléatoirement non pris en compte. On est à la fois rassurés de voir qu’on n’est pas les seuls à avoir une foule de problèmes avec cette merde, et inquiets de voir que ces problèmes ne semblent pas résolus, ni même pris en compte, ni même reconnus par les ploucocratiens.

On tente de le leur faire entendre. Fournisseur-Dir-Tech Ashereff répond : « chez d’autres clients ça marche », et « c’est la faute à vos scripts métiers, quand vous en codez un, il faut toujours mettre le changement d’état en dernier ». Je veux bien être d’accord, mais le bug a lieu lors de l’exécution d’un script standard fourni avec Pochtronarr. Donc soit ils respectent pas leurs propres consignes, soit ça vient pas de là. Bref, chou blanc pour tenter d’attirer leur attention sur ce bug.

Entre temps, Semi-Chef Pez alpague d’autres ploucocratiens pour les vilipender, comme quoi l’installation de notre Pochtronarr aurait été effectuée via un concours de lancers de seaux de vomi.

Les ploucocratiens alpagués admettent sans trop de résistance que le consultant qui nous a été affecté s’est révélé par la suite être un radiateur de la planète Radiateur, déguisé en humain et visitant la Terre dans le cadre d’une excursion « Tourisme authentique de galaxies panachées ». Il a été viré depuis, mais les séquelles de son passage parmi nous restent encore.

Je suis content que Ploucocratt avoue avoir copieusement merdé. Par contre le minimum aurait été de réparer. Or, la seule chose qu’ils nous proposent c’est : « on corrige vos bugs, on finit de livrer ce que vous avez demandé au départ, on tire un trait et on repart à zéro ». Mouais bof. Je trouve ça un peu léger comme réponse. Et de toutes façons, il n’ont pas spécialement corrigé leurs bugs (se référer à ce que je viens de raconter juste avant).

Dialogue entre Semi-Chef Pez et Fournisseuse-Commerciale Jacquotte :

− On aimerait aussi avoir une fonctionnalité d’arborescentisation des psycho-tropismes. Comment on peut faire ça ?
− Pour toute demande d’évolution, voyez avec votre consultant.
− Oui, et c’est qui ? Parce que ça a changé quatre fois depuis cette histoire de radiateur déguisé en humain.
− …

Jean-Rudy Radiateur, en train de se reposer.

Fini pour aujourd’hui

Comme annoncé, je coupe ce récit en deux. La suite arrivera le mois prochain. J’imagine qu’une multitude de questions cruciales hantent maintenant votre esprit :

  • Qui remportera les cadeaux du quizz idiot ?
  • Réchèr aura-t-il l’occasion de boire suffisamment d’alcool pour se désinhiber et dire ce qu’il pense vraiment de Pochtronarr ?
  • Quel est le secret du nom de Fournisseur-Consultant Frigo ?
  • Pourquoi ?

Vous le saurez au prochain numéro.

J’ai changé de crémerie (3/3)

Suite et fin de la catharsis de mon incarnation professionnelle à Zarma.pro.

Collègue Je-Sais-Tout

Vous vous rappelez, quand vous étiez gamin, on vous parlait souvent d’un Monsieur ou d’une Madame Je-Sais-Tout ? Eh bien le Monsieur c’est lui. Je l’ai rencontré en vrai.

Inutile de décrire sa particularité comportementale, je vais vous narrer sans plus tarder ses anecdotes rigolotes.

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Je lui dit que je vais mettre mes écouteurs, car j’ai besoin de me focuser sur du code. Du coup, il me demande ce que j’aime comme musique.

Cette question m’a toujours embêté. D’un côté il y a les mélomanes intégristes, qui connaissent exactement tous les sous-genres de ce qu’ils apprécient et qui sont capables de vous sortir des phrases comme « Hannnn, mais n’importe quoi ! C’est pas du trash-metal que t’écoutes, c’est du grindcore, ça n’a riiiiieeeeen à voir ! ». De l’autre côté il y a moi.

Lorsque j’écoute une musique, je sais dire si je l’aime ou pas. Je sais dire quelle type générique de son ou de mélodie j’aime entendre, même si, lorsque je l’écris, ça donne pas grand-chose :

J’aime la musique qui fait ‘rotototototom’ avec des ‘wobwobwob’. Et si en fond il y a un petit ‘pala-lala-pam’, je kiffe taquet grave.

Mais j’ai toujours été incapable de donner le genre précis de la musique qui me plaît. Je crois que j’aime la dub. Il est possible que je me fourvoie sur ce qu’est réellement ‘la dub’ et qu’en réalité ce que j’aime soit du dubstep, du trip-hop ou juste de l’électro. J’en sais rien. D’ailleurs faudrait que je planche sur le sujet, car ça me pose problème lorsque je cherche des nouvelles choses à écouter sur internet.

J’explique à Collègue Je-Sais-Tout mon ignorance des genres musicaux. Il me demande s’il peut écouter. Je lui prête les oreillettes. 10 secondes plus tard, il me sort tout fier : « c’est de la world techno ».

Ah ouais d’accord. Je me disais aussi. Heureusement qu’il est là pour m’apprendre des trucs.

Je n’ai aucune idée de ce qu’est la ‘world techno’, il est tout à fait possible que ce soit réellement ça que j’écoute. Mais ce dont je suis sûr, c’est qu’il ne connait rien à ce domaine de la musique. Lui il écoute du rock. C’est très bien le rock, il s’y connait sûrement à fond. Mais mon embryon de connaissance mélomanique me permet quand même de savoir que le rock n’a pas grand chose à voir avec le/la dub/trip-hop/electro/world-techno. Il serait donc gentil de la boucler.

En plus, ce boulet écoutait de la radio main-stream gavée de pub, genre RTL2. Il pourrissait sonoriquement notre burlingue avec. Du main-stream en streaming, ha ha ha.

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World ? Techno ?

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Il me dit de trier régulièrement mes mails et de les classer comme il faut dans des répertoires. Je lui explique que ça prend vachement de temps, que pour retrouver un mail c’est plus simple et plus rapide de faire une recherche. Ce à quoi il a répondu : « Trier, c’est important. Ça permet de mieux s’y retrouver. Force-toi à le faire ».

Un rangement sous forme d’arborescence de répertoires, que ce soit pour des mails ou autre chose, ça finit très souvent par des incohérences ou des impossibilités. On se dit qu’on y arrivera car on est beau et pailleté, qu’on tombera pas dans les pièges stupides où d’autres sont tombés. On crée vaillamment un répertoire par client, dans lequel on met un répertoire par projet, ou vice-versa. Tout est beau et propre. Et puis un beau jour, un projet est vendu à plusieurs clients, ou un client envoie un mail récapitulant les points en cours sur plusieurs projets, et tout foire.

L’idéal c’est un système de tags, ça permet des relations de type n-n. Sauf que ça prend tout autant de temps, sinon plus, que de ranger par répertoire, et ça reste moins pratique que de faire des simples recherches de mots.

Du coup je m’étais fait un répertoire ‘à ranger’. Quand Je-Sais-Tout constatait un trop-plein de mails dans ma boîte de réception et qu’il me demandait de les trier, je mettais tout en vrac dedans. Il y avait une jolie arborescence bidon juste à côté, pour faire genre. Hop, ni vu ni connu je t’embrouille.

papers

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Dans mon dernier article, j’ai raconté l’épisode le plus merdique vécu à Zarma.pro. Voici maintenant l’un des plus stressants. Ça s’est passé lors d’une grosse démo, d’un logiciel que nous appellerons ‘Chabraque’. Aaaaah, les démos ! Tout le monde aime les démos.

La veille, on prépare tout bien comme il faut. (‘La veille’ ≠ ‘Complètement à l’arrache’. Je nous serais considéré à l’arrache uniquement si on avait préparé le jour même). Collègue Je-Sais-Tout installe Chabraque sur un mini-ordinateur. C’était pas une tablette ni un ultra-portable, mais un machin bizarre avec une poignée, un peu comme un jerrycan. (À Zarma.pro, on se retrouvait très souvent avec une palanquée de matos bizarre, j’ai jamais su pourquoi).

Collègue SuperCommercial vient vérifier que tout est prêt. Il demande si ce machin à poignée pourra afficher la démo sur le grand écran prévu à cet effet. Je-Sais-Tout répond : « Oui, pas de souci. Regarde, ça c’est une prise écran. Je brancherai ce câble dessus, et tac-tac-boum ! C’est exactement comme ton ordinateur qui a deux écrans. Tout pareil, mec. Tout pareil ! »

Collègue SuperCommercial redemande si c’est vraiment sûr que ça marchera. Je-Sais-Tout confirme.

Le lendemain, on arrive sur place, on tente de brancher. Epic fail ! La prise du machin à poignée n’était pas du VGA (pour les écrans) mais du série (pour un peu n’importe quoi, surtout des vieux appareils, mais certainement pas des écrans).

Panique totale. Il nous restait deux heures pour préparer, sauf qu’on ne pouvait pas retourner à la boîte et qu’on n’avait pas d’autre matos adapté. On a poireauté-stressé en attendant que Collègue SuperCommercial arrive avec son PC portable normal et sans poignée, on a tout installé dessus à l’arrache, ça a merdé à cause du middleware tantrique de merde (la foirure déjà mentionnée dans mes articles précédents) et finalement on a installé Modeli-Morvax 1.0 encore plus à l’arrache. Pour la démo, on ne s’en est pas trop mal tiré : on en a déroulé un bout sur le Chabraque du machin à poignée qu’on faisait passer parmi les gens et l’autre bout sur Modeli-Morvax.

On s’est bien évidemment fait engueuler par tous les chefs, comme quoi qu’on testait jamais rien jusqu’au bout et qu’on balarguait toujours tout en direct-live comme les dangereux gougnaffiers du chaos qu’on était.

Soyons clair, on méritait de se faire engueuler, on avait effectivement fait une connerie.

Soyons clair, je jette pas la pierre à Je-Sais-Tout pour cette bourde. Les prises séries et VGA, ça a tendance à se ressembler.

 

port série

port série (pour vieux trucs)

port VGA (vidéo)

port VGA (pour écrans)

Soyons clair, je suis aussi fautif que lui. La veille, j’avais tout le temps de vérifier le branchement ou d’insister auprès de Je-Sais-Tout pour qu’il vérifie jusqu’au bout. Je n’ai rien fait de ces actions. On aurait pu se rendre compte plus tôt que les prises faisaient pas papa-maman, ce qui nous aurait permis de régler le problème au calme.

Le problème n’est pas là. Le problème, c’est ce qu’a ensuite raconté Je-Sais-Tout à d’autres collègues. Il s’est plaint qu’on s’était fait engueuler, dans les termes suivants : « C’était pas la bonne prise. Pas de bol. Par contre, on s’est fait pouuuuuurriiiiiiiiiiiir ! ».

Non. Pas : ‘pas de bol’. C’est pas de la malchance, andouille. C’était de NOTRE FAUTE. Tu seras bien gentil de pas la ramener et d’occulter cet épisode de ta vie, afin qu’il soit progressivement oublié par le reste du monde. Parce qu’en rappelant une connerie qu’on a faite et en insistant lourdement dessus, tu jettes quelques tonnes de discrédit sur toi-même et accessoirement sur moi aussi. Donc ta gueule, Je-Sais-Tout. Tu fermes simplement ta gueule.

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Pour notre fameux produit Modeli-Morvax, il a fait un premier document de spec globales listant les fonctions à implémenter ainsi qu’un planning prévisionnel, à l’aide d’un logiciel de gestion de projet (je ne sais plus lequel).

Puis on a oublié qu’il avait fait tout ça. Il a refait la liste des fonctions et le planning, avec un autre logiciel de gestion de projet.

Et je me demande même si ça ne s’est pas répété une troisième fois.

Ça m’a toujours fait beaucoup rire les logiciels de gestion de projets. J’ai jamais vraiment compris ce qu’ils étaient censés faire, de plus ils sont tous payants.

Tout ce que je sais, c’est qu’à la fin, ça te chie un diagramme de Gantt, que Je-Sais-Tout était super content d’avoir. Chaque tâche était conditionnée à la réalisation de la tâche précédente, du coup le diagramme était une simple ligne descendante. Ça valait pas le coup de perdre du temps ni de la vie pour ça, on aurait pu tout lister vite fait dans un fichier texte.

Je pense qu’il aurait dû ajouter la tâche « remplir le diagramme de Gantt » dans son diagramme de Gantt.

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Un jour, Je-Sais-Tout s’est mis en tête de recenser les menus et fenêtres de ce toujours aussi fameux Modeli-Morvax. Il voulait les mettre dans un espèce de diagramme de pas-Gantt, en représentant les liens entre eux. C’est fort louable, surtout qu’on commençait à avoir pas mal d’éléments, et ça aurait pu faire un joli schéma à intégrer dans le manuel utilisateur.

Ce taré a fait trouzemille screenshots, les a imprimés et les a placés sur un grand poster. Je lui ai suggéré : « Euh… ce serait pas mieux de le faire en employant, tu sais, l’informatique ? À l’aide d’un, wouhou, logiciel, genre Visio, Powerpoint, ou même Paint, il est possible de créer des objets virtuels multimédias directement dans le cyberespace. C’est formid’ ! ».

Il m’a répondu par cet argument imparable : « on voit mieux quand c’est en grand sur du papier ». Bien sûr, suis-je bête.

Son atelier ‘découpage & collage’ a duré tout un après-midi. On avait décidé que la majorité de l’interface de Modeli-Morvax serait sur fond noir geeko-classe. Sur un écran, ça rend bien, mais dans le monde réel, c’est relativement crapouillou. Ses feuilles étaient devenues de véritables éponges gorgées de plusieurs gigalitres d’encre, ce qui l’a obligé a utiliser du papier plus épais et de qualité supérieure. La cartouche de noir était aussi vidée qu’un pitbull pédophile dans un jardin d’enfants. Bref, un concentré de gaspillage de temps et d’argent assez impressionnant.

Pour parachever l’absurdité de son œuvre, il avait tout assemblé à l’arrache avec des bouts de scotch claqués à la hussarde porcasse. Comme quoi : « en grand et sur du papier », on voit mieux que ça a été fait dégueulassement.

Quelques mois plus tard, on est passé à la version 2 de Modeli-Morvax. L’interface n’avait plus rien à voir. Son monstre de papier collant et dégoulinant a été mis à la benne. Une bien triste fin.

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Oh, et il y a eu la fois où Collèguette MesCouilles présentait son nouveau projet à toute la Te-boî. Elle a dit une phrase genre « concrètement, ça nous offre le challenge de devoir littéralement faire des cascades avec des requins », quelqu’un de quelconque a renchéri d’une blague du style : « attention, te fais pas mal, lol ! ». MesCouilles a alors répondu : « certes, mais on aura une bonne mutuelle ».

(Expliqué de cette manière, ça a l’air débile. Mais dans le contexte, ça se tenait).

Je-Sais-Tout, qui était assis à côté de moi, m’a discrètement soufflé à l’oreille : « c’est très habile, comme réponse ».

Il faut reconnaître que c’était effectivement semi-habile. Ces derniers mois, on était en pleine discussion sur le choix de la mutuelle qui allait devenir obligatoire et que les patrons allaient devoir payer à leurs ouvriers (ha ha ha ! pwnz ! ). Il est étrange que les entreprises doivent s’occuper de considérations relatives à la santé, mais c’est un sujet totalement autre, que nous n’aborderons pas ici. MesCouilles suggérait donc subtilement aux patrons qu’ils avaient intérêt à faire péter une mutuelle digne de ce nom.

Je-Sais-Tout avait donc raison en m’annonçant que c’était ‘très habile’. Et c’est cool. Sauf que c’est un peu du Captain Obvious. Et donc moi, en tant que personne un minimum au courant du monde physique à ma proximité, j’aurais dû approuver Je-Sais-Tout, afin de montrer que j’avais moi aussi repéré la très-habileté du propos.

Malheureusement, j’étais occupé à mesurer l’amplitude des mouvements de seins de Collèguette MesCouilles lorsqu’elle se déplaçait du côté droit de l’écran géant à PowerPoint vers le côté gauche de l’écran géant à PowerPoint. Du coup, j’avais pas repéré le Captain Obvious. Tout ce que j’ai trouvé à répondre à Je-Sais-Tout, c’est : « Ah bon ? ». Il m’a alors regardé d’un air malicieux.

Il a cru que je n’étais pas assez subtil dans ma tête pour repérer l’habileté de Colléguette MesCouilles. Je me suis alors dit : « Merde, il pense que j’ai vraiment besoin de lui pour comprendre les réalités de la vie, il va se déchaîner en continu à me sortir des brouettées de Captain Obvious ».

L’avenir montra qu’il n’a pas sorti plus de Captain Obvious que ce qu’il aurait pu sortir s’il m’avait pris pour un mec intelligent et pas accro aux nichons. Donc finalement tout va bien. C’est l’intérêt des gens qui sont dans leur petit monde de Je-Sais-Tout-itude. Tu peux faire n’importe quoi à côté d’eux, ils se comporteront toujours de la même manière.

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Pour les loisirs et les discussions hors travail, Je-Sais-Tout se la pétait également.

Il a découvert Battle for Wesnoth, un jeu de stratégie tour par tour bien sympa. Tout fier, il m’explique qu’il emploie une ‘stratégie par annihilation complète’. La façon dont il m’a énoncé cette vérité montrait bien qu’il pensait avoir inventé un concept totalement inédit. J’ai bien senti qu’il se gargarisait d’avance de me l’expliquer afin d’étaler sa science et me tartiner son génie jusque dans les parois internes de ma boîte crânienne.

Sa ‘stratégie par annihilation complète’ consiste à conserver provisoirement le dernier bâtiment d’une base ennemie. La partie n’est pas immédiatement gagnée, ce qui permet d’explorer toute la map et d’éliminer les unités hostiles restantes. La plupart des joueurs font ça. Et ceux qui ne le font pas ont au moins eu l’idée de le faire.

Ensuite, il m’a expliqué que juste avant l’attaque d’un de ces personnages, il sauvegardait et rechargeait sa partie tant que 100% des coups n’avaient pas touchés. Là encore, il était tout fou-fou de m’apprendre ça.

Je profite de l’occasion pour vous apprendre un mot de vocabulaire, tout en ayant l’humilité d’envisager la possibilité que vous le connaissiez déjà. Cette technique de sauvegarde-rechargement se nomme ‘save scumming’. Et donc, si ça porte un nom, c’est forcément que d’autres personnes y ont pensé avant ce cher Je-Sais-Tout.

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Il m’a également fait une ‘Star What’, ce qui est assez peu étonnant venant de lui. Il s’agit d’un acte assez fréquent, même les quotidiens les plus sérieux s’y amusent (http:// www. legorafi.fr/2015/12/15/le-gorafi-a-vu-pour-vous-star-wars-le-reveil-de-la-force/).

Vous ne savez pas ce qu’est une Star What ? Attendez, je vous la fais :

« Star Wars n’est pas un film réaliste, car en vrai il n’y a pas de sons dans l’espace. »

Les gens qui commettent des Star Whats, j’ai envie de les cogner. Bande d’abrutis ! Des rayons lasers qui s’arrêtent au bout de 40 centimètres, c’est réaliste ? Et un robot à roulettes qui se déplace dans du sable sans se vautrer lamentablement ? Et la créature aux gros doigts poilus qui ne se trompe jamais lorsqu’elle appuie sur les tout petits boutons du tableau de bord d’un vaisseau spatial ? (Vaisseau spatial que le propriétaire doit certainement traiter toutes les deux semaines contre les poux et les parasites vu la touffasse de poils du sus-mentionné machin).

Je vous laisse vous renseigner sur la notion de ‘suspension consentie de l’incrédulité’.

Le seul truc ‘incohérent’ (et non pas ‘irréaliste’) que je vois dans Star Wars, c’est Jar Jar Binks ayant réussi à atteindre l’âge adulte sans que personne ne l’ait préalablement massacré d’agacement. Il ne semble pas y avoir plus de sons dans l’espace que de darwinisme chez les Jar-jar-binkiens (j’emmerde le type dans le fond qui vient de piailler que ce sont des Gungans).

jar-jar-binks-is-dead

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Comme vous le savez (ou pas, mais osef), j’utilise la disposition de clavier Dvorak-bépo (https:// bepo. fr/wiki/Accueil). J’en ai chié des briques au début, puis je me suis senti suffisamment en confiance pour l’installer sur le PC du boulot.

J’en ai fait part à différents collègues, principalement pour me la péter mais aussi pour tenter de les convertir. (L’un d’eux s’y est essayé, ça m’a fait plaisir).

Je-Sais-Tout, pour qui toute idée ne venant pas de lui-même est systématiquement de la merde en branche, m’a très sérieusement expliqué que j’allais me retrouver dans la même situation que les gauchers. Ces pauvres gens ingâtés par la nature doivent continuellement switcher leur cerveau, selon qu’ils utilisent des objets génériques à préférence droitière ou des objets spécifiques à préférence gauchère. Je subis le même désagrément lorsque je passe momentanément sur un clavier azerty ‘normal’.

Ce switching est la raison pour laquelle les gauchers ont une espérance de vie un peu plus courte (leur cerveau et leurs muscles s’usent plus vite). Comme eux, je risque de mourir plus tôt.

Woaouw.

C’est bien connu : les bilingues, les gens utilisant plusieurs véhicules, les bisexuels et les bi-biphoques meurent tous prématurément.

J’ai lu quelque part que l’espérance de vie des gauchers semble statistiquement plus courte car les ‘gauchers seniors’ ne sont pas enregistrés comme tel. Il y a quelques dizaines d’années, on forçait tout le monde à utiliser sa main droite, et des gens qui auraient du être gaucher ont fini droitier ou gaucher contrarié. Il faut donc attendre encore une génération ou deux pour avoir des données fiables sur cette caractéristique.

Et même si les prédictions divinatoires de Je-Sais-Tout se révélaient exactes, je préfère mourir un peu plus tôt que vivre rongé par le regret permanent de ne pas avoir eu le courage de passer au clavier Dvorak-bépo. J’ai gagné la petite satisfaction personnelle d’avoir réussi à changer une habitude qui m’a été imposée par la masse populaire. Utiliser le Dvorak-bépo vous rend hype.

Lorsque je fais découvrir cette disposition de clavier à d’autres personnes, la plupart ne sont pas intéressées, trouvent ça bizarre ou estiment que c’est une perte de temps. C’est là ou Je-Sais-Tout est plus fort que les autres : il considère tellement que c’est une idée de merde qu’il tente de m’en sauver en me disant qu’elle va me faire vieillir prématurément. C’est une sorte d’égocentrique altruiste. Je ne savais même pas que c’était possible.

Attention, c'est une arme de vieillissement prématuré massif !

Attention, c’est une arme de vieillissement prématuré massif !

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Un jour, je lui ai dit comme ça : « C’est bizarre, à chaque fois que je prends une douche, j’ai soif juste après. »

Il m’a répondu : « Oui. L’eau, ça assèche. »

Du coup, je reste beaucoup moins de temps sous la douche, de peur de finir déshydraté.

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Lorsqu’il a appris la manière dont j’ai trouvé mon nouvel emploi (une candidature spontanée qui a mariné pendant un an avant de réapparaître), il a proféré d’une voix collégiale : « tu as pris un risque énoooooorme ».

Il voulait dire que cette candidature aurait pu ne pas aboutir, tout en parvenant malgré tout aux oreilles de Zarma.pro. Ça ne m’aurait pas mis en situation avantageuse : les divers chefs et collègues auraient été en droit de me le reprocher.

Je ne vois pas où est le problème. J’en avais vraiment marre de Zarma.pro (pour avoir le détail, lire mes articles précédents). J’essayais de faire ressentir cette marritude à mes chefs tout en leur empêchant d’y opposer du bullshit de type : « tu n’es qu’un gamin pleurnichard. Fais des efforts et on trouvera le moyen de te récompenser. Blabla implication blabla engagement blabla proactif. ».

Qu’ils apprennent d’une manière détournée que j’en ai ma claque au point de vouloir me barrer, ça me semblait être un signal d’alerte acceptable. Je m’en suis également servi pour m’aider à préserver ma santé mentale : je m’accrochais à ces petites lueurs d’espoir, ces candidatures spontanées que je lançais de ci de là, telles des bouteilles à la mer. ♫ ♪ ♬ Pris dans leur vaisseau de verre, les messages luttent, na na la la la la-la la, nia nia nia nia sur les rocheeeeeeeeeers ♪ ♫

De toutes façons, les chefs auraient fait quoi en ‘représailles’ ? Bloquer mes augmentations de salaire ? Me donner des tâches que j’aime pas tel que des maintenances client, au lieu de me laisser m’auto-kiffer sur du développement ? Me stresser à tel point que je me sente obligé de faire des heures sup’ d’esclaves sans même qu’ils aient besoin de me le demander explicitement ? Me dire en continu pendant plusieurs années que c’est pas le bon moment pour prendre des vacances ? Me retirer les projets que j’aime pour les jeter en pâture à Drache-Code qui les a gloubiboulgatisés ?

Ah non, c’est bon. Ils ont déjà fait tout ça. Du coup il n’y avait plus de représailles possibles.

Je soupçonne Je-Sais-Tout d’être un peu jaloux. Lui aussi aurait peut-être aimé partir de Zarma.pro. Là, il s’aperçoit qu’il avait une chance de le faire, mais elle lui est passée sous le nez. Alors il essaye de s’auto-rassurer en se disant qu’il n’aurait pas pu la saisir, car ça aurait impliqué qu’il prenne ‘un risque énoooooorme’. Peut-être qu’il est triste dans son coin et que pour minimiser cette tristesse, il se dit qu’il n’y pouvait rien, car il a choisi la sécurité pour sa vie professionnelle et familiale.

Honnêtement, je ne crois même pas que je puisse me vanter d’avoir pris un risque. Je ne pense pas être quelqu’un de vraiment courageux, en particulier pour tout ce qui concerne le Travail. Faire des candidatures spontanées, ce n’est pas un truc de ouf. Faut arrêter la parano.

Paranoia

D’autres gens

J’avais vraiment besoin de me lâcher sur mes chefs et quelques collègues en particulier. Ceci étant fait, il reste des personnes sur qui j’ai une quantité honorable de bêtises à dire. Je vous met tout en vrac.

Colléguette Dièse-effe-huit-effe

L’une des secrétaires. Elle s’appelle ainsi rapport à sa couleur préférée.

J’étais son délégué suppléant. Oui, figurez-vous que suite à un concours de circonstances un peu long à raconter et totalement inintéressant, j’ai été élu délégué du personnel et faisais partie du comité d’entreprise. Je l’ai techniquement souhaité, et je me suis dit que ce serait l’occasion de faire des trucs cools.

L’ensemble des délégués a accompli une foule de choses : organiser des repas de Noël, négocier cette fameuse mutuelle d’entreprise, reprendre les calculs d’indemnisation des déplacements, etc. Mais je n’ai personnellement servi à rien dans toutes ces réalisations.

J’assistais aux réunions et notais les phrases rigolotes de chacun pour me donner une contenance. C’est tout. Concernant les actions concrètes, je ne savais jamais par où commencer, et n’osais pas demander de peur de passer pour encore plus débile que je ne l’étais. Mon absolue inutilité a certainement fini par se voir, mais personne n’a eu la cavaliéritude de me le dire.

J’espère que Dièse-effe-huit-effe n’a pas été trop embêtée d’avoir eu un suppléant aussi plante-vertesque. Elle ne méritait pas ça, c’était une nana cool.

Cette expérience m’a apporté deux choses :

  • Si on me demande de refaire délégué du personnel, je pourrais répondre, sans éprouver la moindre culpabilité : « non merci, j’ai déjà fait, je ne me suis pas trouvé très compétent ».
  • J’ai décidé que je ne dénigrerai jamais le travail effectué par d’autres délégués du personnel. Je leur demanderai des choses en cas de besoin, mais je ne dirai jamais qu’ils font de la merde ou qu’ils branlent rien.

Le repas de Noël. Mais y'avait pas Jésus.

Le repas de Noël. Mais y’avait pas Jésus.

Colléguette Maryse-Gâteau

Une autre secrétaire.

Je n’ai pas bien compris pourquoi tout le monde la portait aux nues. Elle travaillait beaucoup, sérieusement et bien, mais beaucoup d’autres gens dans la boîte faisaient montre de la même abnégation sans qu’on chante leurs louanges (oui, je m’inclus dedans). Est-ce que c’est parce qu’elle avait ‘un certain âge’ ? Je ne sais pas.

Le fait que tout le monde la portait aux nues lui donnait le droit implicite d’être exigeante envers les autres, ce qui m’a valu un moment merdique de plus.

Je suis dans le bureau-open-space en compagnie d’un stagiaire. Collègue Eurod’ était présent le matin mais était ensuite parti en déplacement. Je suis donc le seul à pouvoir répondre au téléphone. Celui-ci sonne. Un client avec un problème urgent. Il me blablate ses symptômes, je prends le contrôle de son PC par TeamViewer et commence à dépatouiller son bronx.

Le téléphone re-sonne. Un autre client avec un autre problème. Il me précise que c’est ‘urgent urgent urgent’, soit deux ‘urgents’ de plus que le client précédent. Je décide donc de m’en occuper tout de suite. (Je m’étais établi mon propre système de hiérarchisation des tâches, suite aux non-définitions de priorités par Chef Random). Blablatage symptôme, TeamViewer, débronxage en cours.

Le téléphone de Collègue Eurod’ sonne. Un client jean-foutre qui veut qu’on lui renvoie son contrat de maintenance, parce qu’il ne parvient plus à le retrouver dans son bordel. C’est une tâche administrative, j’estime donc que ce n’est pas à moi de la faire, d’autant plus que je ne sais même pas où trouver ce papier à la con. Je lui dit de voir ça avec notre secrétaire et lui donne le numéro à appeler. Normalement on ne doit pas faire comme ça, on doit transférer l’appel. Mais je ne suis jamais sûr d’y parvenir avec ces téléphones auxquels je ne comprends rien et je voulais me débarrasser très vite de ce clampin car j’étais toujours au téléphone avec le client urgent urgent urgent.

Le téléphone de Collègue Eurod’ re-sonne. C’est Maryse-Gâteau pour me dire qu’elle vient d’avoir un client à la con requérant son contrat de maintenance à la con. Je lui dit que je suis au courant et que c’est moi qui l’ai refilé à Dièse-Effe-Huit-Effe. Mais cette dernière n’était pas à son bureau, c’est donc Maryse-Gâteau qui a pris l’appel. Cette dernière-dernière voulait avoir Collègue Eurod’ pour qu’il lui donne ce putain de contrat. Mais ce dernier n’était plus là. Mais elle ne s’en est pas rendu compte puisqu’elle l’avait vu le matin. Elle me dit : « Tu peux pas lui donner toi-même, ce contrat de maintenance ? ». Je dit que non, parce que je sais pas où il est. Elle rétorque « Ah bah voilà, si personne n’y met pas un peu du sien », puis elle raccroche.

5 minutes plus tard, Maryse-Gâteau débarque dans mon burlingue-open-space, ouvre un placard, en sort un classeur à paperasse, le referme en faisant « blong » bien fort et repart en clac-claquant des talons.

Je dis à mon client en cours que j’ai un petit truc urgent urgent urgent urgent à faire et que je le reprendrai dans quelques minutes. Je vais voir Maryse-Gâteau. Elle s’était construit un superbe regard lourdement armé de reproches. Je me confonds en excuses. Elle m’engueule comme quoi on est passé pour des imbéciles auprès du client qui a dû appeler plusieurs numéros à la suite, que j’aurais dû transférer l’appel ce qui m’aurait permis d’expliquer préalablement la situation.

Elle avait raison, mais j’estime que je ne méritais pas de me faire engueuler à ce point là. Je ne lui ai même pas dit que j’avais deux maintenances simultanées en cours. D’une part j’ai pas osé parce que ça risquait de la foutre encore plus en colère que je me permette de lui parler de MES problèmes de Travail, d’autre part elle m’a pas laissé en placer une et d’autre-autre part j’entrais dans la période où je commençais à en avoir plus rien à foutre de cette boîte.

Quelques semaines plus tard, je fais mon entretien quadri-annuel d’évaluation avec Chef Random. Il mentionne cette désastreuse histoire et fournit son avis personnel, à savoir que j’avais vraiment merdé. Ce gros nul avait tout suivi depuis son bureau juste à côté, il s’en servait pour me pourrir non-subtilement. Quand je vous disais que ce mec était un tocard social.

Lorsqu’elle devait s’absenter, Maryse-Gâteau me demandait parfois si elle pouvait rediriger son téléphone vers le mien. J’avais alors la charge de secrétaire. J’étais un tout petit peu fier qu’elle me confie cette tâche. Étrangement, elle ne me l’a plus jamais demandé ensuite. À vrai dire ça m’arrangeait. Je suis nul en secrétaire, j’ai une voix de benêt au téléphone et je fais des « euuuuh » d’adolescent de 13 ans.

Avant que tout cela n’arrive, il m’était arrivé une fois de rêver d’elle. Un rêve bizarre, mais tout public. Elle s’était monté un stand en plein milieu d’un immeuble en construction, avec une porte posée sur des tréteaux, et elle vendait des gâteaux. Les ouvriers passaient à côté d’elle sans vraiment y faire attention, mais elle gardait le sourire et l’espoir.

C’était mignon comme rêve et ça collait super bien à sa personnalité et ses hobbies. Je me suis dit que j’aurais pu lui raconter, à l’occasion, durant une pause café. Ça l’aurait fait rire. Je ne l’ai pas fait parce que raconter ses rêves relève d’une ouverture à l’autre assez intime. Elle aurait peut-être été gênée que je lui dévoile quelque chose d’aussi personnel. Finalement, j’ai bien fait d’avoir gardé ça pour moi.

Oui, c'est un gâteau. En forme de téléphone.

Oui, c’est un gâteau. En forme de téléphone.

Un jour, Collègue Tourbator avait lancé un concours de pâtisserie. Tous les mardis, quelqu’un apportait un gâteau fait maison. On le mangeait pendant la pause, on donnait des notes et le gagnant recevait je-sais-plus-quoi. J’avais participé avec un gâteau-minecraft qui me valut de ne pas terminer dernier, j’étais assez content de moi.

Maryse-Gâteau a remporté la palme avec des ultimo-tartelettes vraiment délicieuses. Est-ce qu’elle méritait vraiment de gagner ou est-ce que des gens lui ont hypocritement donné une très bonne note parce qu’ils la portent aux nues ? Je ne sais pas.

Une autre fois, elle a envoyé un mail pour signaler qu’un outil mis en place par Collègue SuperFlamby ne lui convenait pas. Elle avait raison, le bidule l’obligeait à faire une double saisie. Hou que c’est vilain les doubles saisies ! Personne n’aime ça.

Sauf qu’elle a envoyé ce mail à tout le monde au lieu de le limiter à SuperFlamby. On ne crie pas intempestivement à la face du monde ses râleries professio-personnelles, c’est donc une faute qui aurait pu lui être reprochée. J’ose espérer que MegaChef Storitel s’en est chargé, c’est quand même le rôle d’un chef d’effectuer ce genre de recadrage. Mais parmi les collègues de même rang professionnel : bernique. Je n’ai eu vent d’aucune remarque qui lui aurait été faite. Alors que par ailleurs, divers déblaterrages sur diverses personnes s’échouaient dans mes récepteurs auditifs et visuels.

Une autre-autre fois, elle a traversé notre burlingue-open-space en se faisant la plus discrète possible tout en nous montrant qu’elle voulait être discrète. Je lui demande : « Tout va bien, Maryse-Gâteau ? ». Elle nous explique qu’elle venait de déblaterrer sur une technicienne-Cliente, la traitant de conne et autres noms d’oiseaux, et qu’ensuite elle s’était aperçue que cette personne attendait dans le couloir juste à côté. C’est pourquoi elle avait préféré s’éclipser discrètement par un chemin détourné.

C’est vrai que pourrir un Client alors qu’il y a un risque qu’il entende tout, c’est vachement moins grave que de le balader d’un numéro de téléphone à un autre. Mais là encore, personne n’est allé lui reprocher son erreur, alors que je n’étais pas seul dans le burlingue lorsqu’elle est passée.

Tout ça pour dire que je n’étais vraiment pas à l’aise avec Colléguette Maryse-Gâteau. J’avais l’impression d’être le seul sur Terre à m’apercevoir qu’elle faisait parfois des bêtises (comme tout humain normalement constitué) tandis que le reste du monde la portait aux nues et la trouvait constituée à 100% d’awesomeness professionel.

Maryse-Gâteau en stealth mode.

Maryse-Gâteau passant dans le burlingue en stealth mode.

Collègue SuperFlamby

C’était pas tout à fait un ‘collègue’, il était également chef d’un ensemble de bazar technique. Mais osef.

À chaque fois qu’il devait trancher, il choisissait la solution intermédiaire, d’où sa flambitude. Il utilisait des mots et des expressions pas très viril : « banette », « en regard de », « douchette », « lever un flag d’alerte » (en faisant le geste d’un petit drapeau qui se lève), …

Les scientifiques fous, dont j’ai parlé précédemment, avaient commandé un audit pour la conception de leur fameux logiciel d’analyse d’acariens. SuperFlamby avait rédigé un rapport assez bien ficelé, qui faisait office de document de spécification.

Ce rapport contenait plusieurs ‘stories’, des petites descriptions courtes racontant une utilisation particulière d’une fonctionnalité du logiciel. Il avait donc défini plusieurs profils d’utilisateurs, en attribuant un prénom à chacun, comme si c’était des gens du monde réel.

Je ne savais pas qu’on pouvait rédiger un document de spécification de cette manière. Ça aboutit à quelque chose de peu viril dans sa formulation, mais assez clair et bien présenté.

Par contre, là où il a complètement merdé, c’est au moment de baptiser les profils. Il y avait une « Renata ». WTF ? Même en Afrique post-colonialiste personne ne s’appelle comme ça !

C’était peut-être un clin d’œil scientifique à cette personne, ou celle-là (https:// en.wikipedia.org/wiki/Renata_Kallosh, https:// fr.wikipedia.org/wiki/Renata_Briano).

Hell Yeah ! Science !

Hell Yeah ! Science !

Actionnaire Roux

Étant donné mon niveau hiérarchique, je n’ai évidemment jamais eu la possibilité de l’approcher ni de m’imprégner de son aura divine.

Mais j’ai tout de même eu la chance de le voir apparaître à une méga-réunion annuelle corporate. Il nous a dit qu’en tant qu’Actionnaire, il était « confiant » et « rafraîchi » par des réunions comme ça.

Ensuite, on est allé bâffrer gratoche au traditionnel apéro empiffratoire du midi.

Collègue Nounours

J’en ai déjà parlé ici et là.

C’était un rayon de soleil pour mes espoirs de glandage professionnels. Je le voyais soit buller, soit faire des trucs qui ne servaient à rien. Il était ma preuve secrète de la possibilité d’atteindre un jour mon nirvana personnel, à savoir : donner l’impression à tout le monde que je travaille tout en glandant comme un porc et en passant mes journées à coder des jeux vidéos et écrire des articles de blogs.

Il allait parfois démarcher des gens pour présenter nos super-logiciels. À son retour, Cheffette Gothique lui demandait comment ça s’était passé. Il se contentait de répondre « tu sais, avec ce type de clients, c’est sur du loooooooong terme. » C’est tout. Ça consistait l’intégralité de son compte-rendu de démarchage. Un rayon de soleil, vous dis-je.

Une autre fois, il s’est mis en colère parce qu’il ne retrouvait plus des papiers qu’on lui avait déplacés lors d’un de nos déménagements à moment merdique. Il nous a dit : « merde, merde, merde ET MERDE ! ». Quelques jours plus tard, il les a retrouvés. C’était très drôle.

Du looooooooong terme.

Du looooooooong terme.

Collègue KoupChou

Le responsable ‘infrastructure du monde physique’.

C’est auprès de lui que je venais pleurer ou m’excuser quand je foutais le bordel avec l’alarme du bâtiment. (Le dernier à partir devait allumer l’alarme, mais y’avait toujours une capilotade qui empêchait de le faire. Je ne peux pas vous raconter ces épisodes foireux car j’y comprenais jamais rien).

Un jour, on a été envahis par des cochonneries de petits insectes. Je ne sais pas du tout ce que c’était, on les nommera donc : ‘ploncres’.

Je vais voir Collègue KoupChou pour lui en parler. Et là, est-ce que tu sais ce qu’il me répond, lecteur ?

« Oui, c’est rigolo. Quand on shoote dans l’un d’eux, il se recroqueville sur lui même et roule comme une petite bille ! »

Je veux bien entendre qu’être responsable monde-physique soit une charge compliquée et que la quantité de tâches qui en décombe ait pour conséquence qu’on ne puisse correctement prévoir ni repousser une invasion de ploncres. Mais quand ça arrive, ce serait bien d’avoir la décence de pas faire son malin.

Je m’attendais à ce que KoupChou ait une réponse éventuellement impuissante, mais au moins humble : « on a été attaqué par surprise, j’ai pas le temps de m’en occuper maintenant ». Eh bien non. De son joyeux aplomb auto-validant, il n’éprouve aucune culpabilité à brâmer : « Bibilles ! Lol ! « .

Je vous passe les considérations d’hygiène qu’on pourrait hypothétiquement avoir quant à la prolifération de ploncres.

Ploncre rush !

Ploncre rush !

Collègue SuperCommercial

Un type un peu inquiétant. Il disait tellement que ce qu’on faisait était génial, que ça ne semblait pas naturel. Surtout que des fois on faisait quand même bien de la merde.

J’ai eu un road trip à faire avec lui. Ça a été très compliqué, mais pas pour la conversation. C’est un super-commercial, il a donc ce super-pouvoir de générer automatiquement un sujet dès qu’il y a un blanc. Le problème a été la conduite. Je suis une incommensurable quiche dès que j’ai un volant à la main. Au début ça allait, c’était de l’autoroute. Puis on est arrivé dans une ville, il a fallu regarder le GPS en même temps que conduire. Multi-drames :

  • Je me suis planté 3 fois de route (le GPS indiquait le bon chemin, mais je n’arrivais pas à analyser précisément ce qu’il me disait),
  • je me suis arrêté en plein milieu d’un embranchement sans savoir où aller,
  • mon cerveau me faisait paniquer en continu à tel point que je ne voyais plus les feux passer au vert,
  • pour se garer, SuperCommercial m’a pris le volant des mains car je ne comprenais même plus dans quel sens ça tournait quand on reculait (au reste, j’ai jamais vraiment compris le fonctionnement de ce concept extrêmement bizarre de ‘marche arrière’).

Il était totalement désespéré. Je pense qu’il avait dépassé le stade de la pitié pour atteindre une sorte d’état supérieur s’apparentant à celui d’un observateur externe étudiant un singe dans un zoo.

Je déteste conduire, c’est de la merde. Mais si je me lance dans ce sujet j’en ai encore pour 12 articles.

Un autre truc marrant avec ce monsieur, c’était son utilisation outrancière des anglicismes. Ça ne me dérange pas, ça fait partie de ses super-pouvoirs, d’ailleurs je dois certainement en utiliser moi-même sans m’en rendre compte. Là où ça devient rigolo, c’est avec le mot ‘bid’.

‘Bid’ signifie ‘offre’ ou ‘proposition’ (de vente ou d’autre chose). Dans une phrase en français, ça produit un effet assez ridicule : « on va faire un bid ! », « c’est vraiment un très gros bid », …

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Collègue NinjaBlingBling

Un mec cool. Je l’aimais bien, il avait pas peur d’ouvrir sa gueule et lâchait rien, il s’accordait donc à merveille avec des gens comme moi ayant une personnalité flambie.

Il a découvert une souris morte au milieu du couloir (c’est impressionnant la quantité de bestioles débiles qui squattait cette boîte). Il l’a jeté et a envoyé un mail de pourrissage général pour signaler qu’évidemment personne d’autres que lui n’avais fait l’effort de le faire et que donc on était tous très vilains. Sauf que son action héroïque, il l’a accomplie vers 8 heures du matin, en étant parmi les premiers arrivés. Alors oui forcément, personne n’a pu le faire avant lui.

Je me permet d’ajouter que quand j’ai décollé un cadavre de lapin mort sur le parking, je n’ai pas pourri la totalité de l’univers connu à coups de mails héroïques, ni signalé que « chacun doit nettoyer son propre caca ».

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Collègue GenerationY

J’en ai déjà parlé. Un mec bizarre.

Petite anecdote merdico-rigolote : lorsqu’il jouait à la belote à la pause de midi, il râlait et s’énervait tout seul parce qu’il n’avait jamais un bon jeu et que son partenaire du moment jouait comme un pied. J’ai fait une seule partie avec lui, ça a été un rouspéto-roumégage continu.

Maintenant que j’y pense, mon cerveau est vraiment un abruti de m’avoir mis mal à l’aise durant ces moments pouilleux où Collègue GenerationY me faisait bien sentir que j’étais un boulet. Le fait que c’était un petit enfant mauvais joueur aurais dû me donner la force de caractère pour m’immuniser contre ses influences boulettisantes.

Bref, encore un beau tocard de bonne facture.

De toutes façons j’ai jamais rien pigé à la belote. Je préfère le Perudo.

MégaChef De L’Industrie

Il est arrivé un peu de nul part. Mais sa légitimité a été automatiquement et unanimement approuvée lorsqu’on nous l’a présenté durant une grande messe corporate et qu’on nous a dit qu’il venait « de l’industrie ».

C’est sérieux l’industrie. Couillu, viril et tout. Pas comme ces petites taffiotades de logiciels qui sont des produits immatériels et qu’on ne peut donc pas physiquement bifler même en étant doté d’un énorme pénis d’industriel.

L’une des équipes de la boîte fonctionnait mal (pas Test-0-Steron, une autre). MégaChef De L’Industrie était chargé de la ‘redresser’. Il a étudié le tout, a écouté chaque personne et a donné une consigne générale :

« Messieurs les commerciaux, vendez. Vendez tout et n’importe quoi. Même des choses qui n’existent pas encore. Nous derrière, on saura vous fournir les moyens qu’il faut pour les faire exister. »

Vous la sentez venir, la cagafouillade géante ?

Les commerciaux, stressés par cette consigne, casseront les prix. Ils retourneront voir De L’Industrie, l’œil hagard et le costume débraillé, en clamant : « j’ai réussi à vendre un logiciel féérique et inexistant pour 100 euros. C’est un peu bas comme prix, mais je n’ai pas pu obtenir mieux, pourtant je me suis démené comme un beau diable ».

Ensuite, De L’Industrie dira aux ouvriers-codeurs de créer la féérie très très vite. Il ajoutera (ou pas) les « moyens qu’il faut ». Ça monopolisera trouze-mille jour-hommes et à la prochaine grande messe corporate, toute l’équipe sera pointée du doigt comme étant vilainement pas rentable.

Parce que « vendre tout ce qu’on peut » et « vendre tout ce qu’on peut en étant rentable », c’est pas la même chose. Mais si je dis ça, c’est sûrement parce que j’y connais rien en gestion d’entreprise, je viens tellement pas de l’industrie.

Ça c'est de l'industrie !

Ça c’est de l’industrie !

Collègue Moche

C’était juste un mec super moche. Ça arrive.

J’ai été choqué par le champ gravitationnel d’hypocrisie généré dans son entourage.

Aucun des autres collègues, mais absolument AUCUN, n’a mentionné son hypermocheté au détour d’une conversation quelconque. Même lorsqu’il n’était pas présent.

Ça m’a un peu inquiété. J’avais l’impression d’être le seul au monde à avoir remarqué sa pas-gueule, j’étais limite à me demander si ça faisait pas de moi un mec encore plus bizarre que je ne le pensais, ayant des critères de beauté totalement différents des autres.

Mais un jour, j’ai croisé ce collègue alors que j’étais dans un bar en compagnie de gens du pas-travail. Ils m’ont tous dit que j’avais du cran pour passer plusieurs heures par jour à moins d’un kilomètre de lui sans vomir. J’ai été rassuré.

On ne se rend pas assez compte à quel point c’est important pour sa santé mentale de côtoyer des gens qui n’hésitent pas à balancer du bon gros troll de merde.

(Ici, ne pas mettre de photo de Collègue Moche, sinon vous allez exploser).

Collègue Remplaçant

C’est donc le monsieur qui m’a remplacé lorsque je suis parti. Il était destiné à un autre morceau de la boîte, mais du coup il a été catapulté dans l’équipe Test-0-Steron.

Première rencontre avec lui, avant son embauche officielle. Cheffette Gothique lui demande : « Tu t’y connais en C# ? En karmagraphie tantrique ? En OpenGL ? ». (C’était les technos sur lesquelles je bossais).

Il répond que non, et que c’est pas ce qui l’intéresse ni ce qu’il voudrait apprendre. Cheffette est tombée des nues. La suite de la conversation a été assurée par d’autres collègues et ça a dérivé en pseudo-réunion de choix techniques sur Modeli-Morvax. Remplaçant était au milieu de tout ça, plus personne ne s’intéressait à lui (à moi non plus, mais c’était normal vu mon statut de lâcheur officiel en période de préavis de démission).

Le lendemain, Cheffette Gothique annonce à toute l’équipe que Chef «  » l’a appelée pour nous pourrir intégralement tous. Collègue Remplaçant était allé se plaindre qu’on l’avait mal accueilli et qu’il aurait du mal à s’intégrer, car on lui avait dit qu’il devait maîtriser des technologies ne faisant pas partie de ses intérêts.

Je ne peux pas savoir si Collègue Remplaçant a réellement pleuré dans les jupes de Chef «  », ou s’il a juste émis quelques remarques que Chef «  » a pris pour du pleurage de jupe. Personnellement je pencherais pour la deuxième option. Dans tous les cas, le premier contact entre Collègue Remplaçant et l’équipe Test-0-Steron a vraiment été supragénial et annonciateur d’auspices les plus suprameilleurs.

Les auspices girls ?

Les auspices girls ?

Des conneries que j’ai faites

Ayant bien déblaterré sur les déblaterrages de mes collègues et chefs, je me dois de rétablir un minimum d’équilibre dans l’univers global. Voici donc la liste de mes conneries. Je ne vais pas trop détailler car je ne suis vraiment pas fier de ces actes. Si vous ne comprenez pas de quoi je parle, ce n’est pas grave, passez à la suite. (Ce conseil s’applique également à l’ensemble de mon blog, voire à l’univers global).

*)

Je devais installer sur le poste d’un client le middleware tantrique de merde dont j’ai déjà parlé maintes et maintes fois. Comme toujours, cette action n’était pas censée prendre plus d’un quart d’heure. Comme toujours, y’a eu une merde. L’installation ne marchait pas, sans que je sois capable de déterminer pourquoi. J’en ai eu marre et j’ai dit au client qu’il y avait qu’à copier les fichiers du middleware. Ce que j’ai fait, en prenant ceux que j’avais sur mon poste. Ça a fonctionné, je suis passé à autre chose. Ensuite, le client à recopié ces mêmes fichiers sur une dizaine d’autres de ses postes, ce qui n’était pas déconnant puisque je lui avais dit que ça passait crème.

3 mois plus tard, tout a pété chez eux. La copie des fichiers avait embarqué notre clé de licence. Or il s’agissait, non pas d’une clé client, mais d’une clé partenaire, qui doit être renouvelée tous les ans.

C’est Collègue Drache-Code qui a dû réparer un par un tous les postes. Force est de reconnaître que cette fois-ci il a fait quelque chose de bien. Mais il était pas jouasse. Il a dit à la cantonnade de l’équipe : « j’en ai marre de nettoyer les merdes de tout le monde ». Je me suis confondu en excuses.

Oups... Boulette.

Oups… Boulette.

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Y’a aussi l’histoire de Machin, un mec d’une société partenaire qui a dit à Chef Random qu’il passerait peut-être nous voir (on savait pas trop dans quel but). Après moultes tergiversations, il a envoyé un mail pour demander : « finalement, je me radine ou bien ? ». Je me suis dit que des gens plus importants que moi s’occuperaient de cette relation publique, je n’ai donc pas répondu, et je n’ai pas non plus transmis.

Chef Random vient me voir et me dit : « Yo. Il est mort pendant eul’ trajet, Partenaire Machin, ou bien ? ». Et là, un doute m’habita. Je reconsulte le mail et m’aperçois que les seuls destinataires sont moi et Collègue Eurod’ (qui était en congés). J’ai signalé ma boulette à Chef Random, mais c’était trop tard. L’heure du rendez-vous éventuel était pas-dépassée-mais-presque. Chef Random a été obligé de s’excuser auprès de Partenaire Machin. Ensuite il m’a engueulé.

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Je suis en partie responsable de L’IHM pourrie de Modeli-Morvax v1.0. Elle était tellement pourrie qu’on ne comprenait pas toujours les effets d’un clic ou d’un glisser-déplacer, ce qui a contribué à faire dire à Chef «  » que « Modeli-Morvax, il fait n’importe quoi ».

Mais sur cette connerie, j’étais pas tout seul. Drache-Code en était l’instigateur principal.

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Ça faisait plusieurs mois que je travaillais sur GLORP, un outil de mise à jour des glorps. À chaque livraison, le client nous balançait une liste de bugs. (Au passage, certains d’entre eux étaient la conséquence de spécifications initiales pas claires, mais ça c’est comme d’habitude).

Lors de l’une des livraisons, le client nous re-signale un bug déjà signalé la fois précédente. Je vérifie. Effectivement : j’avais oublié de coder la correction !

Je savais ce que je devais faire pour cette livraison, je m’étais concocté une petite liste. Eh bien j’ai oublié un truc dans cette liste.

Ça fait vraiment bizarre. On peut se planter de plein de manières quand on fait du dev, mais ‘oublier’ quelque chose, c’est rare, il faut vraiment être à la masse. (Je l’étais, ça faisait plusieurs mois que je codais régulièrement les soirs et les week-ends pour cette merde).

Après ça, on a décidé de créer des tests de validation pour GLORP. Excellente idée ! D’ailleurs, ne serait-ce pas ce qu’il aurait fallu faire dès le début ?

Sorry, my bad.

forgetfulness

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Il y a également les autres conneries que j’ai déjà racontées : la confusion prise série / prise VGA, la clusterisation de persona-pixels et le non-transfert du téléphone avec Maryse-Gâteau.

D’autres trucs en vrac

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Lorsqu’on part d’une boîte, on a droit à des vacances de fait : durant toute la période de préavis, vous pouvez glander, vous n’en avez plus rien à foutre. Légalement, cette période dure 3 mois. Mais les entreprises savent très bien que leurs ouvriers en profitent pour buller à foison tels des cachets d’aspirine dans l’eau, donc elles « acceptent gracieusement » de réduire ce temps à 2 mois.

Cette putain de boîte ne m’a même pas accordé la totalité de cette période magique. Lors de mon embauche 4 ans plus tôt, j’avais accepté d’avoir le statut de technicien et non pas d’ingénieur. Nonobstant la paye de merde, mon préavis était d’un mois seulement.

Sans que je comprenne pourquoi, j’éprouvais une espèce de stupide conscience professionnelle, certainement due au fait qu’ils m’avaient conditionné pour faire de moi un bon petit soldat corporate. Ce sentiment m’a forcé à travailler à nouveau les soirs et les week-ends, pour documenter tous les projets sur lesquels j’avais travaillé. Mon abruti de cerveau m’a forcé à ne pas partir en laissant mes collègues dans la merde.

Même ce tout petit mois de glandage autorisé, je n’en aurais pas profité pleinement. D’autre part, il est fort possible qu’ils ne lisent pas ma documentation. Clampins.

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Sur une période de plusieurs mois, j’ai gaspillé le temps libre que la société civile actuelle daigne m’accorder pour coder un super algorithme d’appariement de caractochromes karmagraphiques. Ça m’intéressait vraiment et c’était un chouette challenge de code.

L’algo fonctionnait plutôt bien. On s’en est servi pour fournir des prestations one-shot à des Clients. Chef Random et Collègue SuperFlamby ont eu vent de ma réalisation, l’ont trouvé sympa et m’ont dit que ça pourrait être sujet à du CIR (Crédit d’Impôt Recherche). Ça rapporterait peut-être pas beaucoup, surtout que d’autres projets bien plus sérieux avait été soumis, mais du pognon gratuit c’est jamais négligeable. Chef Random a laissé sous-entendre que ça pourrait même mériter une augmentation ou une prime.

J’étais super fier de moi. Beau gosse, bon petit soldat, viril et tout.

Ensuite, SuperFlamby m’a demandé de rédiger des documents pour argumenter la demande de CIR. Il les fallait évidemment pour avant-hier. J’ai à nouveau dépensé du temps libre, à un moment où je voulais le garder pour moi et me faire plaisir. Je n’ai jamais vu la couleur de mon augmentation ou de ma prime. Je ne me souviens même plus si le CIR en question a été validé.

Cette déliquescence est assez représentative de la déliquescence progressive générale de ma motivation dans cette boîte.

Je m’en veux d’avoir brûlé tout ce temps libre. On ne m’y reprendra plus jamais. Si un jour j’ai une super-idée d’un super-projet super-génial pour la super-boîte dans laquelle je super-bosse actuellement, j’en parlerais peut-être à des collègues, mais je ne claquerai pas une microseconde de Temps Libre pour ça.

"M'appelez pas CIR. Je ne suis plus roi."

« M’appelez pas CIR. Je ne suis plus roi. »

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Je me suis petitement remboursé de mes heures sup’ d’esclave et de mon salaire de misère non-augmenté, en volant régulièrement des serviettes essuie-mains que j’utilisais ensuite comme mouchoir. De plus, comme expliqué dans un ancien article, mon corps s’est inconsciemment entraîné à faire caca uniquement durant le travail.

Pendant plusieurs années, j’ai donc très peu acheté de mouchoir en papier et de PQ. Il n’y a pas de petites victoires.

Je tiens à remercier mon corps pour son dévouement et sa ténacité durant ces opérations d’optimisation de budget.

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Comme déjà écrit, on devait tracer le temps qu’on passait sur nos différentes tâches. Ça se faisait avec une interface poucrave et pas pratique, bien évidemment développée en interne. C’est marrant, la situation était la même à Merluchon Corp (ma précédente-précédente boîte). Il y aurait peut-être du fric à gagner à vendre ce genre d’outil.

Je m’étais développé un petit script dans mon coin, (en python, of course). Il récupérait les décomptes de temps que j’avais écrit à l’arrache dans un fichier texte, ajoutait automatiquement le pipeautage nécessaire pour compléter ce que je n’avais pas (ou ne voulais pas) noter et générait un bout de Javascript. Je n’avais plus qu’à le copier-coller dans la console du navigateur et ça envoyait les requêtes Ajax comme si c’était moi qui saisissait tout bien comme il faut.

Cheffette Gothique a fini par me choper avec ce script. Elle a été gentille et l’a bien pris. Tant que les stupides décomptes étaient déclarés, elle ne trouvait rien à redire.

De toutes façons, les valeurs étaient totalement fausses et hypocrites. C’est le cas dans la plupart des boîtes, mais dans celle-ci c’était particulièrement flagrant. Attendez, je vous explique.

Le but annoncé de ces traçages de temps est de « pouvoir estimer les charges de travail des projets futurs, afin d’évaluer ceux qui seront les plus rentables ». Partons du principe que ce n’est pas une vaste blague.

Au début, l’unité utilisée était l’heure. Quand on faisait des heures supplémentaires, on arrivait à un total journalier supérieur à 8.

Le problème pour les chefs, c’est qu’un tel système traçait les heures sup’, qu’on aurait pu ensuite s’amuser à compter et à revendiquer. Il a donc été décidé d’utiliser l’unité de « fractions de journée ». La somme quotidienne des comptages de temps devait toujours être égale à 1, les heures sup’ n’était plus visibles.

Du coup, ces comptages étaient inévitablement faux, on ne pouvait en déduire la charge de travail réelle d’un projet, ni estimer celle des projets futurs. Le but annoncé au départ n’était donc bien qu’une vaste blague.

Autre chose amusante à ce sujet. Nos fringants financiers avaient estimé le coût journalier d’un ouvrier-codeur, afin de pouvoir directement évaluer si un projet est rentable ou pas. Ce coût journalier était bien plus haut qu’un salaire journalier d’ouvrier-codeur, ce qui est normal : il faut compter les charges, jours de congés, loyers, frais fixes ainsi que les salaires des « improductifs » : chefs, gens de l’infrastructure du monde physique, secrétaires, financiers, …

Ça vaudrait le coup de se poser la question d’un tel système, qui ne permet de mesurer que la productivité des gens productifs, mais je ne vais pas m’étendre là-dessus. Rappelons que je n’ai aucune idée de la manière dont est censé être géré une boîte et que je m’en fous complètement.

Un beau jour, ce fameux coût journalier a été recalculé par les financiers, qui l’ont instantanément fait grimper de 150 euros ! Je veux bien croire que tout augmente, mais aussi rapidement c’est un peu suspect. Soit c’est du flan pour nous faire culpabiliser qu’on coûte cher et nous message-subliminaler qu’on doit travailler plus. Soit ils étaient complètement à l’arrache et n’avaient pas réajusté le coût depuis des années. Dans les deux cas, ça rend leurs savants calculs pas crédibles.

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Je suis parti

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J’étais venu dans cette boîte parce que la paye de merde était contrebalancée par le fait que la totalité des 35 heures étaient sous forme de RTT. Ça m’aurait fait plein de temps libre, ce qui est plus important que l’argent pour moi.

Je n’ai jamais pu prendre toutes ces belles RTT, pas plus que mes jours de congés. J’ai été obligé d’en cumuler une quantité stratosphérique. Ils m’ont tout remboursé quand je suis parti, sauf que c’était sur la base de mon salaire de merde. J’aurais vraiment préféré avoir ça sous forme de temps libre.

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Avant de partir, j’ai fini toutes les bouteilles entamées qui traînaient dans les frigos. Ça m’a donné un sentiment de nettoyage très soulageant. J’ai été heureux d’avoir pu saisir cette occasion de rendre service.

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À chaque fois qu’on change de boîte, on lance les dés. Si vous faites un triple 6 avec deux dés, vous arrivez dans un endroit magique dans lequel vous pouvez raisonnablement glander et faire des choses pour vous pendant les heures de travail. Mais vous ne pouvez jamais savoir à l’avance le résultat des dés.

Vous pouvez demander une foule de choses durant l’entretien d’embauche : Est-ce bien payé ? Y’a-t-il des formations ? Quelles sont les technologies utilisées ? Quels sont les projets en cours ? Comment sont les collègues ? Le café est-il bon ?

On ne vous dira peut-être pas la vérité. Mais vous pouvez au moins poser la question.

En revanche, vous ne pouvez pas demander s’il y a possibilité de glander. Ce n’est pas une question acceptable. À la limite, vous pouvez demander si le rythme est stressant ou pas, mais c’est délicat, et vous êtes à peu près sûr qu’on vous mentira.

D’où l’analogie avec le jet de dés.

Et là j’avais vraiment envie de les jeter à nouveau.

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Et dans la nouvelle boîte ?

Lorsque c’est la merde dans une boîte : délais non-euclidiens, projets pourris, collègues psychédéliques, etc. ça ne l’est jamais dès le départ. Mes débuts à Zarma.pro étaient fabuleux.

Je Travaille maintenant chez « ConcreteWorld.🌏 ». (Le dernier caractère se prononce « 1F30D »). Pour l’instant tout est fabuleux, mais je ne veux pas crier victoire trop vite. Ça fait 7 mois que j’y suis, je considère encore que c’est les débuts.

J’essayerai de vous raconter ce qu’il s’y passe au fur et à mesure. Ça m’évitera de balancer un roman en 3 articles géants au moment où j’en partirais. En attendant, voici quelques remarques rapides :

  • Le cœur de métier de cette entreprise est la conservation de la réalité. Peu de gens savent qu’un travail de fourmi est effectué dans l’univers entier, par une multitude d’entreprises et d’organismes, pour conserver la réalité telle que vous la connaissez. Les incohérences et autres paradoxes sont détectés et circonscrits au plus vite. Sans nous, des principes de base comme la causalité, l’entropie, la tridimensionnalité ou la constance de la constante cosmologique ne seraient pas intégralement garantis.
  • Un point négatif : la radio est diffusée en continu dans les toilettes. Ça me lourde vraiment d’entendre les connards de Peugeot ou de Lidl dégueuler leurs abruticités pendant que je me masturbe. C’est encore cette putain de RTL2 gavée de pub. Elle me suite partout cette radio de merde à la con.
  • Comme à chacun de mes changements de boîte, je fais vœu de non-flatulence. Celui-ci a tenu 3 jours.
  • Je suis beaucoup moins dérangé par des clients idiots ou des collègues impertinents. C’est quand même beaucoup mieux pour se concentrer. Lorsque je mets mon casque sur mes oreilles je peux avoir l’espoir d’écouter au moins 4 morceaux de musique en entier. À ce propos, je suis en train de me monter une bonne playlist dub dans soundcloud. Si ça vous intéresse c’est par ici : https://soundcloud.com/recher

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